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Nouvelle vague, entre rêve et réalité

Pour la première fois depuis quelques années, je n’ai pas en ce début d’année 3 ou 4 (voire 5) articles tout prêts et rédigés, écrits pendant les soirées d’hiver et les vacances de la Toussaint ou de Noël.

Si j’ai quelques lectures d’avance dans ma pile de livres sur le cinéma (enfin quelques… disons deux) et si j’ai aussi dans cette pile déjà les pistes des prochains articles, la transformation de la lecture en article a été bousculée par le planning de début d’année – dont vous avez ou aurez un aperçu dans les articles #profdoc.

Comme j’essaye également de poursuivre mes lectures scientifiques et professionnelles, les lectures cinéphiles et plus récréatives prennent aussi parfois du retard, et j’ai tendance à d’autant plus les savourer, sans forcément que me vienne immédiatement l’idée ou l’analyse qui me permettront d’écrire dessus.

Néanmoins, l’ouvrage qui m’intéresse aujourd’hui était en 2023 ma dernière lecture sur le cinéma (avant quelques romans, deux ouvrages scientifiques et trois bandes-dessinées), et j’avais la certitude d’avoir envie de lui consacrer un compte-rendu.

Suspension consentie de l’incrédulité

Autant le dire tout de suite, ce livre fait partie de mes coups de coeur de lecture de 2023.

Pas seulement parce qu’il parle de cinéma, mais aussi parce qu’il fait partie de ces textes à qui je laisse une place de choix dans ma bibliothèque, pour la simple et bonne raison qu’ils vont magistralement tisser un univers fictif autour du cinéma, et qui vont faire que, malgré une analyse très fine de la réalité, je vais en tant que lectrice marcher constamment sur le fil entre rêve et réalité.

En d’autres termes : ce sont les ouvrages qui me procurent cette « suspension consentie de l’incrédulité ».

Je recherche sans arrêt cette expression, je sais ce qu’elle évoque, j’ai souvenir dans une discussion avec des amis l’avoir eue sur le bout de la langue et très agacée de ne pas la retrouver, l’avoir recherchée sur Chat GPT.

Vous remarquerez que la formulation de ma question laissait quelque peu à désirer et que j’ai tout de même obtenu satisfaction… je n’en suis tout de même pas à faire rédiger l’intégralité de mes articles par une IA, et lorsque j’ai commencé à rédiger celui-ci, au lieu de retourner directement sur Chat GPT, j’ai cherché directement « suspension d’incrédulité » et suis allée consulter Wikipédia.

L’expression suspension consentie de l’incrédulité (de l’anglaiswilling suspension of disbelief) décrit l’opération mentale effectuée par le lecteur ou le spectateur d’une œuvre de fiction qui accepte, le temps de la consultation de l’œuvre, de mettre de côté son scepticisme.

Et cette définition était plus en accord avec l’ouvrage dont je vais parler dans un instant. En effet, mon interpellation de Chat GPT intervenait juste après la projection du dernier volet d’Indiana Jones, durant laquelle justement je peinais à ressentir cette suspension consentie de l’incrédulité.

En revanche, pendant ma lecture, j’étais comme un funambule sur le fil tendu par l’auteur qui, selon moi, s’amusait constamment à tester cette suspension : rêve ou réel ? Et cette tension, c’est elle que je perçois dans les meilleurs romans (du moins mes préférés) sur le cinéma.

Vertige littéraire dans l’usine à rêves

Dans mon panthéon des romans sur le cinéma, il y a entre autres :

  • Londres après minuit, d’Augusto Cruz qui est une pépite sur le cinéma muet,
  • Un renoncement de René de Ceccatty sur la figure de Greta Garbo,
  • Numéro Deux de David Foenkinos consacré au garçon qui n’a pas été retenu pour jouer Harry Potter,
  • et Le Figurant, qui nous entraine dans l’univers cinématographique de Truffaut, en particulier le tournage de Baisers volés.

Pour chacun de ces livres, je me suis demandée si ce que je lisais appartenait au domaine du rêve ou de la réalité, et l’ouvrage étant consacré au cinéma, la mise en abyme était double : une histoire de rêve dans une histoire rêvée.

Voilà donc ce que je guette quand j’ouvre un roman consacré au cinéma : ce vertige où j’en viens à douter et à hésiter entre fantasme, coulisses, reconstitution savante ou architecture minutieuse, et où finalement l’écrivain s’amuse avec moi comme si nous étions dans une scène d’Inception.

Le titre, avant et après la virgule

Je me souviens d’avoir vu ce livre et sa couverture jaune sur les présentoirs de la librairie Albin Michel du boulevard Saint-Germain à Paris.

Je me souviens (et je plagie à dessein Georges Perec, pour le citer plus loin) d’avoir pris le livre et d’avoir considéré pendant un moment la photo de Jean-Paul Belmondo et de Jean Seberg dans À bout de souffle qui figurait sur la première de couverture.

Je me souviens avoir été persuadée que le titre me donnerait une idée fidèle de l’ouvrage, et mon idée originelle était une reconstitution, elle aussi fidèle, exacte et exhaustive d’une époque.

Et ce n’est que quelques mois après, au fil de ma lecture, que j’ai pris toute la mesure de ce que supposait le titre, avant et après sa virgule : Nouvelle Vague, roman.

334. Je me souviens de la Nouvelle Vague

Nouvelle Vague, roman est donc le vertige sublime écrit par Patrick Roegiers et publié aux éditions Grasset en mai 2023.

Et autant j’étais persuadée qu’un des « Je me souviens » de Georges Perec était « Je me souviens du Parc Montsouris » – mais ma mémoire doit me trahir et c’est plutôt Prévert qui se souviens du Parc Montsouris…

– autant j’étais aussi convaincue en ouvrant le livre que j’irai avec lui d’un point A à un point B, des prémices de la Nouvelle Vague dans les bureaux des Cahiers du cinéma à ses influences les plus récentes.

J’ai donc suivi l’auteur dans ses pérégrinations, persuadée qu’il était un historien et un archéologue, et en cela mes petites brèches dans la connaissance du cinéma de la Nouvelle Vague lui étaient des aides précieuses.

Il y avait bien sûr des allers-retours, des percées poétiques de cette promenade, des détours entre hier et aujourd’hui (où aujourd’hui n’était pas tout à fait aujourd’hui) mais je suivais toujours mon guide.

