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Voix de femmes

Avec ce nouvel article cinéphile, j’aimerais renouer avec mon habitude d’évoquer des figures féminines au mois de mars sur ce site.

J’avais dérogé l’an dernier avec cette habitude, parce que je n’avais pas déniché d’ouvrages, plus ou moins récents, qui évoquent une femme de l’univers du cinéma (comédienne, réalisatrice, scénariste…), ou en soient l’oeuvre.

Et pourtant, il est certain que l’an dernier, comme au cours des mois précédents, ces ouvrages ont été publiés, mais encore faut-il que j’ai le déclic, le coup de coeur, et ce coup de coeur n’est pas forcément immédiat ou linéaire.

Ainsi les livres dont je  vais parler dans un instant, je n’ai pas décidé spontanément de les réunir, il m’a fallu, au-delà de leur lecture, imaginer des ponts entre eux, autre que celui cédant à la facilité d’être écrits par des femmes.

Il y a également un livre dont j’aurais adoré parlé dans cet article, mais il vient tout juste d’être publié, et au moment où j’écris ces lignes, je ne l’ai pas encore entre les mains… je le garde donc précieusement en tête et y reviendrai dans les mois à venir.

Réunir des voix

Depuis quelques mois, je ne prépare plus frénétiquement mes articles cinéphiles à l’avance comme j’ai pu le faire auparavant.

Je laisse le livre ou les livres venir à moi, je les lis quand l’envie m’en prend, je laisse le temps infuser la lecture tranquillement, et quand enfin le moment est venu, je rassemble les fils et me pose pour écrire cet article juste quelques jours – au mieux une à deux semaines – avant de le publier.

J’ai toujours ma pile de lectures cinéphiles, et j’ai toujours en tête l’idée d’écrire sur tel livre à tel mois de l’année, et l’un des livres dont je vais parler aujourd’hui ne fait pas exception.

Sur ma pile cinéphile, il y a actuellement encore quatre livres qui attendent patiemment d’être intercalés entre mes autres lectures, cinq si l’on ajoute la publication récente que j’évoquais plus haut.

Il y a quelques mois, j’ai délaissé pour un temps encore indéterminé les lectures scientifiques et je n’ai gardé que mes lectures plaisir et mes lectures cinéphiles.

Pour mes lectures plaisir, j’avais une liste qui sommeillait depuis deux ou trois ans et que j’entamais à peine chaque année, je me suis remise à l’entamer consciencieusement, et parmi ces textes, un certain nombre sont l’oeuvre de femmes, et j’ai eu envie d’en réunir quelques-unes.

Delphine de Vigan, roman et théâtre

Depuis trois ans, sur ma liste de lecture, revenait parmi les autres titres un ouvrage de Delphine de Vigan publié en 2021 : Les Enfants sont rois.

Il n’apparaissait pas forcément en bonne place, et j’ai perdu au fur à mesure l’habitude de rajouter des titres sur cette liste qui n’en finit pas.

Qu’importe, je la recopie scrupuleusement d’une année à l’autre, même si je sais très bien que je suivrai davantage ma fantaisie que la liste en question… comme lorsque l’on va faire ses courses en ayant une idée précise de recette, mais que l’on cède finalement à la tentation d’un autre menu.

Néanmoins, j’avais la ferme intention de découvrir ces textes qui m’attendaient depuis des mois, et Les Enfants sont rois en faisaient partie.

Bien m’en a pris, car cette lecture tardive de 2024, cette dystopie vertigineuse, a été l’un de mes coups de coeur de fin d’année, et je me suis félicitée d’avoir acheté le livre pour le CDI.

Mélanie Claux est une fan de télé-réalité de la première heure, ayant par le passé échoué à devenir célèbre à la télévision grâce à l’émission Seuls dans le noir. Désormais épouse de Bruno Diore – dont elle prend le nom – et mère de famille, elle met ses deux enfants Sammy et Kimmy en avant sur les réseaux sociaux, notamment sur YouTube via la chaîne Happy Récré, où ils sont suivis par des millions d’abonnés.

Un jour, alors que les enfants font une partie de cache-cache dans leur résidence, Kimmy, âgée de seulement six ans, disparaît. S’ensuit alors la rencontre entre Mélanie et la policière Clara Roussel qui mène l’enquête sur la disparition de l’enfant, disparition qui se révèlera être un enlèvement. À travers son enquête, Clara découvre les dessous d’un monde où l’exploitation, la surconsommation et l’exposition accrue et forcée des enfants font partie dominante de leur vie.

J’ai dévoré ce livre glaçant en quelques jours, et j’ai été portée tout du long par son écriture virtuose, sa manière de nous confronter à nos failles – du narcissisme au voyeurisme – et à notre usage compulsif des réseaux sociaux et de leurs dérives, jusqu’à l’écoeurement.

Je suis sortie de cette lecture comme on sort d’une projection de Fenêtre sur cour (ou plus récemment de Dans la maison, de François Ozon), du visionnage d’un épisode – lointain dans mon souvenir – de Black Mirror ou de Westworld, avec le même sentiment d’inconfort et de culpabilité.

Moi qui ai l’habitude de poster mes lectures, j’étais évidemment tiraillée entre l’envie de partager cette expérience et l’ironie de la situation à laquelle l’auteure m’avait confrontée.

C’est avec la voix de Delphine de Vigan que j’ai donc décidé de prolonger l’expérience, d’abord en regardant l’adaptation de son roman en série télévisée (disponible sur Disney +). Cependant, malgré la qualité de l’interprétation, j’ai été déçue, comme souvent, que cette adaptation ne rende pas suffisamment justice à la complexité du roman.

Ensuite, j’ai récupéré sur ma pile de lectures cinéphiles le dernier texte de l’auteure, Les Figurants, publié en 2024.

À nouveau, dans ce court texte, c’est une curieuse mise en abyme que nous propose Delphine de Vigan, et puisque l’on parle de voix dans cet article, il s’agit ici de donner une voix, non pas aux invisibles, puisqu’ils sont omniprésents au cinéma, mais à ceux dont on n’entendra jamais la voix dans un film.

Didier Blondel l’avait déjà fait au singulier dans l’un de mes livres préférés consacrés au cinéma : Le Figurant. Le tour de force de Delphine de Vigan est justement de leur redonner la parole, cette fois au théâtre et au pluriel, avec Les Figurants.

Au cinéma ou dans les séries, les figurants sont toujours flous, de dos ; ils ne font que passer. À la fois invisibles et indispensables, ils font partie de l’image, de sa fabrication, de son réalisme, mais doivent se fondre dans le décor. Avoir l’air vrai sans se faire remarquer. En transposant le plateau de cinéma sur une scène de théâtre, Delphine de Vigan leur offre le premier plan, le premier rôle, le devant de la scène. Cécile, Orso, Bruno, Joyce et Nora se rencontrent sur un tournage. Ils sont plus ou moins dirigés par un assistant totalement débordé. Peu à peu, les rôles s’inversent… Et si nous étions, tous, les figurants d’une vaste histoire qui nous dépasse ?

