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Catégorie : Films (Page 3 sur 7)

Encore un peu plus de cinéma !

Depuis début décembre, en plus de mes ateliers cinéma que j’essaye généralement d’animer deux fois par semaine – programmation, diffusion, tentatives de cohérence avec l’actualité – je reçois la visite d’une classe de quatrième, en collaboration avec l’enseignante d’arts plastiques du collège. Cette dernière faisait travailler ses élèves au mois de décembre sur les origines du cinéma.

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Les élèves devaient remplir un questionnaire, fourni par la collègue, et travaillaient pendant une heure. Comme je ne dispose que de cinq ordinateurs au CDI (sept en temps normal, mais l’un a un problème de connexion à Internet qu’il faut que je règle et l’écran d’un autre est en panne), je fais « tourner » les élèves : une demi-heure de recherche sur Internet et une demi-heure sur les ouvrages documentaires et encyclopédies.

Le questionnaire abordait les questions suivantes :

  • les inventeurs du cinéma (les trois premiers films de l’histoire du cinéma)
  • une biographie des frères Lumières
  • Thomas Edison et ses inventions
  • Georges Méliès, sa carrière, les innovations qu’il a apportées au cinéma (les élèves devaient également dessiner au dos de la feuille une affiche de l’un de ses films)
  • Charles Chaplin (citer trois de ses films)

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A la suite de ces séances de recherche, la collègue faisait réaliser aux élèves des courts-métrages, dont ils devaient d’abord réaliser le storyboard et fabriquer les costumes et les accessoires (le plus souvent en carton ou en papier mâché). Certains tournaient dans la cour, d’autres à l’infirmerie. Elle m’a également proposée qu’un petit groupe d’élèves viennent tourner au CDI.

J’ai donc accueilli une équipe de 5 jeunes réalisatrices – scénaristes – actrices au CDI et j’ai suivi avec intérêt leur travail. D’après ce que j’ai pu suivre de l’intrigue, du coup d’oeil que j’ai jeté au storyboard, intitulé « Le Cauchemar » et des accessoires (masques, hache en carton), en voici l’histoire, composée de trois personnages :

Dans une bibliothèque (CDI oblige), un lecteur installé dans un fauteuil voit passer un meurtrier masqué armé d’une hache à l’extérieur. L’instant d’après, le meurtrier surgit à l’intérieur de la bibliothèque pour tenter de décapiter (voix menaçante) le lecteur. Celui-ci pousse un cri de terreur – j’ai encouragé les élèves à pousser un VRAI cri de terreur : c’est le monstre du livre qu’il est en train de lire, qui vient de surgir des pages (livre fourni par le CDI : la première fois elles avaient choisi L’étrange cas du Docteur Jekyll et de Mister Hyde, la seconde fois, un livre sur les Diables, zombies, monstres et compagnie.) Il est rappelé à l’ordre par un autre lecteur : « On est dans une bibliothèque ici, faites moins de bruit ».

Toute cette petite panoplie me rappelle les clichés qu’évoquent les articles de Notorious Bib, qui dissèquent l’univers des bibliothèques dans les films comme P.R.O.F.S., Star Wars, ou même Hugo Cabret si l’on veut retrouver l’univers de Méliès…

J’aimerais bien prolonger ces petites séances – après avoir vu évidemment le film fini – par une petite visite à la Cinémathèque française, partie Musée du cinéma. J’ai d’ailleurs hâte d’être au mois d’avril pour redécouvrir l’univers féerique de Jacques Demy en exposition temporaire (si jamais la visite coïncide, ce serait top, il faut que je propose à la collègue !). Infos : ici. L’affiche promet déjà :

Expo Jacques Demy Cinémathèque

Un voyage très attendu

The Hobbit

On le guettait, on l’espérait depuis des mois… depuis les inévitables affiches et bandes annonces qui ponctuaient l’attente : cet après-midi, j’ai vu Le Hobbit, de Peter Jackson. En tout cas, la première partie de sa trilogie : Un voyage inattendu. Evidemment, l’une des réserves que l’on pouvait émettre – et que beaucoup ont émise – c’est la transformation d’un roman assez court en un film en trois parties. Avec Le Seigneur des anneaux, la chose se justifiait d’elle-même : trois volumes, La Communauté…, Les Deux tours, Le Retour du roi. Avec Le Hobbit, avant d’avoir vu cette première partie, on est tenté de crier au prétexte commercial, ou, pour être plus gentil, à l’envie de faire durer le plaisir.