Il m’a séduite à la page 122 avec son évocation du Parc Montsouris, forcément le plus beau de Paris, parce que c’est celui où j’allais petite et où déjà mes grands-parents emmenaient se promener mon père et son frère, et dont je guette chaque réappropriation du poème de Prévert* …

Il m’a définitivement conquise avec ses chapitres sur Truffaut, en particulier encore, toujours et encore, encore et toujours, l’évocation de cette scène sublime de Baisers volés, Delphine Seyrig, Jean-Pierre Léaud, Fabienne Tabard, Antoine Doinel et ce « Oui, monsieur ».

* Des milliers et des milliers d’années
Ne sauraient suffire
Pour dire la petite seconde d’éternité
Où tu m’as embrassé
Où je t’ai embrassée
Un matin dans la lumière de l’hiver
Au parc Montsouris à Paris
À Paris
Sur la terre
La terre qui est un astre.

Nouvelle Vague : rêve ou réalité ?

Et du coup si j’ai suivi l’auteur pendant les premiers chapitres en voyant dans son texte la reconstitution millimétrée d’une époque, j’ai très vite accepté de lâcher prise et d’être la spectatrice amusée de ses facéties littéraires et de ses manies.

Des listes, des énumérations, des dialogues, des sauts temporels, des rencontres (fictives ou avérées, au bout d’un moment on ne cherche plus à savoir) et puis à intervalles réguliers, comme un running gag, cette réécriture d’une scène du film On connait la chanson, avec Jean-Pierre Bacri et André Dussolier qui visite un appartement… jamais le même, mais toujours celui d’un film, d’un acteur ou d’un réalisateur de la Nouvelle Vague.

Et à lire ce dialogue savoureux entre Bacri et Dussolier, on entend presque leurs voix si singulières, et on s’imagine nous aussi les croiser pour visiter l’appartement d’à côté.

D’ailleurs, même si ce sont eux dont on se souvient le mieux, parce qu’ils viennent souvent au détour d’une page visiter un appartement, on croise les autres personnages du film, Camille, Odile, Claude… et évidemment on en croise bien d’autres, d’autres films, et d’autres réalisateurs.

Alors démêler dans cette fresque délirante ce qui appartient au rêve ou à la réalité devient véritablement secondaire, et on se laisse emporter par ce vertige, ou plutôt par cette vague, qui si elle nous est familière, parce qu’on en reconnaît certaines scènes vues et revues, parvient à nous sembler de nouveau nouvelle, grâce à la virtuosité et à l’ingéniosité de son auteur.


Grâce à ce roman j’ai eu envie de voir ou de revoir bon nombre de films qui y sont mentionnés :

  • évidemment Baisers volés pour cette scène troublante que je ne finis pas de savourer entre Delphine Seyrig et Jean-Pierre Léaud,
  • évidemment On connaît la chanson pour la thèse sur les paysans de l’an mil au lac de Paladru mais aussi pour sa bande-annonce où l’on voit Jean-Pierre Bacri réciter « Siffler sur la collline » Zaï zaï zaï zaï
  • et c’est le film Garçon ! de Claude Sautet que j’ai découvert à cette occasion, parce qu’il faisait partie des films de Claude Sautet que je n’avais jamais vus, moi qui pourtant revois régulièrement ceux avec Romy Schneider et le diptyque Un coeur en hiver / Nelly et Mr Arnaud.

Je vous laisse donc sur ces quelques images en suggestions et vous donne rendez-vous très bientôt pour un nouvel article sur Cinéphiledoc !

Truffaut en poésie

Voici, comme à l’accoutumée, au moins l’un des deux articles consacrés chaque année à François Truffaut sur ce site.

J’ai beau parfois m’efforcer de choisir d’autres ouvrages, d’autres sujets cinématographiques, je n’y peux rien, Truffaut revient.

Questions préliminaires

Et à chaque fois avec cette surprise éventuelle : l’article sera-t-il court ou long ?

Reviendra-t-il comme à chaque fois sur l’origine de cette singulière obsession que j’ai du cinéma de Truffaut et de ce réalisateur ?

S’attardera-t-il comme tous les ans, comme dans tous les articles ou presque, sur cette bibliothèque en expansion où l’étagère Truffaut semble s’échapper toute seule à force de se développer, comme par une volonté qui lui est propre ?

Fera-t-il à nouveau la liste de tous ces livres au sujet commun et dressera-t-il à nouveau le palmarès qui distingue le nécessaire si nécessaire du superflu qui ne l’est pas tant que ça ?

À chacune de ces questions, pour une fois, je répondrai non, et je préférerai faire tourner l’article, comme un argile encore malléable entre mes mains, d’une autre manière…

Une rencontre

C’est l’histoire d’un petit livre à couverture jaune.

Mais reprenons d’abord les choses à leur commencement. Comment ça, quel commencement ? Comme d’habitude, c’est aussi l’histoire d’une rencontre.

On me l’a répété il y a quelques temps, toute la beauté d’une rencontre tient à la surprise, à tout ce qui ressort de l’improvisation et de la spontanéité. On ne rencontre pas quelqu’un / quelque chose en cochant des cases. On ne rencontre pas quelqu’un en s’y préparant… tiens, cela me rappelle quelque chose !

Cela me rappelle mes pages préférées de Proust que j’ai encore relu il y a peu de temps :

… des photographies manquées… pas si éloignées de la passante de Baudelaire…

Cela me rappelle la façon dont Fanny Ardant parle de sa rencontre avec François Truffaut dans une interview qui ne ressemble en rien aux interviews que donnent les comédiens et les metteurs en scène actuellement :

On ne rencontre jamais quelqu’un qu’on a aimé impunément. Aimer quelqu’un, ce n’est pas forcément le voir ou le toucher, c’est d’avoir changé quelque chose de soi, pas parce qu’on a abandonné, mais parce qu’on a été impressionnée au sens fort du terme – imprégnée – par des façons de penser, par des façons d’agir, par des façons de raisonner, qui fait qu’on ne sera plus jamais la même. Alors la véritable impression, c’est ce qui fait que comme sur un tableau, la couleur ne peut plus changer.