Je suis généralement assez réticente lorsqu’il faut lire du théâtre, mais j’ai justement apprécié que chacun de ces personnages, auxquels on s’attache d’une manière si éphémère, ait sa voix et sa personnalité propre, avec son parcours, ses anecdotes et son espoir que cette voix unique soit enfin entendue et remarquée.

Hélène Gestern et Valérie Perrin : voix, images et musique

Ma découverte de Delphine de Vigan est toute récente. Les auteures que je convoque à présent font partie de mon univers littéraire depuis un peu plus longtemps.

Elles ont toutes les deux en commun une écriture toujours inattendue, et un imaginaire qui mêle la musique, les photographies, les voix et le cinéma à la perfection, ce qui a pour conséquence qu’on ne lâche pas facilement leur livre une fois la lecture entamée.

555

Une amie m’avait fait découvrir Eux sur la photo, d’Hélène Gestern, en m’en faisant la lecture à voix haute pendant le confinement – cette lecture, et celle de Novecento : pianiste, d’Alessandro Baricco, sont gravées dans ma mémoire. Ma lectrice me donnait immédiatement envie d’avoir le livre entre les mains.

C’est donc tout naturellement que j’ai ajouté 555, publié en 2022, à ma liste de lecture.

C’est en défaisant la doublure d’un étui à violoncelle que Grégoire Coblence, l’associé d’un luthier, découvre une partition ancienne.
A-t-elle été écrite par Scarlatti, comme il semble le penser ? Mais, à peine déchiffrée, la partition disparaît, suscitant de folles convoitises. Cinq personnes, dont l’existence est intimement liée à l’œuvre du musicien, se lancent à la recherche du précieux document sans se douter que cette quête éperdue va bouleverser durablement leur vie.

De ce texte, j’ai aimé l’érudition musicale, qui m’a donné envie de découvrir Scarlatti, l’odeur de l’atelier de lutherie, des bois que l’on travaille et des vernis, les salles de concert et le son du clavecin, du piano, du violoncelle et du violon, les pièces, du chevalet à l’âme et le frottement de l’archet sur les cordes, les différentes voix des protagonistes, et la quête frénétique de cette partition.

Tata

C’est à une autre quête, tout aussi artistique, que nous convie Valérie Perrin dans Tata.

« Colette est remorte. Ce mot n’existe nulle part. Remourir, ça n’existe pas. »

Colette était une femme sans histoire. C’est du moins ce que l’on croyait jusqu’au jour où sa nièce apprend son décès par un appel de la police. Car Colette, sa tante unique, a déjà été enterrée il y a trois ans…

Cette histoire haletante m’a remémorée par association d’idées et dans le désordre des histoires tout aussi différentes que Thirteen reasons why ou Cinema Paradiso.

Tata est l’un de mes coups de coeur de lecture de 2025, et s’y retrouvent des personnages de musiciens, d’acteurs, de réalisateurs, d’écrivains et de journalistes, tout un univers foisonnant emporté par un souffle sur plusieurs décennies, et porté par les voix de plusieurs femmes, là encore, dont celle de Colette, enregistrée sur cassettes.

D’aucuns pourront penser que Valérie Perrin, comme Mélissa Da Costa, excelle dans le roman feel good (et à y réfléchir, pas si feel good que ça). On peut y voir une critique, j’y vois une qualité, et je ne regrette aucun des moments passés avec ces deux auteures, et leurs textes, qu’il s’agisse pour l’une de Changer l’eau des fleurs et de Trois, pour l’autre de Tout le bleu du ciel.

Une soif de mots et d’histoires

J’emprunte l’intitulé de cette dernière partie à un roman bijou qui a été ma première lecture de 2025, et que je place encore au-dessus de mes lectures précédentes.

De ma pile de lectures, là encore, j’ai extrait trois textes, qui y sommeillaient, et que j’ai découvert entre décembre et janvier.

  • La Commode aux tiroirs de couleurs, Olivia Ruiz

À nouveau, je suis tombée, avec ce texte, qui ne fait pas partie des publications les plus récentes, sur une magnifique histoire de femmes, entre Espagne et France. De cette lecture, je garde évidemment des couleurs chatoyantes, des odeurs, une lumière (et quelques ombres), des herbes et des épices, des voix et des musiques.

  • William, Stéphanie Hochet

Ce deuxième texte est à la fois le récit d’une quête et celui d’un dialogue. Au moment où Arte diffusait un fabuleux documentaire en trois parties sur Shakespeare, avec entre autre les participations de Judi Dench, Ian McKellen et Helen Mirren, j’étais plongée dans ce subtil portrait de William, à la recherche de ses années perdues.

L’auteure tisse une toile entre l’Angleterre de la fin du XVIe siècle et son parcours sur les traces de Shakespeare, mais aussi sur les siennes propres.

  • Une soif de livres et de liberté, Janet Skeslien Charles

J’en termine avec la plus belle façon que j’ai eue de commencer 2025, avec ce bijou qu’a été Une soif de livres et de liberté.

Odile Souchet, vingt ans à peine, s’épanouit dans son travail à la Bibliothèque américaine de Paris, où elle côtoie la fameuse directrice Dorothy Reeder. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, la jeune femme risque de tout perdre, y compris sa chère Bibliothèque. Alors que les nazis envahissent Paris, Odile et ses amis s’engagent dans la Résistance avec leurs propres armes: les livres.

Dès les premières lignes, l’histoire m’a embarquée… vous allez me dire qu’un personnage qui exprime ses émotions en les traduisant en cotes de la classification Dewey avait tout pour me plaire…

Mais à nouveau, les personnages, les allers-retours entre passé et présent, entre France et États-Unis, les voix de femmes, le chuchotement des lecteurs de bibliothèques, les livres que l’on s’échangent et dont on parle, ce chemin sinueux, familier et cinématographique, qui fait à la fois qu’on aimerait voir de tels livres adaptés à l’écran (ou peut-être pas, juste les garder pour soi avec ses propres images mentales)… ce livre avait également tout pour devenir l’un de mes préférés.

Et certes, je délaisse ici les lectures rigoureusement cinéphiles pour les lectures plaisir, mais cette frontière est définitivement poreuse, et les plus belles lectures ne sont-elles pas celles qui suscitent les plus belles images et les plus beaux souvenirs, notre cinéma personnel ?

Jeux et cinéma (épisode 2)

Pour commencer l’année d’une manière un peu légère (et ludique) – ce qui sera à nouveau le cas un peu plus tard dans l’année pour présenter un projet qui me tient particulièrement à coeur – je réfléchissais depuis quelques mois à un article consacré aux jeux de société et au cinéma.

Pour préparer cet article, je me suis plongée dans les archives de ce site et j’ai retrouvé un article datant de décembre 2013 intitulé très sobrement « Jeux et cinéma ». Simple et efficace, je décide du coup de faire tout simplement un deuxième épisode.