Pour ma part, je pense qu’il y a deux sortes de spectateurs du Hobbit : ceux qui ont grandi avec les adaptations du Seigneur des anneaux, qui ont vu et revu la trilogie, que les trois films ont conduit à la lecture du roman (ou vice versa) et qui en savourent les anecdotes et les dédicaces, depuis « Christopher Lee est le seul à avoir connu Tolkien » jusqu’à certains épisodes de The Big bang theory. Et puis il y a les autres, oserais-je dire les plus jeunes. Ceux qui vont aller ou sont allés voir cette première partie par curiosité et qui vont, ou non, accrocher.

Je fais partie de la première catégorie. J’ai vu et revu Le Seigneur des anneaux. J’ai mes personnages de prédilection (Merry et Pippin, Gandalf, Gimli, Galadriel, Aragorn, Elrond, Eowyn), d’autres que j’apprécie moins, et qui sont plus ou moins liés au comédien qui les incarne, même si j’ai aussi lu et relu le roman. Dire que j’attendais Le Hobbit avec impatience est un euphémisme, bien que ma lecture de ce roman de Tolkien soit un peu plus floue que celle du Seigneur des anneaux.

Mais globalement, je n’ai pas été déçue du voyage. Bien-sûr, il y a quelques petites facilités qui déconcertent dans ce film, comme le souligne très bien Gillossen dans sa critique sur Elbakin, surtout la scène de combat avec les gobelins qui rappelle quasi plan pour plan la scène de fuite dans la Moria. On a parfois l’impression que l’on est davantage dans la contemplation de l’action, et dans sa préparation, que dans l’action elle-même. Mais pour ceux qui font partie de ces fans « première génération » qui ont vu LOTR, on a juste l’impression de retrouver un univers familier, qu’après tout, on est heureux de retrouver : mêmes paysages à couper le souffle, même musique captivante, mêmes comédiens qui nous ont éblouis : Ian McKellen, Cate Blanchett, l’excellent Christopher Lee…

Les premières scènes sont magiques, avec leur évocation du royaume d’Erebor et de l’arrivée de Smaug, le tour de force étant de ne jamais montrer du dragon que son ombre et ses flammes… il est une menace qui plane et qui s’endort durant tout le film, pour mieux s’éveiller et nourrir notre attente de la suite à la fin de ce premier volet.

Ce dernier tient ses promesses, malgré quelques longueurs. On achète. La scène avec les trolls est très réussie. On prend plaisir à retrouver Rivendell et à rencontrer Radagast, personnage crucial et néanmoins absent du Seigneur des anneaux, et celui-ci apporte l’un des éléments d’humour, parmi d’autres, qui nous rappelle qu’à la base, il s’agit d’un livre de littérature jeunesse. En gros, tous ces êtres, ces animaux, ces évènements, sont aussi des beaux diamants dans un bel écrin.

La scène que je guettais, pour laquelle j’avais le plus d’impatience, c’était évidemment la confrontation de Bilbo et de Gollum. Pour moi, il s’agit de la scène du film la plus réussie, et l’on y ressent très bien, comme dans le roman, cette tension entre la farce et la terreur. D’un côté la créature maudite, aux yeux ronds comme des billes, qui est toute à la surprise de revoir un être humain et de « socialiser » avec lui – même si le but ultime de la manoeuvre est de le dévorer. De l’autre, ce « cambrioleur » maladroit qui a mis la main sur un trésor – il ne sait pas encore lequel – et qui veut à tout prix saisir n’importe quelle chance, à la rigueur un jeu d’énigmes, pour pouvoir se tirer de cette situation qui, depuis qu’il a quitté sa chère Comté, ne cesse de devenir pour lui de plus en plus improbable. Cette scène, c’est LA scène, où tous les fils se dénouent et se nouent pour la suite…

D’ailleurs, à propos de suite, vivement la suite !

Discussions historiques

Henri II

Avec quelques amis, et certains collègues, il arrive que nous nous lancions dans des conversations que les personnes de notre entourage peuvent trouver barbantes ou délirantes, suivant le ton que nous employons et l’enthousiasme que nous témoignons. Quel est le point de départ de ces discussions, généralement je ne m’en souviens pas. Il suffit parfois d’un détail. Si l’on tente d’établir le fil conducteur, cela peut donner ceci :

  1. série télévisée A ou B / film historique
  2. détail présent dans ce film ou cette série, point de l’histoire, inspiration ou controverse
  3. rétablissement de la vérité ou débat
  4. digression du sujet principal à un sujet plus ou moins proche
  5. nouvelle digression vers un autre sujet historique
  6. retour à un film / série télévisée C ou D évoquant cette période ou ce personnage.