Et voilà, j’ai encore digressé… et pour retrouver cette citation exacte, j’ai dû aller me promener dans les bonus du DVD de La Femme d’à côté, ce qui m’a donné aussi envie de revoir tout le film, et surtout Mme Jouve, cela m’a donné envie de reprendre la lettre à La Femme d’à côté que j’avais publiée sur Cinephiledoc (rubrique Écriture), mais je m’égare encore, décidément !

J’en étais à cette histoire de livre à la couverture jaune.

Au détour d’Instagram

Depuis quelques mois, j’utilise un peu plus mon compte Instagram, principalement à des fins personnelles.

Les publications que j’y poste en tant que profdoc sont rarissimes – généralement pour des activités qui me tiennent vraiment à coeur, pour suivre les élèves de la MDL ou de l’atelier Journal ou pour interpeler de manière totalement infructueuse le compte Instagram de la ville de Sainte-Geneviève-des-Bois, qui ne répond jamais….

Sur mon compte Instagram on trouve principalement trois types de publications :

  • mes lectures en cours, qu’elles soient cinéphiles ou non (un peu)
  • mes escapades (beaucoup)
  • mes sorties restau ou des réalisations culinaires dont je suis particulièrement fière (trop)

J’y glane à mon tour quelques idées de lecture, et si je suis quelques collègues ou copains copines profs docs ainsi que leurs activités professionnelles, l’intitulé de ce compte et les publications qui lui sont associées m’autorisent plus de liberté, et de pouvoir tout autant suivre les nouvelles publications aussi bien de ma prof de yoga, de mon restaurant préféré, de Véronique Gallo que de Lady Gaga.

Voyez comme avec souplesse je fais rimer dans cette phrase yoga et gaga.

Et comment je n’ai toujours pas parlé du petit livre à couverture jaune.

Le petit livre à la couverture jaune

Il y a environ un an sur Instagram, justement, j’avais posté la photo d’un livre sur François Truffaut, un livre dont j’ai tiré l’un de mes articles de 2022, et qui lui aussi avait une couverture jaune.

Ce livre, c’était celui-ci, François Truffaut : La leçon de cinéma, publié chez Denoël :

Sous mon post Instagram, j’ai pu voir le « J’aime » d’une personne qui à l’origine n’était pas abonnée à mon compte, peut-être avais-je pour une fois ajouté à ma publication un hashtag pertinent ou insolite qui lui avait fait trouver mon post…

Et pour une fois, il ne s’agissait pas du genre de compte qui a le don de m’exaspérer quand il ne suscite pas chez moi le dégoût ou l’effroi, à savoir les comptes de « vieux gars creepy » qui aiment dix de vos publications en moins de trente secondes et tentent d’engager la conversation avec des « Coucou ça va ? » débordant d’originalité.

Non cette fois, il s’agissait d’un compte tout à fait bienveillant et aux apparences des plus rassurantes, avec a priori pour seule idée fixe celle de faire imprimer sur ma rétine une couverture jaune.

C’est ainsi que j’ai rencontré le petit livre à la couverture jaune.

Sur son compte, Anne Terral le met en scène comme un véritable personnage, et cela m’a rappelé de manière très prosaïque (j’espère qu’elle excusera la comparaison si cette dernière lui déplaît) le nain de jardin dans Amélie Poulain qui devient l’acteur des Polaroïds envoyés des quatre coins de la planète au père d’Amélie pour l’inciter à partir en voyage.

Invitation au voyage, invitation à la lecture, il n’y a pas loin (c’est même rigoureusement la même chose selon moi).

Pari gagné, donc, en voyant se multiplier sous mes yeux les photos de François Truffaut en 24 images/seconde, ces deux bandes jaunes encadrant une photo de tournage de L’Argent de poche, j’ai voulu absolument l’avoir entre les mains pour le découvrir.

Truffaut en poésie

Des livres sur Truffaut, j’en ai des palanquées… de manière plus réaliste et moins imagées, j’en ai environ deux étagères pleines.

Parmi ces livres, il y a désormais deux ovnis qui se distinguent par le genre et par l’écriture :

  • Le François Truffaut en BD de Noël Simsolo et Marek qui ne m’a absolument pas laissé un souvenir impérissable (bien au contraire) et qui ne survit dans ma bibliothèque que par son sujet et son genre ;
  • Le François Truffaut en 24 images/seconde d’Anne Terral parce qu’il se dégage de ce livre une poésie extrêmement douce et tout autant de simplicité…

Son texte fait partie de ceux, rarissimes dans mes étagères (parce que je ne les cherche pas ou parce que je ne les ai pas encore trouvés) qui associent cinéma et poésie.

Poésie en prose me direz-vous, mais poésie tout de même. Les 24 scènes proposées par Anne Terral sont belles, délicates tout autant qu’efficaces, à la lisière instantanée de l’évocation et du témoignage.

Je les ai découvertes page après page, en essayant de réfréner une certaine gloutonnerie qui m’aurait fait dévorer ce petit livre d’à peine quatre-vingt pages sans lui accorder le temps et l’attention qu’il méritait.

Il est difficile de le résumer, ce petit livre, sinon en disant qu’il porte très bien son titre, une succession (je me répète) d’instantanés, que le lecteur spécialiste de Truffaut reconnaitra aisément. Il est impossible d’en extirper une citation ici ou là sans avoir l’impression d’en amputer le texte.

Qu’il me suffise de dire que l’auteure alterne les scènes biographiques du réalisateur, les scènes tirées de ses films ou de ses tournages, et ses propres souvenirs de spectatrice.

J’ai refermé le livre en me disant que, si j’avais été capable d’écrire un livre entier (et pas seulement de me complaire dans la forme courte de l’article) sur François Truffaut, c’est le livre d’Anne Terral que j’aurais voulu écrire.

Et même si cet article est un peu court, comme le texte d’Anne Terral, je le trouve suffisant, sans qu’il y ait besoin d’ajouter autre chose.

Ah si, peut-être juste une chose :

François Truffaut en 24 images/seconde, Anne Terral chez Mediapop Editions, publié le 21 octobre (évidemment) 2022.

Un petit bijou à garder précieusement mais aussi et surtout à partager.

Ce bijou partagé, je vous dis à très bientôt pour un nouvel article sur Cinephiledoc !

Le temps suspendu d’une leçon de cinéma

Pour ce dernier compte-rendu avant la pause estivale, j’ai hésité entre deux ouvrages publiés à quelques mois d’intervalles et étant portés tous deux par la même direction et la même voix.