Dans ce précédent article j’évoquais les enseignes pour trouver les jeux de société consacrés au cinéma, je proposais quelques exemples de boites à questions ou de boites à énigmes et passais très rapidement à mes jeux préférés.

Je vais donc reprendre à peu près la même structure en partant cette fois-ci d’une forme de jeu que l’on pourrait nommer ainsi : le jeu de plateau ou jeu à itinéraires variables.

Jeux de cartes, Trivial Pursuit et jeu de l’oie

Si l’on reprend les jeux de société les plus traditionnels (et si je m’en réfère à l’histoire du jeu de société que j’aborde au moins une fois par an dans le stage que je co-anime en temps que professeur documentaliste sur « Jouer au CDI : du jeu de société à l’escape game », on peut se rappeler que les jeux de cartes et le jeu d’échecs sont parmi les plus anciens.

Pour ce qui concerne les adaptations les plus modernes, laissons de côté le jeu d’échecs (et ses déclinaisons avec les personnages de Star Wars, du Seigneur des anneaux ou encore de Harry Potter) et concentrons-nous sur les différents éléments que j’ai déjà mentionnés.

  • jeux de cartes version ciné

Pour les jeux de cartes, j’avais trouvé il y a deux ans à la cinémathèque française deux exemples très sympas : Chaplin et Hitchcock, et dont je donne ici à nouveau un aperçu :

Ce qui m’avait séduit dans ces deux jeux de cartes, c’est que contrairement à des éditions plus anciennes que j’avais pu avoir quand j’étais enfant (je me souviens notamment d’un jeu de cartes Lucky Luke), ce n’était pas seulement les têtes – Rois, reines, valets – et les As qui étaient illustrées, mais toutes les cartes qui proposent soit une scène, soit un personnage, soit une affiche.

  • Jeux de culture générale (et plus spécifiquement culture ciné)

Les deux catégories suivantes sont un peu plus poreuses. J’ai toujours eu un peu de mal avec deux types de jeux : le Trivial Pursuit et le Monopoly. Vous me direz qu’ils n’ont pas forcément beaucoup en commun.

Néanmoins, j’ai longtemps eu l’un et l’autre dans ma ludothèque personnelle, et j’ai pu jouer avec des versions thématiques : un Monopoly Star Wars et un Trivial Pursuit Histoire de France.

J’ai cherché sur le site Hasbro qui édite les deux jeux des versions sur le cinéma et je n’en ai pas trouvé. Cependant, ma principale difficulté avec le Trivial Pursuit reste son obsolescence programmée.

On ne peut pas laisser ce jeu une dizaine d’année dans un coin et le ressortir sans que les cartes culture ou sport deviennent les plus difficiles à jouer pour les joueurs les plus jeunes (et déjà les cases sport ont toujours été les plus difficiles pour moi).

Du coup, comme je suis plutôt amatrice de jeux de plateau – y participer, voire en fabriquer (j’avais fabriqué il y a quelques années un jeu de l’oie du CDI quand j’étais en collège, et plus récemment mon jeu sur l’intelligence artificielle – et je garde pour un autre article la fabrication d’escape games), j’ai cherché sur internet s’il n’y avait pas eu quelques fans de jeux comme moi pour fabriquer un jeu de l’oie sur le cinéma.

Le seul résultat à peu près concluant que j’ai trouvé est celui-ci :

 

L’idée est très sympa et le visuel est génial. Je pense que quand j’aurai un peu de temps devant moi, j’adapterai ce jeu à l’histoire du cinéma en général ou peut-être à quelques déclinaisons pour des films ou des réalisateurs… en le croisant éventuellement avec l’idée de jeu proposée par une de mes collègues en histoire-géo au lycée, qui a présenté aux journées portes ouvertes un jeu de l’oie sur la Troisième République.

  • Jeux de plateau (et toujours culture ciné)

Plus récemment, l’un des jeux de culture générale que je préfère malgré toujours un petit risque d’obsolescence programmée comme le Trivial Pursuit, c’est le TTMC (Tu te mets combien ?).

Les questions cinéma de ce jeu sont vraiment excellentes, et j’ai vu sur le site officiel que ses créateurs proposaient des déclinaisons Jeux olympiques, cuisine ou encore musique. À quand un TTMC exclusivement Cinéma, ce serait génial !

Scénarios de jeux sur le cinéma

Dans l’épisode 1 « Jeux et cinéma», j’avais évoqué quatre de mes jeux préférés qui revenaient en 2013 sur différents aspects (thématiques ou chronologiques) du cinéma : le Shabadabada cinoche sur les répliques de films, le Timeline Musique & cinéma, un Black Stories sur le cinéma et une Boîte à culture geek.

Ce qui m’a incitée à écrire ce nouvel article, ce sont deux jeux qui ont fait le choix de s’approprier des éléments historiques du cinéma et d’impliquer le joueur dans cette histoire.

Le premier s’intéresse aux pionniers du cinéma muet et à l’industrie naissante de Hollywood, le second explore les heures sombres du Maccarthysme.

  • Cartaventura : Hollywood

Le premier jeu fait partie de la collection des Cartaventura (ces jeux à itinéraires variables où le scénario dépend des choix du joueur).

Celui sur Hollywood m’a immédiatement conquise car, non content d’évoquer la figure de Chaplin, les itinéraires proposés s’inspirent directement de la filmographie de ce réalisateur.

En voici le scénario présenté sur le site :

Scénario Hollywood : 1920, Ohio. Vous incarnez Jim Tully, un ouvrier lassé par un quotidien bien loin de ses rêves de cinéma. Quittez tout et, de train en train, tentez de traverser le pays avec l’espoir de rejoindre le plus célèbre des vagabonds : Charlie Chaplin !

J’ai pris quelques photos au début de la partie, mais j’ai rapidement été rattrapée par l’envie de jouer et d’explorer les différents itinéraires du jeu, puis de tester les autres histoires proposées qui ont l’air tout aussi irrésistibles : les deux jeux sur l’univers des Trois Mousquetaires, celui sur Versailles, mais aussi Lhassa et Cosmologia que j’ai déjà chez moi.

  • Hollywood 1947

Le deuxième jeu, Hollywood 1947 est un jeu de stratégie un peu plus compliqué à prendre en main mais tout aussi passionnant dans ses choix scénaristiques.

En voici le scénario :

Démasquez les communistes infiltrés…

Hollywood 1947 est un jeu de déduction à rôle caché pour 1 à 9 joueurs. Tentez de démasquer les communistes qui se sont infiltrés dans votre studio de cinéma avant que le Congrès américain décide de sa fermeture.

La mise en place du jeu demande un peu plus de temps, et il faut réussir à comprendre sa dynamique. Ce qui m’a attirée davantage, c’est le matériel et le soin apporté à tous les éléments du jeu, qui en font un très bel objet.