Lors d’une dernière conversation avec des amis, voilà de quelle manière ce schéma s’est vérifié :

  1. Game of thrones
  2. Inspiration de George Martin : les rois maudits et la guerre des deux Roses
  3. Comparaison des évènements de la guerre des deux Roses avec certains évènements du Trône de fer
  4. Apparence physique des rois de France, lien de parenté entre Louis XII et François Ier
  5. Comparaison des différentes régentes françaises : Catherine de Médicis, Marie de Médicis, Anne d’Autriche. Différentes familles : Tudors, Borgia, etc.
  6. The Borgia, série avec Jeremy Irons.

Les sujets de prédilection sont le plus souvent : les guerres de religion, les dirigeants plus ou moins dans l’ombre (ministres, conseillers, éminences grises), les dirigeantes, et pour ma part, les épisodes de l’histoire anglaises allant de la guerre des deux Roses à la mort d’Elisabeth Ière. Les notions de consanguinité et de loi salique sont régulièrement abordées.

Généralement aussi, l’on arrive aux prises de position suivantes, qui feraient bondir un historien chevronné digne de ce nom : la supériorité indiscutable de Catherine de Médicis et d’Anne d’Autriche sur Marie de Médicis en tant que femmes et que politiciennes, la responsabilité de Madame de Maintenon dans la révocation de l’édit de Nantes, le manque de fondement de la loi salique…

En fonction des personnes, la discussion dévie vers d’autres sujets : la sexualité de Louis XIII, les guerres d’Italie, les maîtresses de Louis XIV, la personnalité de Henry VIII, Braveheart versus Kingdom of heaven, Alexandre versus Troie.

A l’origine de ce goût pour les conversations historiques, on retrouve bien sûr les séries télévisées et les films historiques. Parmi mes préférés – et ceux qui peuplent ma dvdthèque, on retrouve :

  • Rome : saison 1 et 2. A partir de deux personnages fictifs, Titus Pullo et Lucius Vorenus, on suit l’histoire de Rome depuis la montée au pouvoir de César jusqu’à l’avènement d’Auguste. Cette série n’est pas seulement captivante du point de vue du scénario, elle est une merveille sur le plan esthétique.
  • Les Tudors : plus sujets à controverse au niveau de la fidélité historique, mais tout aussi passionnant. Avec de bons acteurs qui rendent la chose crédible. Série centrée sur le règne de Henry VIII (rupture avec la papauté, mariages successifs…).
  • Les Borgias : même veine que les Tudors. La lutte pour le pouvoir de cette famille italienne au XVIe siècle. Je n’ai pas vu la série française diffusée sur Canal +, je lui ai d’emblée préférée la version avec Jeremy Irons.
  • un téléfilm très bien sur Elizabeth Ière, par Tom Hooper, réalisateur du Discours d’un roi, avec Helen Mirren, l’actrice principale de The Queen. Les trois sont géniaux. Pour le premier, scènes de torture et d’exécutions à regarder avec l’estomac bien accroché. A voir aussi sur cette période : Deux soeurs pour un roi, et les films dans lesquels Elizabeth Ière est incarnée par Cate Blanchett.
  • Downton Abbey : excellente série anglaise sur le début du 20e siècle en Angleterre (un peu à la Gosford Park). Confrontation aristocratie / domesticité. Démarre juste après le naufrage du Titanic. Avec l’excellente Maggie Smith en douairière pétrie de préjugés.
  • Madmen : série géniale sur l’Amérique des années 50. Très soignée et peaufinée. Moins dans l’action que dans la suggestion. A recommander à ceux qui aiment les sous-entendus et les situations troubles. A déconseiller aux bourrins qui veulent de l’action immédiate.
  • Les Ridley Scott : Gladiator, Kingdom of heaven, Robin Hood.
  • La Reine Christine avec Greta Garbo. Fanfan la Tulipe avec Gérard Philipe. Cyrano de Bergerac. L’Allée du Roi.
  • Les films de Guitry. Barry Lyndon de Stanley Kubrick. Amadeus de Milos Forman. Farinelli, Ridicule, et Beaumarchais l’insolent, rien que pour voir l’excellent Luchini dans son meilleur rôle.
  • La Révolution française, film en deux parties sorti en 1989.
  • L’Histoire d’Adèle H. de François Truffaut. Autant en emporte le vent.
  • En histoire du 20e siècle, pêle-mêle : Le Dernier métro, La Chute, La Vie des autres, Good bye Lenin !, Le Docteur Jivago

J’en oublie très certainement, je n’ai noté que ceux qui m’ont le plus marquée, et qui du coup, sont le plus susceptibles à alimenter une de mes discussions historiques.