Il s’agit de La Leçon de cinéma, publiée chez Denoël en octobre 2021 et de  Correspondance avec des écrivains : 1948-1984, publiée en mars 2022 chez Gallimard.

Les deux ouvrages sont dirigés par Bernard Bastide, et les deux font entendre la voix de François Truffaut.

Vous savez déjà rien qu’en lisant le titre sur lequel des deux mon choix s’est arrêté, mais je vais profiter de ces premières lignes pour évoquer rapidement cette correspondance.

2004-2022 : histoire d’une bibliothèque

J’ai déjà eu l’occasion d’y revenir régulièrement (j’ai même l’impression d’en parler et d’en reparler continuellement, comme si je cherchais à chaque fois à en redessiner les contours) : les étagères de ma bibliothèque s’enrichissent souvent d’ouvrages sur François Truffaut.

Si j’arrive généralement à me raisonner pour d’autres sujets (« non ce livre est magnifique mais il est trop imposant, non tu as déjà tel ouvrage sur la question »), si ma liseuse m’aide à contrôler l’achat de fictions, et si les nouveaux venus sont la plupart du temps des cadeaux de proches, je cède presqu’immanquablement à la tentation lorsqu’il s’agit de livres consacrés à mon cinéaste de prédilection.

Cette collectionnite a été amorcée en 2004, j’avais à peine découvert Truffaut – la découverte devait remonter à un ou deux ans tout au plus – et plusieurs livres avaient été publiés à l’occasion des vingt ans de sa disparition : le Dictionnaire Truffaut d’Arnaud Guigue et Antoine de Baecque, François Truffaut au travail, de Carole Le Berre, ou encore Truffaut par Truffaut, de Dominique Rabourdin.

Contrairement aux autres étagères de ma bibliothèque, je ne me suis cependant pas contentée des nouvelles publications, puisqu’assez rapidement, l’ouvrage sur lequel j’avais voulu absolument mettre la main était la Correspondance de Truffaut, qui était alors épuisée, puisque parue en 1988.

Je l’ai finalement trouvée après l’avoir commandée sur un site de livres d’occasion, un exemplaire toujours recouvert aujourd’hui d’une sorte de papier crépon destiné à le protéger, et que je n’ai jamais osé retirer…

Lorsque je suis arrivée dans le lycée où je suis actuellement en poste, j’ai eu la surprise de retrouver cette correspondance dans le rayon Cinéma, et si je parviens à retirer du fonds la plupart des ouvrages que les élèves ne consultent pas, je ne m’y résous pas pour celui-ci. Si je saute le pas à l’avenir, ce sera certainement pour récupérer un deuxième exemplaire de cette correspondance.

Au fil des années, les livres de / sur Truffaut sont venus garnir ma bibliothèque, jusqu’à cette Correspondance avec des écrivains : 1948-1984 parue il y a trois mois.

Du monologue au dialogue

La spécificité de la correspondance publiée en 1988, c’est qu’elle ne contient que les lettres de Truffaut, environ 500 – ce qui est déjà quelque chose.

Comme le rappelle Bernard Bastide dans la préface de la Correspondance avec des écrivains : 1948-1984 publiée en mars 2022, et ce dès les premières lignes, « Cent vint-deux boîtes d’archives, plus de vingt mètres linéaires, plusieurs milliers de lettres envoyées ou reçues », Truffaut était un épistolier frénétique.

Cette fois-ci, sur près de 500 pages, et malgré les aléas d’expéditeurs ou de destinataires manquants, les différentes voix se font entendre : ce sont celle de Truffaut, évidemment, auxquelles répondent celles de Cocteau, de Jean Genet, de Jacques Audiberti.

Le lecteur cinéphile suit ces échanges au fil de la filmographie de Truffaut : il sait que la correspondance avec Henri-Pierre Roché le mène à Jules et Jim, que celle avec Ray Bradbury conduira à l’adaptation de Fahrenheit 451, et que les lettres échangées avec Jean Hugo mèneront à L’Histoire d’Adèle H.

Petite parenthèse à propos d’Adèle Hugo – et de son père si encombrant – la mention « Ouvrage publié avec le soutien de la Fondation d’entreprise La Poste » m’a fait sourire, et, par le cheminement des associations d’idées, m’a rappelé ce petit coffret publié en 2001 :

J’ai pensé aussi à toutes ces lettres échangées et envoyées dans les films de Truffaut, en particulier les pneumatiques de Baisers volés, et cette lettre de la mère de Bertrand Morane dans L’Homme qui aimait les femmes :

Mon amour… Je ne comprends rien à tes silences… je n’ai reçu aucune lettre de toi depuis deux semaines et je me demande si mes lettres te parviennent… Décidément les mystères de la poste sont insondables…

La petite particularité de la correspondance entre Juliette Drouet et Victor Hugo était que le coffret contenant deux livres séparait distinctement les deux épistoliers, ce que j’ai toujours regretté.

Encore une fois, dans cette Correspondance avec des écrivains, les échanges qui ont pu être retrouvés ne sont séparés parfois que par une autre lettre qui s’intercale dans la chronologie des envois et du courrier reçu.

Discussions sur le cinéma

La dernière lettre figurant dans cette correspondance est datée de janvier 1984, et elle laisse le cinéphile sur une note songeuse teintée d’émotion.

Cette émotion, il la trouve inchangée dans sa lecture de La Leçon de cinéma, publiée en octobre 2021 chez Denoël, toujours sous la direction de Bernard Bastide.

Faisons un petit détour justement par la quatrième de couverture et par la préface de Bernard Bastide.

Pour la première :

En 1981, François Truffaut, l’ancien fougueux critique de cinéma, fait l’autocritique de ses propres films.
En s’appuyant sur des scènes et des anecdotes de tournage, Truffaut revisite, avec émotion et franchise, sa carrière, des Mistons (1959) à La Femme d’à côté (1981).

Lorsque l’on se plonge dans la préface de Bernard Bastide, on comprend la genèse de cette leçon de cinéma : une première proposition de Jean Collet, en 1977, de publier un livre d’entretiens sur le modèle de l’auguste parent publié pour la première fois en 1966, Hitchcock / Truffaut, et complété en 1980. Proposition déclinée.