Si le jeu Cartaventura s’adresse à tout type de joueur, cinéphile ou non, Hollywood 1947 est peut-être plus destiné aux passionnés d’histoire du cinéma (ou d’histoire de la Guerre froide) mais j’imagine qu’un enseignant d’histoire pourra l’utiliser, se l’approprier avec ses élèves ou imaginer à partir de ce modèle une séance ou un jeu permettant de mieux comprendre une période ou un contexte historique.

Répliques de films : du Shabadabada au quotidien

Puisque j’ai évoqué un peu plus haut un de mes jeux préférés sur le cinéma qui figure toujours en bonne place dans ma bibliothèque, autant rappeler ses mécanismes et en profiter pour une petite digression finale.

Dans mon article de 2013, j’en redonnais les principes sous forme de dialogues en utilisant une réplique du film Casablanca.

Pour devenir incollable à ce genre de jeux (et aux questions ciné du TTMC) rien de tel que se replonger dans les ouvrages de Philippe Lombard consacrés aux répliques de films :

  • 600 répliques de films à l’usage du quotidien, publiés en 2016 et 2020
  • Parler comme un super-héros : 100 répliques cultes pour devenir invincibles, en 2018 ;
  • mais surtout les 600 répliques de films pour avoir la bonne répartie… au bon moment !, publié chez Dunod en novembre 2024 et sur lesquels je reviendrai dans un prochain article, le temps que ça infuse.

J’ai donc quelques bonnes résolutions sur les prochains articles cinéphiles, et que j’ajoute ici en guise d’aide-mémoire et de to-do-list :

  1. continuer à parler de femmes qui écrivent sur le cinéma, qui parle de cinéma ou qui font du cinéma au mois de mars
  2. continuer à parler des ouvrages de Philippe Lombard, en particulier les tout derniers (mais aussi ceux que je viens de mentionner)
  3. voir les derniers films d’Almodovar et lire son roman
  4. puisqu’on parle de répliques de films et de scènes cultes, parler à nouveau de séries télévisées
  5. faire un autre article sur les jeux et en particulier les escape games
  6. aller voir la prochaine exposition à la Cinémathèque

Et puisqu’on a désormais le programme des prochains mois, je vous dis à très bientôt sur Cinéphiledoc !

Lectures ciné sous un plaid

Pour ce dernier article cinéphile de 2024, j’ai décidé de revenir sur trois ouvrages qui attendaient patiemment sur ma pile de lecture depuis cet été.

Cela permettra peut-être à quelques-uns d’entre vous de glaner des idées de cadeaux, et, de mon côté, de ne pas avoir à choisir entre ce livre-ci ou ce livre-là.

Chacun de ces ouvrages ont cependant une caractéristique commune : ce sont des valeurs sûres, qu’il s’agisse de leur auteur, de leur éditeur ou de leur thématique, et cela me permettra de digresser à loisir, et à partir de l’ouvrage en question, de revenir sur quelques pépites sur lesquelles j’ai déjà craqué ou auxquelles il est difficile de résister…

J’ai profité des vacances de la Toussaint (et de la météo qui n’était pas vraiment à la fête) pour faire descendre ma pile de lecture et pour la mettre à jour, alternant à un rythme un peu plus soutenu que d’habitude les publications récentes, les romans que l’on m’avait offerts et ces trois ouvrages cinéphiles.

Ambiance Halloween

J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer le premier ouvrage dans mon précédent compte-rendu de lecture.

Il s’agit d’un livre qu’on m’a prêté en juin dernier, et que j’avais commencé, pour finalement le laisser provisoirement de côté, pour me plonger dans le journal d’Alan Rickman et dans les mémoires de Pascal Thomas.

Je ne comptais pas forcément lui consacrer un article, sa publication remontant à trois ans, mais le livre était toujours sur mes étagères, et je me disais qu’il allait bien falloir le lire et le rendre à son propriétaire…

Ce livre, c’est celui-ci :

Les Dossiers du Coroner : Autopsies des morts cultes du cinéma, de Fabio Soares et Mark Sonnenberg, a été publié en 2021 aux éditions Gründ.

J’en ai dit quelques mots en passant dans l’article du mois d’octobre, mais la qualité de cet ouvrage (et la qualité des vidéos de la chaîne YouTube qui lui est associée) m’a conduite à penser qu’il mérite largement mieux.

Pour déterrer les films cultes, en particulier les nanars, mais pas seulement (puisque l’une des meilleures de ses vidéos est celle consacrée au Nom de la rose), je connaissais l’excellent François Theurel, et sa chaîne Le Fossoyeur de films.

J’avais d’ailleurs adoré aussi son livre T’as vu le plan ? et sa série des vidéos dédiées aux tournages cauchemardesques, Film wars. Et je ne vais jamais au cinéma sans avoir en tête son Manuel du savoir-vivre du spectateur, qu’on devrait faire visionner systématiquement aux accros à leur smartphone et aux mangeurs de popcorn.

La chaîne Chronik Fiction permet de s’intéresser à un autre métier indispensable à une bonne ambiance cinéphile d’Halloween, après celui du Fossoyeur, celui du Coroner.

L’ouvrage de 2021 qui lui est consacré revient sur l’ensemble des vidéos réalisées sur Chronik Fiction et mettant en scène ce personnage.

Après une préface rédigée par le comédien qui l’incarne, l’excellent Stefan Godin (dont un commentaire sous l’une des vidéos juge qu’il porte aussi bien la moustache que Tom Selleck), les auteurs évoquent dans une introduction sur les morts les plus mémorables du cinéma.

Ils reviennent ensuite sur la genèse du projet et les coulisses de tournage des vidéos, le travail colossal (et invisible pour le spectateur) mis en oeuvre pour parvenir à ce dosage méticuleux : décors, costumes, écriture et comédiens.

L’ouvrage retranscrit ensuite fidèlement chacune des vidéos, encadrée par une explication préliminaire sur le choix du film et ensuite par un décryptage de la réalisation de la vidéo et sa réception sur YouTube, depuis le premier épisode de la saison 1 (Battle royale) jusqu’à l’épisode inédit de la saison 2 (Akira).

Chaque mort est illustrée d’un dossier du coroner qui donne d’autant plus envie de retourner voir les vidéos de la chaîne, mais aussi de revoir le film dans son intégralité.

Mes épisodes préférés (et mes chapitres préférés du coup) sont les suivants : Le Roi Lion, Thelma & Louise – qui sort clairement du lot – Star Wars, et évidemment celui sur Psychose. Quoi, encore Hitchcock ? Quoi, encore quelque chose à dire sur Psychose ? Et bien oui, ils ont trouvé.

Et rien de tel qu’une belle mort au cinéma (fidèle à la formule « On peut rater sa vie, mais pas sa mort ») pour passer un bon Halloween.

Un parfum d’enfance

Le deuxième ouvrage que j’ai lu pendant les dernières vacances contrastait visuellement quelque peu avec l’ouvrage du Coroner.

