Voici le compte-rendu de lecture du mois de novembre, qui arrive assez tôt dans le mois, puisque j’ai profité des vacances pour me plonger dans mes lectures cinéphiles.

Cette lecture m’a permis de faire de belles découvertes ou redécouvertes, et m’a fait déroger à la règle que je m’étais fixée : ne plus acheter de pavé insoulevable et seulement me les faire offrir durant les fêtes de fin d’année ou pour mon anniversaire.

Films historiques

C’est en cherchant une lecture de vacances que je suis tombée, presque par hasard, sur le livre dont je vais parler plus en détail dans un instant.

J’avais vu passer l’information sur Twitter comme quoi ce livre était paru. J’avais cliqué, et je m’étais dit, dans un premier temps, qu’il n’était pas raisonnable de garnir ma bibliothèque d’un nouveau bouquin énorme : l’ouvrage concerné est en effet un pavé de plus de 600 pages.

Puis, en flânant dans une librairie très sympathique près de Solférino, et abandonnant le rayon « cinéma » pour le rayon « histoire », j’ai trouvé le livre.

Les habitués de ce blog savent que j’apprécie beaucoup les films historiques, j’ai consacré à ce sujet au moins deux articles, dont l’un sur l’ouvrage L’Histoire fait son cinéma.

Quel que soit le pays dont on reconstitue une époque, quel que soit le personnage dont on fait le biopic, les films historiques me fascinent (L’un de mes films préférés reste Barry Lyndon de Stanley Kubrick) – et je ne parle pas des séries : ma dernière découverte est la série anglaise The White Queen, qui évoque la guerre des Deux Roses, à travers le regard d’Elizabeth Woodville, l’épouse du roi York Edouard IV.

Tout cela pour dire que le livre déniché en librairie m’a enchantée, tout comme son auteur, même si je me doute bien que ce genre d’ouvrage n’est pas à la portée de tous les porte-monnaie (quoique 40€ pour un livre de cette taille et de ce poids ne me semble pas non plus excessif), ni proche des goûts de tout le monde.

Cet article me permet donc d’évoquer des films historiques, et, comme à mon habitude, je tenterai de le ponctuer d’extraits bien choisis, sinon pour vous convertir, du moins pour vous mettre en appétit…

Petit caporal sur grand écran (1)

Comme le titre de cet article le laissait deviner, c’est à Napoléon Ier qu’est consacré ce splendide pavé, paru en septembre 2015 aux éditions Ides et Calendes, Napoléon : l’épopée en 1000 films, sous la plume d’Hervé Dumont, et préfacé par Jean Tulard.

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Mettons les choses au point tout de suite : je n’ai pas une admiration sans bornes pour Napoléon. Au mieux certains aspects de l’homme et de son règne me fascinent (j’ai le Mémorial de Sainte-Hélène dans ma bibliothèque), et j’ai appris à le considérer d’abord en tant que lectrice de Victor Hugo et de Stendhal, ce qui n’est pas toujours neutre comme point de vue, puis comme spectatrice au cinéma.

Avant de me pencher plus précisément sur l’ouvrage, un mot rapide sur Hervé Dumont, à qui je dois la découverte de sa merveilleuse encyclopédie en ligne du film historique : c’est un trésor ! Si histoire et cinéma vous passionnent, ne tardez plus : allez y flâner !

Et maintenant, Napoléon, le cinéma et Napoléon au cinéma !

Petit caporal sur grand écran (2)

Que peut-on dire de cette somme proposée par Hervé Dumont ?

Déjà, il faut y revenir, qu’elle est préfacée par Jean Tulard, spécialiste de Napoléon mais également auteur d’un Dictionnaire du cinéma qui fait référence.

Qu’ensuite, Hervé Dumont est l’auteur d’un certain nombre d’ouvrages sur le cinéma, notamment sur l’histoire du cinéma suisse et, nous l’avons dit, d’une encyclopédie du film historique en ligne qui semble être une mine d’or pour les passionnés.

Enfin (mais c’est loin d’être tout), Napoléon : l’épopée en mille films permet à l’amateur (d’histoire ou de cinéma) de se plonger tout à la fois dans une histoire et une filmographie gigantesques sans perdre pied. Sur le plan de l’organisation, l’ouvrage est juste grandiose. Je m’explique :

  • tout d’abord nous avons une introduction qui fait, entre autres, le point sur la représentation de Napoléon : précurseur de l’Europe moderne ou tyran, idéalisé ou diabolisé, comment a-t-il été décrit, condamné ou transfiguré, que les écrivains ou les réalisateurs soient français, anglais, russes, italiens, espagnols… Ce qu’il y a de sûr, et ce dont nous prévient l’auteur, c’est le nombre colossal de films qui lui sont consacrés ;
  • ensuite, après cette introduction déjà trop riche pour qu’elle puisse être résumée, l’auteur revient sur les films qui évoquent la trajectoire de Napoléon dans son ensemble, depuis sa naissance en Corse jusqu’à sa mort en exil à Sainte-Hélène ;
  • il aborde ensuite chacune des parties de la vie de l’Empereur de la façon suivante : un résumé historique, un résumé filmographique (une synthèse sur la façon dont les cinéastes ont abordé le sujet) et enfin la liste des films concernés, avec fiche technique, synopsis, histoire et analyse.

En bref, pourquoi ce mode de construction est-il l’idéal ? Parce qu’au lieu de prendre l’angle du cinéma, de faire une chronologie partant du cinéma muet jusqu’à 2015, l’auteur croise habilement les deux.