Puis une deuxième proposition en 1980 : une série d’émissions télévisées, La Leçon de cinéma. L’émission réalisée avec François Truffaut en 1981 sera la seule à être diffusée, et ce seulement en mai 1983, soit seulement un an avant le décès de Truffaut.

Comme l’indique Bernard Bastide, cette émission n’a jamais été rediffusée ni même éditée sur support vidéo. Elle a cependant été métamorphosée une première fois en livre, dans une édition allemande, sous le titre Monsieur Truffaut, wie haben Sie das gemach ?, ce qui reprend le titre allemand du Hitchcock / Truffaut, Mr Hitchcock, wie haben Sie das gemach ?, à laquelle s’ajoute une édition de poche parue en 1993.

Quarante ans après le tournage de cette émission, le cinéphile a donc entre les mains la transcription d’une émission télévisée qu’il (re)verra peut-être un jour ?

À défaut de cette émission introuvable, s’il veut écouter et voir François Truffaut parler de cinéma, il lui faudra farfouiller sur les plateformes de vidéos en ligne, pour glaner des « rencontres » en 1972 dans les archives de Radio Canada, un entretien du réalisateur avec Christian Defaye dans les archives de la Radio Télévision Suisse (1975), ou encore la fameuse émission Apostrophes diffusée en avril 1984 :

Temps suspendu

Écouter ces émissions, c’est avoir en tête la voix de Truffaut, que l’on retrouve donc dans ce magnifique ouvrage qu’est La Leçon de cinéma.

Si l’on a continuellement en tête la comparaison avec le Hitchbook, ce n’est pas seulement par la forme du texte, sous forme d’entretiens – quoique les questions sont généralement plus concise que celles que posait parfois Truffaut à Hitchcock – c’est aussi par l’aspect chronologique.

Sans l’entendre, on sent cette voix, tantôt peut-être hésitante, tantôt précipitée.

Pour chacun des films, les auteurs de l’entretien (Jean Collet, Jérôme Prieur et José Maria Berzosa, qui réalise l’émission) ont choisi une ou deux scènes qu’ils font visionner à Truffaut… s’ensuivent questions et réactions fidèlement rapportées.

J’ai aimé cet extrait, suite au visionnage d’une scène de Tirez sur le pianiste ! 

Tout au long d’un tournage, les acteurs souffrent parce que toutes les scènes, les unes après les autres, vont leur offrir des difficultés auxquelles ils ne s’attendaient pas. Un acteur a répété sa scène, il la sent bien, il a les jambes écartées, bien plantées dans le sol et il est sûr de lui. Tout d’un coup, le metteur en scène va le faire jouer coincé derrière un bar, tout tassé, avec des types qui passent devant lui. Il y a toujours un élément qui fait que rien ne se passe comme prévu. C’est une souffrance que l’acteur doit sans cesse s’efforcer de surmonter.

Chaque scène suscite son lot de souvenirs et d’associations d’idées : pour Fahrenheit 451, on se remémore la scène de la vieille dame qui se sacrifie pour ses livres ; pour Baisers volés, cet échange de regards fabuleux entre Antoine Doinel et Fabienne Tabard…

« Vous aimez la musique, Antoine ? – Oui, monsieur. »

… une scène que j’ai toujours trouvée aussi irréaliste que touchante, avec ce lapsus que ne peuvent comprendre que les grands timides troublés par une apparition – ici incarnée par Delphine Seyrig.

Pour les quelques pages consacrées à La Nuit américaine, on retrouve Truffaut en voix off, dans une curieuse mise en abîme :

Un tournage de film, ça ressemble exactement au trajet d’une diligence au Far-West (…) Qu’est-ce qu’un metteur en scène ? Un metteur en scène, c’est quelqu’un à qui on pose sans arrêt des questions. Des questions à propos de tout. Quelquefois, il a les réponses, mais pas toujours.

Lorsque l’émission est enregistrée, François Truffaut vient de finir le tournage de La Femme d’à côté, qui constitue donc l’avant-dernier chapitre de l’ouvrage.

Le film y est abordé brièvement, puis suivent quelques questions plus générales sur le métier de cinéaste : quand avez-vous décidé de faire des films, comment travaillez-vous, l’écriture du scénario, le tournage en studio, les films en couleurs et les films en noir et blanc, la relation au public…

Évidemment, le cinéphile sait qu’il reste un film à tourner, Vivement dimanche !, et le temps se suspend à cette dernière phrase de l’entretien :

J’ai, en revanche, l’impression d’être aujourd’hui plus audacieux, de dévoiler des choses qu’il y a encore dix ans je n’aurais pas osé montrer…

Et pour « achever la figure » (expression que le fidèle associe immédiatement à La Chambre verte), le lecteur retournera immédiatement à l’essentiel, et se replongera, à nouveau, inlassablement, dans le cinéma de François Truffaut.

Hors-série 2 : conseils de lecture estivaux

Pour ce deuxième hors-série de l’été, je poursuis mes conseils de lecture avec une petite sélection des livres que j’ai lus durant l’année scolaire 2020-2021 et qui m’ont particulièrement marquée.

Cet article est un peu à la manière de la présentation que je propose à mes collègues, mes « Conseils de lectures de la #profdoc », mais je donnerai ici à ces conseils un tour un peu plus personnel et plus sélectif.

Le mois dernier, j’avais abordé des lectures suggérées par Bénédicte, comparse de #LudoDOC, trois ouvrages plutôt facétieux avec des univers d’auteurs bien particuliers (Jean-Paul Didierlaurent, Benoit Philippon et Romain Puértolas) et deux ouvrages prêtés par des copains copines du lycée.

Pour cet article, je vais à nouveau aborder les choses en trois parties : d’autres suggestions de lecture par les copains copines du lycée, trois ouvrages qui m’ont été conseillés par la même personne qui est depuis longtemps ma principale source en matière de lecture, et mon univers d’auteur / auteur coup de coeur de l’année.

Les conseils de lectures des paddocks du lycée (2)

Cette année, j’ai eu le bonheur de voir qu’un petit réseau de profs lecteurs s’organisait au lycée et commençait à s’échanger quelques ouvrages… nous avions d’ailleurs évoqué l’idée d’organiser des cafés littéraires, qui se sont déroulés deux fois à distance.