Cela m’avait d’ailleurs frappée d’enchainer ces deux lectures : la première proposant une couverture principalement noire avec le titre et le personnage se détachant partiellement en blanc dessus, la deuxième à la couverture blanche avec le titre et la silhouette se détachant en noir.

Cet ouvrage, c’est celui de Guillaume Evin publié chez Casa éditions en octobre 2023 : Charlie Chaplin.

C’est d’ailleurs ce qui m’avait séduite lorsque j’avais vu cet ouvrage pour la première fois : la façon dont le visage de Charlot se détachait par ses traits si reconnaissables sur la couverture blanche, et dont sa silhouette tout aussi reconnaissable formait les lettres de son prénom et de son nom de famille.

De Guillaume Evin, auteur prolifique sur le cinéma, j’avais déjà lu un certain nombre de livres : le plus ancien que j’ai eu entre les mains est l’excellent L’Histoire fait son cinéma publié en 2013, auquel on peut associer le plus récent Les 101 meilleurs films historiques (2023, Casa éditions).

L’auteur est également un spécialiste de James Bond, avec une dizaine d’ouvrages consacrés à l’agent 007. Mon préféré est Bons baisers du monde, sorti en 2020 chez Dunod.

Le dernier ouvrage (et le plus récent) dont j’ai pu parler sur ce site est C’est un scandale !, publié en 2022 également chez Casa.

Je n’avais pas forcément prévu d’acquérir un énième ouvrage sur Charlie Chaplin, ma bibliothèque étant assez largement fournie sur la question, depuis son autobiographie (en français et en anglais) jusqu’à l’ouvrage de Jeffrey Vance et au délicieux À table avec Chaplin, de Claire Dixsaut, qui m’a toujours enchantée et me renvoie comme d’habitude à son excellent site, CinéMiam.

L’ouvrage de Guillaume Evin est agréable, il propose à celles et ceux qui découvriraient Chaplin une belle porte d’entrée dans son univers, avec une introduction présentant l’homme et l’artiste, un portfolio et un rappel de sa filmographie. Quant à ceux qui connaissent déjà leur Chaplin jusqu’au bout des ongles, le livre n’est qu’un prétexte supplémentaire à revoir les films.

Guillaume Evin m’a donné également envie de me replonger dans un livre d’un de mes éditeurs de prédilection en matière de cinéma.

Il s’agit encore une fois des éditions Taschen. En effet, en cette période propice à offrir de beaux livres, il est difficile de résister aux éditions Taschen (surtout quand elles apparaissent régulièrement dans mon fil Instagram…).

Alors certes, il faut bien arriver à résister à ce magnifique LIFE. Hollywood, qui vous coûtera 200 euros…

Rien que de voir ce coffret, j’en ai des fourmis dans les mains… mais non, j’attendrai une version plus économique, qui finira bien par sortir.

De la même manière, Les Archives Charlie Chaplin de Paul Duncan ont commencé par sortir en grand format, avant d’être publiées dans un format plus accessibles :

Et elles restent tout aussi magnifiques. Tout espoir est donc permis.

Paris sous le sapin ?

Terminons cette petite liste de Noël avant mon traditionnel palmarès de lecture par un incontournable, tout aussi prolifique (voire plus) que l’auteur précédemment cité.

Cela faisait un petit moment (ah ben non en fait, seulement depuis mars dernier) que je n’avais pas évoqué les ouvrages de Philippe Lombard.

Comme généralement je suis sage (en tout cas j’essaye), j’ai la chance de recevoir un avant-goût de Noël ou de mon anniversaire dans ma boîte aux lettres assez régulièrement.

Cependant, l’un des derniers publiés n’est pas exclusivement consacré au cinéma, et me permet là encore une digression fort bienvenue pour vous proposer des pistes de cadeaux qui ne se limitent pas aux Lombard productions.

Dans cette promenade euphorisante publiée en octobre 2023 aux éditions Parigramme, l’auteur fait également la part belle aux événements (expositions, installations) qui ont marqué la capitale, aux concerts, à la chanson, mais aussi, comme de bien entendu, au cinéma :

Cela me permet de rappeler que pour les amoureux de la capitale (ou pour ceux qui simplement veulent la découvrir ou la faire découvrir autrement), rien de tel qu’un ouvrage des éditions Parigramme.

Je dois en avoir un bon stock dans ma bibliothèque, si l’on compte ceux que l’on doit à Philippe Lombard – mon chouchou étant, vous ne serez pas surpris, Le Paris de François Truffaut – mais aussi le magnifique Paris de Claude Sautet proposé par Hélène Rochette.

J’en ai également quelques autres, celui consacré à Gainsbourg, et de plus petits et plus littéraires, même si curieusement Le Paris de Marcel Proust manque encore à ma collection…

Il y en a de plus insolites et inattendus aussi, comme celui consacré aux maisons closes, un étonnant Paris fantômes qui permettra de prolonger encore une fois Halloween ou celui consacré aux chats de Paris, Paris chats : Cats in the city, et pour tout type de promeneur, de celui qui veut parcourir les égouts à celui qui préfère regarder le ciel.

Comme le rappelle très justement le slogan des éditions Parigramme : tout Paris est à lire, et effectivement, il y en a pour tous les goûts sur le site internet de cette maison d’édition, dont on peut aussi retrouver la plupart des titres à la librairie La Mouette rieuse, au 17 bis rue Pavée à Paris, où l’on peut également prendre un goûter, et qui est à deux pas du Musée Carnavalet, consacré à l’histoire de Paris.

Une belle balade en perspective…

En attendant d’autres promenades, je termine ici ce dernier compte-rendu de lecture de 2024, et vous donne rendez-vous très prochainement pour un nouvel article sur Cinéphiledoc.

Le livre de cinéma que j’ai le plus attendu

Voici un titre quelque peu pompeux mais absolument pas usurpé ni exagéré pour ce nouvel article.

Les habitués de ce blog se demanderont de quoi il s’agit :

un énième livre de Philippe Lombard (presque) ? un énième livre sur François Truffaut (presque aussi) ? Une encyclopédie sur Kaamelott ? Un panorama image par image du cinéma d’Hitchcock ?

Pépites, attentes et surprises

Il y a quelques semaines, j’ai profité de la fin de l’été pour étudier à nouveau ma bibliothèque, où toujours les livres des éditions Taschen, les Lombard et quelques pépites figurent en belle place.

Parmi mes chouchous – tiens, comment écrit-on chouchou au pluriel : comme les choux avec un x ou simplement avec un s – j’en citerai trois : Hollywood : La Cité des femmes, d’Antoine Sire, Les Plus grand films que vous ne verrez jamais, de Simon Braund, et 5e avenue, 5h du matin, de Sam Wasson.

Je me souviens guetter à chaque date anniversaire les trouvailles permettant de mettre Truffaut à l’honneur, et il y en a eu encore de très belles ces dernières années, j’en veux pour preuve la publication des correspondances avec Helen Scott ou entre Truffaut et des écrivains.