Chaque chapitre renvoie à une période de l’épopée napoléonienne, à un personnage, à un événement, dans l’ordre chronologique, et après seulement les films sont classés par ordre de sortie, ce qui évite de retrouver un film muet sur Waterloo avant un film récent sur le 18 Brumaire.

Cette organisation permet aussi une lecture personnelle de l’ouvrage : le lecteur scrupuleux suivra Napoléon au fil de ses batailles, de ses rencontres et de ses confrontations, le flâneur pourra s’aventurer d’une affiche de cinéma à une autre, d’un drame à une comédie, en passant – car Hervé Dumont, avec humour, ne laisse aucun genre de côté – par la satire, l’uchronie, voire le film érotique (et un épisode de Doctor Who !).

C’est d’ailleurs généralement avec humour que l’auteur s’exprime, mais aussi avec un ton friand d’anecdotes et sans indulgence. J’ai particulièrement retenu cette analyse d’un téléfilm anglais Napoléon de 2007, qu’il conclut ainsi :

Le téléfilm de Nick Murphy est l’unique fiction consacrée au siège de Toulon (…). L’assaut final sous la pluie battante (Bonaparte y est blessé à la cuisse) nous est offert avec moult ralentis et violons. Quant au jeune Corse joué par Tom Burke, c’est un dadais chevelu légèrement empâté, au sourire niais et montrant autant d’autorité qu’un koala.

Au cœur de l’épopée napoléonienne

Il est évidemment impossible de faire un résumé exhaustif de ce livre. Aussi je vous propose quelques haltes, parmi les films vus, revus et à voir, ceux que l’auteur considère comme des références et ceux qui ont nourri mon envie d’acheter son ouvrage et de m’y plonger.

  • L’une des références les plus souvent citées par Hervé Dumont, hormis l’article qu’il lui consacre, c’est bien entendu le Napoléon d’Abel Gance, sorti en version muette en 1927, ressorti en version sonore en 1935, qui devait à l’origine suivre Napoléon de Brienne jusqu’à Waterloo, mais qui pour des raisons financières s’achève sur la campagne d’Italie, et que j’avoue, à ma grande honte, ne pas avoir vu.
  • Sacha Guitry a consacré plusieurs films à Napoléon et à son entourage : son premier amour dans Le Destin fabuleux de Désirée Clary, ses relations avec Talleyrand dans Le Diable boiteux. C’est également l’un des rares à avoir consacré un film à la vie entière de Napoléon, de sa naissance à sa mort, et que j’ai vu et revu au point de le connaître presque par cœur, mais pas aussi bien tout de même que Si Versailles m’était conté. Une fresque incroyable, avec que des grands acteurs des années 50, où l’histoire est savamment triturée, racontée et orchestrée par Guitry.
  • L’ouvrage d’Hervé Dumont m’a donné envie de voir le film Désirée, consacrée au premier amour de Bonaparte, Désirée Clary, avec un Bonaparte incarné par Marlon Brando. Par contre, l’auteur n’est pas tendre avec Marie Walewska (The Conquest), le film qui évoque la relation de Napoléon (Charles Boyer) avec son « épouse polonaise » (Greta Garbo), bien que personnellement j’y trouve une Garbo tendre, douce, parfois rieuse et moins lointaine qu’à l’accoutumée…
  • Napoléon : l’épopée en mille films ne tarit pas d’éloges sur deux films en particulier, Les Duellistes (The Duellist), le premier film de Ridley Scott, que j’ai du coup acheté mais que je n’ai pas encore eu le temps de voir, et Master and Commander, de Peter Weir, avec Russell Crowe, une magnifique évocation des guerres maritimes napoléoniennes, entre les corsaires français et la marine britannique.
  • Ce livre m’a également rappelé un film superbe que j’avais vu un jour par hasard, Lady Hamilton, avec Vivien Leigh (la Scarlett d’Autant en emporte le vent) et Laurence Olivier (le Max de Winter de Rebecca), couple à la ville et à l’écran, et qui raconte la liaison entre Nelson et Lady Hamilton, épouse de l’ambassadeur britannique à Naples.
  • Hervé Dumont énumère les différentes adaptations de Madame Sans Gène, pièce de Victorien Sardou qui s’inspire de Catherine Hubscher, épouse du Maréchal Lefebvre, ma préférée reste la captation de la pièce avec Jacqueline Maillan, avec Alain Mottet dans le rôle de Fouché.
  • On y retrouve enfin quelques adaptations cinématographiques d’œuvres littéraires qui se sont penchées directement ou indirectement sur la période napoléonienne : Guerre et Paix avec Audrey Hepburn, une adaptation du Comte de Monte-Cristo (mes versions préférées sont celles avec Pierre-Richard Willm et avec Jean Marais, toutes deux réalisées par Robert Vernay), une des Misérables (ma préférée est une mini-série de 1972 réalisée par Marcel Bluwal, même si j’ai redécouvert tout récemment celle de Josée Dayan avec Gérard Depardieu), et enfin l’adaptation du Colonel Chabert avec Depardieu, Luchini et Fanny Ardant.

Voilà, en quelques lignes et en quelques vidéos, les films que ce superbe livre m’a donné envie de voir ou de revoir. Et j’espère que l’auteur, en plus de son encyclopédie du film historique en ligne, publiera d’autres livres du même genre, par exemple sur Louis XIV ou sur Elizabeth Ière d’Angleterre…

À bientôt !