C’était aussi la première année qu’en plus d’emprunter régulièrement des livres au CDI, certains (ou pour être plus exactes certaines) m’en ramenaient pour me les prêter : j’ai donc pu découvrir quelques pépites, que vous avez pu découvrir en partie dans mon premier hors-série, et dont voici la suite !

  • Sophie : ça passe ou ça casse

Sophie est une collègue d’espagnol, lectrice assidue. Elle aime principalement les polars mais elle n’est pas hostile à l’idée de découvrir d’autres pistes de lectures. Régulièrement, elle vient au CDI « Alors, t’as quoi de neuf ? ».

Parfois, je me dis « Ça, je suis sûre que ça va lui plaire ». Pendant trois ans, je me suis magnifiquement gourée. Immanquablement, Sophie rapportait les livres « j’ai pas réussi, je ne suis pas rentrée dedans, ça m’a pas parlé, ça m’est tombé des mains… » mais je ne me décourageais pas.

Un jour, je lui ai suggéré d’emprunter Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon de Jean-Paul Dubois. Le déclic. Puis, il y a eu La Police des fleurs, des arbres et des forêts, de Romain Puértolas, qu’elle a triomphalement ramené en salle des profs en le conseillant à tout le monde. Mission accomplie !

Quelques semaines plus tard, Sophie est venue au CDI pour me prêter Par un matin d’automne de Robert Goddard, une quête familiale à l’anglaise que je n’ai pas pu lâcher !

Fin des années 1990. Leonora Galloway entreprend un voyage en France avec sa fille Penelope. Toutes deux ont décidé de se rendre à Thiepval, près d’Amiens, au mémorial franco-britannique des soldats décédés durant la bataille de la Somme. Le père de Leonora est tombé au combat durant la Première Guerre mondiale, mais la date de sa mort gravée sur les murs du mémorial, le 30 avril 1916, pose problème. Leonora est en effet née près d’un an plus tard.

  • L’idée fixe de Sandrine : tu as lu des Tracy Chevalier ?

Depuis que je suis au lycée, je discute pas mal lectures, films et séries télévisées avec Sandrine, professeure d’anglais. Fan comme moi de Downton Abbey (ça rapproche) et d’ambiances à l’anglaise, elle revenait assez régulièrement à la même question : « Tracy Chevalier, tu connais ? »

Non, je ne connaissais pas. Et j’avoue que j’avais un petit a priori négatif bien ridicule envers une romancière qui s’appelait Tracy. Je m’imaginais très bêtement des romans sentimentaux, ou ce que ma copine Catherine appelle affectueusement des « cucuteries » (et autant j’adore regarder des cucuteries, autant j’ai plus de mal à les lire… comme le Victoria de Daisy Goodwyn, qui ne m’avait pas du tout emballé).

Bref, à un moment Sandrine est parvenue à ses fins : j’ai cédé. Je ne sais plus pourquoi, j’ai commencé par Prodigieuses créatures, et ça a été une révélation !

Dans les années 1810, à Lyme Regis, sur la côte du Dorset battue par les vents, Mary Anning découvre ses premiers fossiles et se passionne pour ces « prodigieuses créatures » dont l’existence remet en question toutes les théories sur la création du monde. Très vite, la jeune fille issue d’un milieu modeste se heurte aux préjugés de la communauté scientifique, exclusivement composée d’hommes, qui la cantonne dans un rôle de figuration.
Mary Anning trouve heureusement en Elizabeth Philpot une alliée inattendue. Cette vieille fille intelligente et acerbe, fascinée par les fossiles, l’accompagne dans ses explorations. Si leur amitié se double peu à peu d’une rivalité, elle reste, face à l’hostilité générale, leur meilleure arme.

Depuis, j’ai lu La Jeune fille à la perle, La Vierge en bleu et La Dame à la licorne, mais pour l’instant, Prodigieuses créatures reste mon préféré.

Il me reste quelques conseils de lecture de copains du lycée qui sont encore sur ma pile à lire :

  • Christophe m’a conseillé Zéro de Denis Guedj il y a quelques temps
  • Carla nous a parlé avec enthousiasme de Confiteor, de Raume Cabré en salle des profs pendant l’année
  • et Sandrine, après Tracy Chevalier, m’a recommandé La Cuisinière, de Mary Beth Keane

Où je cherche un titre qui fasse proverbe

Indépendamment de tous les conseils que je glane ici et ailleurs, des copains copines profs docs ou paddocks, sur Twitter ou en salle des profs, mais aussi – mon petit rituel irrégulier auquel je reviens de temps à autre – les recommandations d’Olivia de Lamberterie pour Télématin – ma source principale de lecture reste ma marraine, Mimi.

Je crois avoir déjà parlé de Mimi sur ce blog, déjà pour des conseils de lecture, et je suis convaincue qu’un proverbe adéquat pourrait s’appliquer à ses conseils, du type « Si c’est un conseil Mimi, tu le lis »… c’est ce que j’ai trouvé de mieux pour l’instant.

Je ne dis pas qu’à chaque lecture je tombe sur des révélations exceptionnelles (cela n’arrive que les 3/4 du temps), mais généralement ce sont de belles expériences, et des choses que je n’aurais pas forcément lues de manière spontanée. Voici donc trois conseils Mimi.

  • La Saga des Cazalet, tome 1 : Étés anglais. Un pur bonheur pour la fan d’Angleterre que je suis, et je me suis retenue de dévorer toute la saga d’une traite, justement pour en garder un peu sous le coude !

Juillet 1937. À Home Place, au cœur du Sussex, jardiniers, femmes de chambre et cuisinière sont sur le pont. La Duche orchestre le ballet des domestiques avant l’arrivée de ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Où dormira Clary, adolescente mal dans sa peau en plein conflit avec sa belle-mère ? Quelle robe portera Villy, ancienne ballerine désormais mère au foyer ? Polly, terrorisée à l’idée qu’une guerre éclate, s’entendra-t-elle avec sa cousine Louise qui rêve de devenir actrice ? Rachel, la seule fille de la Duche, trouvera-t-elle un moment pour ouvrir la précieuse lettre de son amie Sid ?