Mais plus généralement maintenant je cède à la surprise : je sais qu’un ouvrage de Philippe Lombard va parfois m’entrainer hors de ma zone de confort, vers un cinéma que je ne connais pas toujours – et je lui sais gré de ces belles découvertes.

Je vais davantage être attirée par l’effet de surprise que constitue un roman ou une bande-dessinée évoquant l’univers du cinéma (comme Les Guerres de Lucas) plutôt qu’une énième filmographie d’un réalisateur que j’apprécie – exceptions faites de mon trio de tête : Truffaut, Hitchcock, Chaplin.

Le cinéma va aussi surgir au moment où je ne l’attends pas forcément :

  • dans une discussion sur les morts au cinéma, ce qui donne lieu à la découverte de la chaîne Chronik Fiction (excellente) et du non moins excellent ouvrage Les Dossiers du Coroner : Autopsies des morts cultes du cinéma, de Fabio Soares et Mark Sonnenberg, publié en 2021. Si le livre m’était tombé entre les mains plus tôt, soyez assurés que j’en aurais parlé de manière plus détaillée…

  • dans un ouvrage collectif de Nota Bene sur Les Samouraïs, où je n’attends pas le dernier chapitre pour avoir envie de voir ou revoir toute la filmographie d’Akira Kurosawa.

Mais tout cela ne me donne pas encore le livre de cinéma que j’ai le plus attendu.

It’s been 84 years

Pour le coup c’est quelque peu exagéré, mais si je considère l’attente ressentie, on est sur quelque chose d’équivalent à ce que dit le personnage de Rose dans Titanic.

Si je consens à être un peu plus réaliste, je dirais que cela fait une bonne dizaine d’années que j’attends les souvenirs de Pascal Thomas.

J’en veux pour preuve cet échange sur Twitter avec Philippe Lombard, dont j’ai gardé la trace et qui remonte à 2020 (seulement quatre ans me direz-vous) mais qui donne une idée de l’impatience grandissante qui était alors la mienne :

Je suivais alors fébrilement le site des éditions Séguier et la page du site de la Fnac sur laquelle la publication de l’ouvrage avait été annoncée.

Dans cet échange de quelques minutes avec Philippe Lombard qui, je l’espère, ne me tiendra pas rigueur de l’avoir exhumé, je déplore en 2020 d’attendre « toujours » la sortie de ces souvenirs prévue en 2031.

J’en profite alors en direct pour faire un tour sur le site commercial, et là je découvre que cette sortie est à nouveau décalée à 2039. Imaginez mon étonnement. Attendre un livre pendant 19 ans !

Fort heureusement, je n’ai pas eu à attendre ni 2039, ni 2031, puisque ce livre de souvenirs est finalement sorti en janvier dernier. Et c’est ce retournement de situation qui m’a prise au dépourvu.

Les voies de l’édition semblent aussi impénétrables et insondables que les mystères de la poste déplorés par la mère de Bertrand Morane dans L’Homme qui aimait les femmes (comprendra qui le veut ce clin d’oeil truffaldien).

Ne vois-tu rien venir ?

C’est donc au détour d’un rayon d’une de mes librairies habituelles que je suis tombée par hasard sur le livre de Pascal Thomas, le même jour que le journal d’Alan Rickman.

J’avais depuis longtemps cessé d’aller scruter le site des éditions Séguier et j’avais supprimé de mes favoris la page promettant la publication pour 2031, non tiens 2039, non tiens 2050.

De Pascal Thomas je m’étais figuré des soucis de santé, ou des projets auxquels il accordait davantage d’importance, ou des éventuels désaccords avec cette maison d’édition, et qui pouvaient expliquer ces délais successifs.

J’avais donc remisé cette histoire de Mémoires dans un coin de ma tête, ce qui se défendait d’autant plus que je n’étais pas une inconditionnelle forcenée de sa filmographie.

Après tout, je ne connaissais pas grand chose de Pascal Thomas… et pas tant de films que ça. Alors pourquoi, me direz-vous, avoir attendu tant de temps et pourquoi avoir accueilli avec un plaisir comparable aux madeleines de Proust ce petit clin d’oeil du hasard, celui d’avoir mis sous mes yeux l’ouvrage enfin publié ?

D’un extrême à l’autre

Les films de Pascal Thomas que je me rappelle avoir vus appartiennent à deux catégories.

Il y a ceux que je n’ai vus qu’une seule fois, et qui cependant m’ont marquée, soit par leur titre, soit par leur rythme :

  • Pleure pas la bouche pleine (je me souviens que mes parents me l’avaient fait voir quand j’étais enfant, et je n’ai que ce seul souvenir) ;
  • Celles qu’on n’a pas eues : j’ai adoré ce film, et pourtant je ne l’ai jamais revu depuis. J’en restitue ici le propos : dans un compartiment de train, des hommes racontent leurs déboires en amour. J’ai dû le voir peu après L’Homme qui aimait les femmes de Truffaut, et j’ai dû sans doute lui voir un certain cousinage qui me faisait le considérer avec tendresse et humour…
  • La Dilettante : parce que Catherine Frot. C’est certainement la raison qui m’a poussée à le voir, mais il n’a jamais figuré pour autant dans ma bibliothèque, curieusement. Et pourtant, cela lui va si bien !
  • Mercredi folle journée ! : j’ai dû le voir, la chose est certaine et entendue, car le résumé m’est familier, mais je n’en ai pas davantage de souvenirs.

Et dans la deuxième catégorie, je range ceux que je vois et que je revois sans m’en lasser jusqu’à les connaître par coeur, et ils sont au nombre de trois :

  • Mon petit doigt m’a dit
  • L’Heure zéro 
  • Le Crime est notre affaire

Ces trois films sont des adaptations de romans d’Agatha Christie. Il y en a un quatrième que je n’ai pas mentionné : Associés contre le crime.

Je ne l’ai vu qu’une fois à sa sortie au cinéma, et il n’a pas suscité chez moi le même enthousiasme que les trois autres – j’ai donc décidé de ne le faire figurer ni parmi les premiers de la liste, ni évidemment parmi les seconds.

Mon petit doigt m’a dit, Le Crime est notre affaire, et dans une moindre mesure L’Heure zéro, font partie de mes films « doudous ».

Je suis capable d’en réciter bon nombre de répliques et j’en savoure les moindres détails, qu’il s’agisse de Catherine Frot chantant « Je crois entendre encore caché sous les palmiers sa voix tendre et sonore comme un chant de ramiers », d’André Dussolier « Je suis le colonel Raquette », d’Annie Cordy « Laissez un message après le pop… POP ! » ou bien cette phrase chantonnée par François Morel dans L’Heure zéro : « Sherlock Holmes, Jules Maigret, Miss Marple, Hercule Poirot, Columbo, Columbo… »

Il faut vous dire aussi que j’ai pu assister de loin au tournage de certaines scènes de L’Heure zéro, au lycée Michelet de Vanves, alors que j’y étudiais en prépa.