Le quotient émotionnel

Aujourd’hui, je devais accompagner, avec trois autres collègues, deux classes à une séance de cinéma, dans le cadre du dispositif Collège au cinéma. Ce dispositif permet aux élèves de découvrir trois films dans l’année, qu’on leur fait étudier en détails, en partenariat avec les cinémas locaux. Pour plus de précisions, voir le site du CNC.

Pour des raisons logistiques que je n’approfondirais pas – en gros, vive les compagnies de bus et leur manque d’organisation – il a fallu improviser une séance de secours dans la plus grande salle du collège, équipée d’un TNI (tableau numérique interactif) et d’un vidéoprojecteur, grâce à un collègue habitant à proximité et possédant le DVD du film que les élèves étaient censés regarder, ceci au mépris des questions de droit. Il fallait trouver une solution, on a fait ce qu’on a pu.

Le film concerné : Le Tombeau des lucioles de Isao Takahata, sorti en 1996. C’est un film très émouvant, que je n’avais jamais vu jusque là, et beaucoup des personnes à qui j’en avais parlé me disaient avoir été bouleversées par cette histoire :

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Japon, été 1945. Après le bombardement de Kobé, Seita, un adolescent de quatorze ans et sa petite soeur de quatre ans, Setsuko, orphelins, vont s’installer chez leur tante à quelques dizaines de kilomètres de chez eux. Celle-ci leur fait comprendre qu’ils sont une gêne pour la famille et doivent mériter leur riz quotidien. Seita décide de partir avec sa petite soeur. Ils se réfugient dans un bunker désaffecté en pleine campagne et vivent des jours heureux illuminés par la présence de milliers de lucioles. Mais bientôt la nourriture commence cruellement à manquer.

Après la projection, je discutais avec un collègue de l’importance, chez les Japonais, de l’imaginaire des catastrophes. Lors du tsunami, je me souviens de l’intervention d’un libraire spécialiste en bandes dessinées qui expliquait l’omniprésence des catastrophes naturelles et des apocalypses dans les mangas par le traumatisme des deux bombes atomiques. Il pensait notamment à ce manga consacré à un survivant, Gen d’Hiroshima. Mais même dans les mangas de science-fiction, comme 20th century boys, on retrouve cette thématique de fin du monde, et l’on peut faire remonter cela à la peinture japonaise, en particulier celle de Katsushika Hokusai :

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La particularité du Tombeau des lucioles, comme de la plupart des films que je connaisse des studios Ghibli, c’est, pour faire front aux situations dramatiques ou effrayantes, l’usage permanent de la poésie et de la mélancolie. C’est ce que j’apprécie surtout dans les films d’Hayao Miyazaki, notamment Le Voyage de Chihiro et Le Château ambulant.

Dans le Tombeau des lucioles, le temps est comme suspendu : on redoute la catastrophe, on l’anticipe, mais elle se produit avec douceur, et c’est ce qui rend l’émotion encore plus insoutenable. L’histoire de ces deux enfants confrontés à l’absurdité des bombardements et à la malnutrition, obligés de survivre et de voler, c’est l’histoire de Europa Europa (un jeune garçon juif et son errance dans l’Europe dominée par Staline et Hitler), de Jeux interdits (une petite fille survivante de l’Exode qui trouve refuge chez des fermiers), mais c’est une histoire transfigurée par la beauté des lumières et des paysages.

Et cela m’amène à ma question : la manière dont les ados gèrent l’émotion, en dehors d’une salle de cinéma, dans le noir et le silence – ce qui aurait été un tout autre contexte. Extérieurement, on dirait qu’ils ont le quotient émotionnel d’un tas de briques, et certaines situations qui nous paraissent insupportables les font rire : des morts, des bombardements, des explosions, des enfants obligés de se prendre en charge, de se nourrir, d’avancer… Sur le moment, c’est vrai, je ne comprends pas leurs réactions, j’ai même du mal à y voir une manière de se protéger ou une forme de pudeur.

Mais ce quotient émotionnel varie selon la situation et le contexte, et les échelons intermédiaires sont nombreux lorsque l’on décide d’un film qu’il fait réfléchir ou qu’il est bouleversant. Le même film à quelques mois d’intervalle me paraîtra l’un ou l’autre.