  • Debout payé, de Gauz : une claque magistrale ! Une écriture fabuleuse et une histoire vers laquelle, je dois le dire, je ne serais pas allée spontanément…

Debout-payé est le roman d’Ossiri, étudiant ivoirien devenu vigile après avoir atterri sans papiers à Paris en 1990. C’est un chant en l’honneur d’une famille, d’une mère et de la communauté africaine avec ses travers, ses souffrances et ses différences. C’est l’histoire politique d’un immigré et de son regard sur notre pays, à travers l’évolution du métier de vigile, de la Françafrique jusqu’à l’après 11-Septembre. C’est enfin le recueil des choses vues et entendues par l’auteur lorsqu’il travaillait au Camaïeu de Bastille et au Sephora des Champs-Élysées.

  • Tu seras un homme mon fils, de Pierre Assouline : un texte bouleversant qui évoque aussi l’écriture, et comme j’aime beaucoup les mises en abîme, forcément je n’ai pu qu’y être sensible !

À la veille de la Première Guerre mondiale, Louis Lambert, jeune professeur de Lettres dans un lycée parisien, rencontre par hasard dans le sud de la France son auteur favori : Rudyard Kipling, le romancier adulé du Livre de la Jungle. Kipling est alors le plus célèbre écrivain de l’empire britannique, prix Nobel de littérature, mais surtout l’auteur du fameux poème « If… », que les Français connaîtront bientôt sous le titre « Tu seras un homme, mon fils ». Louis Lambert, qui rêve depuis des années d’en donner lui-même la traduction idéale, tente d’obtenir l’autorisation de l’auteur qu’il admire. Une amitié inattendue va naître entre les deux hommes, vite assombrie par la disparition de John, le fils de Kipling, qui meurt au combat dans les tranchées.

Coup de cœur pour un auteur

Chaque année j’ai l’impression de découvrir un auteur dont je vais retenir le nom pour qu’il puisse m’accompagner pendant un certain temps, je le retrouverai à intervalles réguliers, surtout si une fois passé le premier ouvrage que j’aurai lu de lui je ne suis pas déçue par le deuxième…

Le signe décisif de cette découverte, c’est que soit après avoir emprunté les ouvrages, soit après les avoir lus sur liseuse, je décide quand même de les acheter pour les ajouter à ma bibliothèque.

L’an dernier, j’avais découvert comme ça la Trilogie de Wielstadt de Pierre Pevel, qui m’a donné envie d’explorer toutes les autres œuvres de cet auteur.

Cette année, c’est à nouveau à Mimi que je dois ma révélation, avec Deux hommes de bien d’Arturo Pérez Reverte, un bijou d’écriture et d’érudition, un roman total !

Coup de théâtre dans le Madrid de la fin du XVIIIe : l’Académie royale vote l’acquisition de l’Encyclopédie, malgré la censure. Immédiatement, la bibliothèque don Hermogenes Molina et l’Amiral don Pedro Zarate sont dépêchés à Paris pour y dénicher les précieux volumes. Mais ils ignorent qu’un espion est à leurs trousses, prêt à tout pour faire échouer leur mission…

L’auteur a transformé l’essai pour moi avec la découverte du Capitaine Alatriste. C’est décidé, il continuera à m’accompagner !

J’espère que ces conseils de lecture vous auront plu, je vous souhaite une belle fin d’été, et je vous dis à très bientôt sur Cinéphiledoc !

Hors-série 1 : conseils de lecture estivaux

Pour cet été, je vous propose sur Cinephiledoc deux hors-série en écho avec les articles qui seront proposés sur LudoDOC : en effet, nous avons décidé, avec mes comparses Béatrice, Bénédicte, Fabienne et Sophie, de publier sur LudoDOC nos projets de lectures de cet été (nos PAL).

Vous retrouverez donc ici les ouvrages que je compte lire durant l’été. Sur Cinephiledoc, j’ai décidé de vous proposer cet été une petite sélection des livres que j’ai lus durant l’année scolaire 2020-2021 et qui m’ont particulièrement marquée.

Cet article est un peu à la manière de la présentation que je propose à mes collègues, mes « Conseils de lectures de la #profdoc », mais je donnerai ici à ces conseils un tour un peu plus personnel et plus sélectif.

Ce petit tour d’horizon sera l’occasion de quelques clins d’œil amicaux, car la plupart de mes coups de cœur de cette année m’ont été recommandés par des profs docs et des paddocks que j’affectionne.

Les conseils estivaux de Bénédicte

Parmi les profs docs que je côtoie, il y a quelques profs docs de l’académie de Montpellier, bibliovores narbonnais et carcassonnais toujours à l’affut de belles expériences de lectures.

Je dois l’été dernier à Bénédicte certaines de mes plus belles découvertes, avec des textes souvent assez courts mais dont la qualité d’écriture m’a régulièrement laissée sans voix… Parmi ses nombreux conseils, j’en retiendrai deux :

  • l’évocation de Romain Gary par François Henri Désérable dans Un certain M. Piekielny :

« »Quand tu rencontreras de grands personnages, des hommes importants, promets-moi de leur dire : au n° 16 de la rue Grande-Pohulanka, à Wilno, habitait M. Piekielny… »
Quand il fit la promesse à ce M. Piekielny, son voisin, qui ressemblait à « une souris triste », Roman Kacew était enfant. Devenu adulte, résistant, diplomate, écrivain sous le nom de Romain Gary, il s’en est toujours acquitté : « Des estrades de l’ONU à l’Ambassade de Londres, du Palais Fédéral de Berne à l’Élysée, devant Charles de Gaulle et Vichinsky, devant les hauts dignitaires et les bâtisseurs pour mille ans, je n’ai jamais manqué de mentionner l’existence du petit homme », raconte-t-il dans La promesse de l’aube, son autobiographie romancée.
Un jour de mai, des hasards m’ont jeté devant le n° 16 de la rue Grande-Pohulanka. J’ai décidé, ce jour-là, de partir à la recherche d’un certain M. Piekielny.»

  • les textes fulgurants d’Alessandro Baricco, Novecento : pianiste et Soie, qui m’ont donné envie de tout découvrir de cet auteur :

Né lors d’une traversée, Novecento, à trente ans, n’a jamais mis le pied à terre. Naviguant sans répit sur l’Atlantique, il passe sa vie les mains posées sur les quatre-vingt-huit touches noires et blanches d’un piano, à composer une musique étrange et magnifique, qui n’appartient qu’à lui : la musique de l’Océan dont l’écho se répand dans tous les ports.

Des facéties d’auteurs pour s’évader

Je triche un peu dans ce second regroupement, car je dois à nouveau la lecture suivante à Bénédicte, mais il s’agit de trois ouvrages pleins d’originalité, de drôleries et d’inventions.