Je me souviens d’avoir croisé des figurants en uniforme d’école, d’avoir aperçu les camions de l’équipe, et d’ailleurs qu’au moment où je devais plancher comme tous les mercredis après-midi sur un devoir sur table de cinq heures, notre enseignante de lettres s’était de son côté enorgueillie d’avoir pu échanger quelques mots avant François Morel, ce qui me fait encore ressentir une petite pointe de jalousie…

Plus tard, au ministère, je partageais mon bureau avec Sandrine, une inconditionnelle comme moi de Mon petit doigt m’a dit et du Crime est notre affaire, et il ne se passait pas un mercredi (folle journée) sans que nous nous lancions des répliques des deux films depuis derrière nos ordinateurs.

Pour toutes ces raisons, j’ai guetté, j’ai espéré, j’ai attendu le livre de Pascal Thomas.

Un dilettante ? Non, un Antoine Doinel des mémoires cinéphiles

C’est donc en janvier 2024 que j’ai pu enfin avoir les Souvenirs en pagaille de Pascal Thomas entre les mains, et j’ai cependant différé ma lecture jusqu’au mois de juillet.

Que dire de cette lecture ? Qu’elle porte bien son titre, c’est le moins qu’on puisse dire. Qu’elle ressemble à son auteur, avec ces chapitres en pointillés, qui évoquent par touches plus qu’ils ne décrivent. J’ai compris pourquoi cette publication a pris autant de temps, tant la plume de Pascal Thomas semble rêveuse, distraite, légère voire capricieuse.

Je n’y ai certes pas retrouvé une autobiographie du berceau à aujourd’hui, et si j’ai été quelque peu désarçonnée (oserais-je dire déçue ?) de ne pas avoir un compte-rendu heure par heure (zéro) du tournage du Crime est notre affaire, mon petit doigt en a, à cette lecture, récolté des indices…

J’y ai entraperçu le cinéaste facétieux de mes films fétiches, et si je ne garderai pas forcément un souvenir exhaustif de cette rencontre, j’y ai glané quelques pépites :

Mais je vais faire comme Yves Mirande qui, dans ses souvenirs, à chaque fois qu’il avait le sentiment d’être trop long, notait « Cela va me prendre trop de temps, je préfère réserver ça au prochain volume de mes souvenirs. » Volume qui, bien sûr, n’a jamais vu le jour… En ce qui me concerne, nous verrons bien.

Le lecteur est prévenu, rendez-vous en 2050… ou pas.

Dans une page intitulée « Sur les tournages de Truffaut »

Beaucoup plus tard, Truffaut m’a dédicacé son livre sur Antoine Doinel : « À Pascal Thomas, Doinel journaliste. »

La dernière évoque une période de sa vie à réaliser des films publicitaires :

Après avoir tourné un film pour Tampax, je propose comme slogan : « Tampax, un nom qu’on trouve sur toutes les lèvres. »

Nous avons perdu le client !

Cela donne une idée assez juste du caractère du bonhomme, potache et avec l’oeil qui pétille, et qui ne fait les choses que lorsque l’envie lui en prend.

Et encore une fois, on peut comprendre qu’il ait fallu attendre aussi longtemps, mais si le meilleur livre ressemble à son auteur, cela en valait finalement la peine.

Été anglais

Contrairement à mon habitude depuis plusieurs années, je n’ai pas fait de hors-séries estivaux cet été.

Ce n’est pourtant pas les idées qui me manquaient, j’en avais quelques-unes en tête, et je me disais que je trouverais bien à un moment donné, à la faveur d’une journée pluvieuse, la motivation pour me remettre à écrire.

Nous sommes bien un samedi pluvieux au moment où j’écris ces lignes, mais ce sont les premières lignes de mon article cinéphile de septembre, au moment où j’essaye tout doucement de remettre le cerveau en marche, après plusieurs semaines de déconnexion salutaire.

Histoire de prolonger un peu mon été, et non pour correspondre à la météo (puisque c’est tout autant un cliché de dire qu’il ne fait pas beau en Angleterre que de dire qu’il ne fait pas beau en Bretagne), je vous propose un petit itinéraire anglais dans cet article, tout en digressions et en étapes, ponctué de lectures et de films.

J’en profiterai pour l’illustrer avec quelques photos prises cet été, qui pourront peut-être plaire tout autant aux amateurs de littérature, de cinéma, qu’aux profs docs.

L’élégance à l’anglaise : Alan Rickman

Pour entamer mes lectures cinéphiles et plaisirs de l’été, je me suis plongée dans ce que je considérais comme un pavé : le Journal d’Alan Rickman, publié en janvier 2024 aux éditions Hachette Heroes dans sa traduction française et préfacé par Emma Thompson.

Cette publication en français m’a interpellée : quel acteur étranger – ou à la carrière internationale – est suffisamment populaire pour qu’une maison d’édition décide de proposer une traduction française de ses journaux intimes ?

En revenant à cette question, trois icônes me viennent en tête : Marilyn Monroe et ses Fragments, Romy Schneider et son Journal d’une vie (mais est-il encore disponible ?) et Carrie Fisher et son Journal d’une princesse.

Il n’est pas toujours fréquent de voir publiées des autobiographies ou des biographies de stars internationales. Alors comment expliquer le choix des éditions Hachette Heroes, sinon en s’attardant sur les mots de la quatrième de couverture : Love Actually, Piège de cristal, et évidemment Harry Potter.

Lorsque j’avais été stoppée net dans ma déambulation dans les rayons de ma librairie à la vue de ce livre, j’ai immédiatement ressenti un mélange de joie et d’impatience. Oui, c’était justice de trouver un livre sur Alan Rickman ou d’Alan Rickman. Et oui, il fallait que je le lise.

Pas seulement pour Harry Potter, pas seulement pour Piège de cristal, et pas seulement pour Love Actually. Mais aussi pour Robin des bois : Prince des voleurs, pour Galaxy Quest, pour Dogma, pour Le Parfum, pour Raison et sentiments, pour Sweeney Todd, pour Alice au pays des merveilles

Et aussi pour la façon hypnotique dont Alan Rickman lit les sonnets de Shakespeare, pour sa voix, et enfin pour tout ce que je ne connaissais pas de lui, tout ce que je n’avais fait que lire et apercevoir de loin, sa carrière au théâtre, son élégance et son érudition. Parce qu’Alan Rickman reste l’un de mes acteurs préférés.

Ce qui m’a ensuite interpelée, c’est très prosaïquement la taille de l’ouvrage. J’ai été impressionnée par la constance et la discipline avec laquelle Alan Rickman a tenu ses journaux et du coup, par le volume qu’ils constituent. Je me suis donnée l’été pour lire cet ouvrage, convaincue que j’y passerai une bonne partie de mon temps.

J’ai lu ce livre en moins d’une semaine.