Ces infimes variations peuvent-elles tout expliquer ou tout excuser, je ne pense pas. Mais sans doute manifester une émotion quelconque, la reconnaître et l’assumer nécessite davantage de maturité que je ne le croyais…

Le rire intemporel

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Aujourd’hui a eu lieu la première séance de mon atelier cinéma / ciné-club avec les élèves. Cet atelier étant pour moi un vieux rêve, j’étais impatiente de l’organiser et de voir quelles réactions il allait susciter. Pour cette première séance, j’avais choisi comme créneau horaire une heure sur la pause déjeuner, de 12h30 à 13h30, mais à cheval sur les deux services de restauration. Je n’avais fixé aucune restriction d’accès, je voulais voir combien de personnes seraient réellement alléchées par l’affichage…

L’horaire n’était pas très pratique : certains élèves finissent à 11h30 et vont directement manger. Ils restent dans le réfectoire jusqu’aux alentours de 12h15 et reprennent à 13h (mais la sonnerie est à 12h50). J’ai à peu près la même pause déjeuner qu’eux et vais les chercher dans la cour. Le temps de les installer, ils ne profitent de l’atelier que pendant 20 minutes, à peine. Les autres élèves finissent à 12h30 et reprennent à 14h (ils mangent jusqu’à 12h15). Ils peuvent venir au CDI entre 13h et 13h20. Ils profitent donc de 10 minutes de plus que leurs camarades. Je dois trouver une solution plus pratique, et pouvant satisfaire davantage de personnes.

Au programme de cette séance : deux courts-métrages de Chaplin, « Une journée de plaisir » et « Une idylle aux champs » et deux dessins animés de Tex Avery : « Der gross méchant loup » et « Oiseau du matin, chagrin ». En fait, j’ai alterné les deux. Sur le premier horaire (12h30-12h50), une quinzaine d’élèves, surtout de troisième. Sur le second (13h10-13h50), j’ai atteint une vingtaine, avec en majorité des élèves de sixième.

Ce qui m’a surpris le plus, c’est que je n’ai eu aucune remarque du style « c’est en noir et blanc, c’est muet, c’est vieux », ni aucun départ prématuré une fois les films lancés. Ils explosent de rire – c’est un bonheur à entendre, ça illumine la journée – au moindre gag de Charlot. Que l’humour de Chaplin soit universel et intemporel, je le savais déjà.

« Charlot est un personnage mythique qui domine chacune des aventures auxquelles il est mêlé. (…) Pour des centaines de millions d’hommes sur la planète, Charlot est un héros comme l’était pour d’autres civilisations Ulysse » (André Bazin).

Certaines scènes des Temps modernes ou du Cirque – parmi mes films préférés – me font toujours rire même si cela fait trente fois que je les vois. Quand il lutte contre les machines, les objets du quotidien ou contre les gens, j’ai l’impression que mes batailles avec la photocopieuse sont beaucoup moins tragiques que je ne le crois. D’ailleurs, effet de comique supplémentaire absolument véridique : les fenêtres de mon CDI ont des barreaux. Pendant la projection d’une « Idylle aux champs », un petit de sixième qui était à l’extérieur s’y est coincé la tête en voulant regarder à l’intérieur, sur l’écran. Attroupement, cris, rires, tentatives finalement heureuses pour le dégager, je me suis dit que le gag avait débordé de l’écran…

A la fin de cette séance, quand je demande ce qu’ils ont préféré, de Chaplin ou de Tex Avery, ils répondent tous Chaplin, d’une seule voix, malgré les poursuites, les bruits et les gags de Tex Avery. Je les ai observé pendant toute la projection : attentifs, chuchotant comme jamais, les yeux fixés sur l’écran et éclatant de rire à chaque collision, à chaque bagarre, à chaque rébellion d’objet, de la voiture à la chaise longue.

La plupart m’a demandé quand aurait lieu la prochaine séance – j’ai été tentée de répondre « Le plus vite possible, c’est super ! ». Sans doute la semaine prochaine, mais je veux résoudre ce problème d’horaire. Je veux aussi afficher un programme très clair pour chaque séance. J’aimerais aussi rendre ce CDI transformé pour un temps en salle de projection, plus confortable, avec des coussins ou des couvertures que j’installerais avant chaque session (mais cela attendra janvier et un nouveau budget, ou que je succombe à la tentation et achète ça sur mes propres deniers…).

Séance 2 : Méliès et Laurel et Hardy.

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