  • le livre qui rend hommage aux livres mis au pilon : Le Liseur du 6h27, de Jean-Paul Didierlaurent (ou comment ne pas aimer un livre dont le nom du héros est une contrepèterie…)

Employé discret, Guylain Vignolles travaille au pilon, au service d’une redoutable broyeuse de livres invendus, la Zerstor 500. Il mène une existence maussade mais chaque matin en allant travailler, il lit aux passagers du RER de 6h27 les feuillets sauvés la veille des dents de fer de la machine …

  • un hommage savoureux, irrésistible et attendri aux polars et aux films noirs avec Lino Ventura, Mamie Luger de Benoit Philippon, un conseil de lecture de Johann Jambu, collègue profdoc dans l’académie de Dijon : Johann, un grand merci pour la crise de fou-rire ininterrompue d’un bout à l’autre de cette pépite !

Six heures du matin, Berthe, cent deux ans, canarde l’escouade de flics qui a pris d’assaut sa chaumière auvergnate. Huit heures, l’inspecteur Ventura entame la garde à vue la plus ahurissante de sa carrière. La grand-mère au Luger passe aux aveux et le récit de sa vie est un feu d’artifice. Il y est question de meurtriers en cavale, de veuve noire et de nazi enterré dans sa cave. Alors aveux, confession ou règlement de comptes ? Ventura ne sait pas à quel jeu de dupes joue la vieille édentée, mais il sent qu’il va falloir creuser. Et pas qu’un peu.

  • et à propos de polar, voici l’ouvrage que j’ai réussi à faire le plus circuler parmi les paddocks lecteurs du lycée : une aventure facétieuse organisée par Romain Puértolas : La Police des fleurs, des arbres et des forêts 

Durant la canicule de 1961, un officier de policier est envoyé en mission dans un petit village reculé. Il doit enquêter sur la mort de Joël, 16 ans dont le corps a été retrouvé découpé en morceaux dans une usine à confiture…

Les conseils de lectures des paddocks du lycée (1)

Cette année, j’ai eu le bonheur de voir qu’un petit réseau de profs lecteurs s’organisait au lycée et commençait à s’échanger quelques ouvrages… nous avions d’ailleurs évoqué l’idée d’organiser des cafés littéraires, qui se sont déroulés deux fois à distance.

C’était aussi la première année qu’en plus d’emprunter régulièrement des livres au CDI, certains (ou pour être plus exactes certaines) m’en ramenaient pour me les prêter : j’ai donc pu découvrir quelques pépites, que je vous partage ici en partie dans ce premier hors-série, et dont vous découvrirez le reste le mois prochain !

  • les fresques historiques de Stéphanie : Dans la main du diable d’Anne-Marie Garat, La Part de l’aube et Le Soleil sous la soie (mon préféré) d’Éric Marchal 

Stéphanie est arrivée au lycée en 2019. Elle a fait partie avec Antonella (vous retrouverez Antonella plus bas) des personnes qui adoraient L’Amie prodigieuse d’Elena Ferrante, que je n’avais pas lu. Juste avant le confinement, je suis venue apporter à Stéphanie le tome IV de la saga jusque dans sa salle, et piquée par la curiosité, j’ai emprunté les trois premiers tomes.

C’était le début d’un échange de conseils de lecture, principalement via Whatsapp. Commencé avec Ferrante, nous avons poursuivi avec Bernard Minier, que je lui ai recommandé principalement avec l’argument suivant « Tu en connais beaucoup toi des flics latinistes ? » (Stéphanie a en charge l’enseignement du latin au lycée). Depuis, elle m’a dépassée dans la lecture des aventures de Servaz, dont elle me parle régulièrement.

En novembre 2020, Stéphanie est venue au CDI avec plusieurs conseils de lecture sous le coude, principalement des fresques historiques (mais pas que) : le Garat et les deux Marchal évoqués plus haut. Pour l’instant, c’est Le Soleil sous la soie qui emporte mes suffrages :

À l’aube du XVIIIe siècle, un des plus petits États d’Europe, le duché de Lorraine, se relève de l’occupation française, dans l’espoir de connaître une génération de paix. Nicolas Déruet est chirurgien ambulant. Emprisonné à la suite d’une opération durant laquelle le patient est décédé, il est obligé de s’exiler dans les armées de la coalition en guerre contre les Turcs. De retour à Nancy, il développera son art à l’hôpital Saint-Charles et n’aura de cesse de laver son honneur.

  • l’escapade dépaysante d’Antonella : Tout le bleu du ciel de Mélissa Da Costa 

Antonella est notre collègue d’italien au lycée. Elle lit les ouvrages de Ferrante et d’Erri de Luca (entre autres) évidemment en VO, mais il lui arrive aussi de venir les emprunter dans leur traduction française.

Elle aime les polars et le dépaysement, elle avait notamment beaucoup aimé Le Bourreau de Gaudi, d’Aro Sainz de la Maza, que j’avais lu sur les conseils d’une ancienne collègue de lettres. Elle aussi est convertie à Bernard Minier.

En janvier, Antonella est venue au CDI me déposer Tout le bleu du ciel de Mélissa Da Costa.

Petitesannonces.fr : Jeune homme de 26 ans, condamné à une espérance de vie de deux ans par un Alzheimer précoce, souhaite prendre le large pour un ultime voyage. Recherche compagnon(ne) pour partager avec moi ce dernier périple.
Émile a décidé de fuir l’hôpital, la compassion de sa famille et de ses amis. À son propre étonnement, il reçoit une réponse à cette annonce. Trois jours plus tard, devant le camping-car acheté secrètement, il retrouve Joanne, une jeune femme coiffée d’un grand chapeau noir qui a pour seul bagage un sac à dos, et qui ne donne aucune explication sur sa présence.

C’est sur cette aventure insolite, qui m’a conduit aux abords de l’environnement familier des copains du sud (profs docs de l’académie de Montpellier, la boucle est bouclée) que je vous laisse pour ce premier hors-série, en vous souhaitant à nouveau un bel été, au plaisir de vous retrouver pour de nouveaux conseils de lectures au mois d’août.

N’hésitez pas à partager vos conseils de lectures en commentaires et à très bientôt sur Cinephiledoc !

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