J’ai eu l’impression d’y retrouver la voix d’Alan Rickman, cette voix dont il dit :

J’ai l’impression de n’avoir jamais utilisé ma voix naturelle, que ce son que je produis, que les gens imitent et qui me déprime constamment, n’a rien à voir avec moi.

C’est cela qui rend son écriture aussi touchante, non seulement cette vague tristesse, mais cette simplicité, cette humilité, sa délicatesse, son humour, cette exigence vis-à-vis de lui-même mais aussi des autres, et surtout sa capacité à s’émerveiller.

Célébrissime pour son rôle dans Harry Potter, Alan Rickman persiste à s’enchanter de déguster tel ou tel plat, de participer à une soirée où il croisera untel et untel, à être sollicité pour les discours d’obsèques de ses amis, à rapporter le coup de fil de JK Rowling qui lui indique comment jouer Severus Rogue dès le premier Harry Potter, ou à relater certains traits de caractère de ses comparses et certaines anecdotes de tournage.

J’ai dévoré ce livre sans forcément prendre en notes le moindre élément mais j’ai relevé quelques pages et cette citation :

J’aimerais que ces bars lounge ne soient pas si entièrement dédiés aux ennuyeux & ennuyés. Il pourrait y avoir une porte marquée « Réservé aux Excentriques et Zinzins. »

Mon seul regret, c’est de n’avoir qu’un maigre aperçu, avec le cahier central, de ce que pouvait donner le texte manuscrit, Alan Rickman étant également un fabuleux dessinateur (je reproduis ici les images mises à disposition sur le site des éditions Hachette) :

Chronologiquement, les dernières pages sont douloureuses à lire, puisqu’on assiste à sa maladie, et elles sont suivies de pages très touchantes sous la plume de son épouse Rima Horton, puis d’extraits de journaux de jeunesse.

Cette lecture m’a évidemment donné envie de revoir une bonne partie de la filmographie d’Alan Rickman. J’ai revu Love Actually et Raison et sentiments, et avant mon séjour anglais, j’étais prête à revoir l’intégralité de la saga Harry Potter.

Quand je vais en Angleterre, Harry Potter n’est jamais loin de mon esprit. Bien-sûr, j’ai appris depuis plusieurs années à dissocier l’autrice et son oeuvre.

Je serais bien incapable de retirer les livres et les films de mes bibliothèques, et je garde chez moi quelques éléments de décoration qui appartiennent à cet univers. Je ne les regarde jamais sans une pointe de tristesse et de déception, mais je ne suis pas prête à renoncer à une partie de mon enfance parce que cette femme que j’ai un temps admirée a désormais les mêmes discours qu’Elon Musk…

Itinéraire anglais, entre littérature et cinéma

À l’image de la traduction française du premier volume de la Saga des Cazalet, d’Elizabeth Jane Howard, je pourrais mettre au pluriel l’été du titre de cet article. Je vous recommande d’ailleurs cette superbe saga en cinq volumes, se déroulant juste avant la seconde guerre mondiale pour le premier d’entre eux.

C’est la deuxième fois en trois ans que je choisis l’Angleterre comme destination estivale.

En 2022, j’avais passé quelques jours à Londres au mois d’août et j’étais justement allée voir une exposition consacrée aux décors et aux accessoires de l’univers Harry Potter. Cette année, j’ai juste aperçu de loin l’entrée surpeuplée de la boutique de la voie 9 3/4 à la gare de King’s Cross.

  • Lectures en anglais, aller et retour

Dans mes bagages, j’avais pris la bonne résolution de n’emmener que des livres en anglais sur ma liseuse.

Outre quelques livres de Philippa Gregory (que je n’ai pas encore lu et qui risque de donner un peu de fil à retordre à l’amatrice de l’histoire anglaise que je suis) j’ai emmené avec moi le conseil de lecture d’une collègue d’anglais, The Rain before it falls, de Jonathan Coe, et un ouvrage que j’avais aperçu au CDI avant de partir en vacances : The Paris Bookseller, de Kerri Maher.

Le premier est un roman retraçant l’histoire de la vie d’une femme à travers une succession de photographies, le second raconte l’histoire de la fondatrice de la librairie Shakespeare and Company à Paris.

Leurs thématiques et la finesse de leur écriture m’ont quelque peu fait oublier mes désillusions quant à une certaine JK mentionnée plus haut, ce qui a été parachevé à la fin de mon séjour par la visite de la British Library, j’y reviendrai plus bas…

  • Les terres d’Agatha Christie

De Torquay à Greenway, j’ai savouré pendant quinze jours d’être immergée dans l’univers d’Agatha Christie.

À Torquay, sa ville natale, j’ai pu apercevoir quelques lieux de tournage de certains épisodes d’Hercule Poirot, et j’ai aussi visité le musée de Torquay, qui consacre une salle entière à la romancière et à ses détectives. On y voit notamment l’un des costumes d’Hercule Poirot et la reconstitution des décors de son bureau.

À la gare de Kingswear, en face de Dartmouth, part un train à vapeur qui relie Kingswear à Paignton.

Sur le quai on peut voir une affiche où figure Hercule Poirot.

Mais le lieu principalement dédié à Agatha Christie au coeur du Devon, c’est évidemment sa maison, Greenway, que j’ai eu la chance de visiter.

Greenway est accessible via le train (mais c’est compliqué) et via le ferry (mais c’est compliqué aussi). Le plus simple est de s’y rendre en voiture, et d’y passer une demi-journée, voire la journée entière.

La maison donne sur la rivière Dart, avec une vue magnifique. Le jardin est fabuleux. On peut aussi visiter la Boathouse en contrebas, qui sert de décor à l’une des enquêtes d’Hercule Poirot (Dead mans folly – Poirot joue le jeu). Et la bibliothèque vaut clairement le détour aussi, avec ses fresques aux murs.

  • Détour à la British Library

De retour à Londres, il me restait une matinée entière, un dimanche, à quelques pas de Saint Pancras, avant de reprendre l’Eurostar.

Je n’étais jamais allée à la British Library, que j’imaginais moins accessible, et surtout fermée le dimanche. J’ai donc profité de cette dernière matinée pour y déambuler.

Le lieu en lui-même est des plus impressionnants, mais le visiteur peut aussi découvrir les « trésors » de la bibliothèque : la Magna Carta, des textes religieux d’une belle diversité, des manuscrits qui vont d’Oscar Wilde aux Monty Python en passant par Mozart et les Beatles, et des éditions originales des pièces de Shakespeare.

Début août, au moment où j’y étais, il y avait enfin dans cette salle une petite sélection correspondant à l’exposition suivante : « Queer lives in Literature », rappelant les différentes occurrences des questionnements LGBTQ+ dans la littérature au fil des siècles.

Le lieu est magnifique et j’espère y retourner à une autre occasion – et un autre jour de la semaine – pour en découvrir les autres étages et espaces.

D’ici là, je vous souhaite à toutes et tous bon courage pour la reprise et pour ce mois de septembre, et vous donne rendez-vous très bientôt pour un nouvel article sur Cinéphiledoc !

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