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La recette de la bonne humeur

Au moment où je commence à écrire cet article, nous sommes au lendemain du 27 janvier.

Oui j’ai décidément cette année une belle avance dans l’écriture de ces articles cinéphiles.

Si je rajoute que j’avais ce livre sur ma pile de lecture depuis le mois de décembre 2022, et que je l’ai également lu à cette période, cela peut donner une petite idée de mon rythme d’écriture de cette année.

Je n’ai pas eu de grandes difficultés, comme les années précédentes, à trouver ou à lire les ouvrages dont je souhaitais faire un compte-rendu, et j’aime bien profiter de quelques week-ends pluvieux ou grelottants pour écrire ces articles.

Pour celui-ci, le thermomètre est légèrement sous la barre des zéros degrés, mais il fait un grand soleil d’hiver par la fenêtre… de quoi avoir envie de se réchauffer avec un plat bien réconfortant.

Que mon article sorte au mois de mai ne change rien à la donne : le printemps aura fini peut-être par pointer le bout de son nez et d’autres recettes pourront aisément convenir.

Si je me suis décidée à écrire cet article juste après le 27 janvier, c’est parce que le livre qui était sur ma pile de lecture s’intitulait : En cuisine avec Louis de Funès, et parce que le 27 janvier dernier marquait les quarante ans de la disparition de cet acteur mythique.

C’est donc après avoir vu passer un certain nombre d’interviews, de reportages, d’extraits de films (et de films en totalité), d’images d’archives, que j’ai repris ce livre lu en décembre et me suis replongée dedans pour vous en donner un aperçu.

Les comédiens dans ma bibliothèque : état des lieux

J’ai sans doute eu déjà l’occasion d’en parler sur ce site – j’ai dû avoir trois ou quatre fois l’occasion d’évoquer Louis de Funès dans des articles qui lui étaient exclusivement consacrés.

C’est moins que Truffaut ou Romy Schneider, moins qu’Hitchcock ou Chaplin, mais cela reste pour le coup certainement l’acteur masculin dont j’ai parlé le plus – peut-être à égalité avec Lino Ventura.

C’est curieux d’ailleurs : ayant une certaine prédilection pour le cinéma hollywoodien, et me concentrant dans mes lectures soit sur des domaines transversaux, soit sur des figures de réalisateurs, je me rends compte que c’est finalement les comédiens français qui prédominent (et généralement toujours les mêmes : un panthéon féminin composé de Romy, Signoret et Girardot) dans ma bibliothèque, si l’on excepte deux figures : Audrey Hepburn et Marilyn Monroe.

Même les plus appréciés y sont moins à l’honneur : l’autobiographie de Lauren Bacall, deux livres sur Humphrey Bogart, deux sur Cary Grant, un livre sur Grace Kelly et un sur Greta Garbo…

Un comique à bonne maturation

Comme je le disais un peu plus haut, c’est donc Louis de Funès (avec Lino Ventura) qui a généralement eu les honneurs de ce site, ce qui m’a toujours paru quelque peu inattendu, étant donné le temps que j’ai mis à l’apprécier.

Mes parents lui préféraient toujours Bourvil et m’avaient appris à le trouver insupportable et gesticulant. C’est avec ce genre de préceptes que l’on construit d’abord sa cinéphilie puis qu’on la reconstruit avec un nouveau regard une fois que l’on a appris à aimer les choses par soi-même… Ainsi :

  • non, Vivien Leigh n’était pas forcément dans la vie en tout point conforme à Scarlett O’hara (même s’il est désormais avéré que son trouble bipolaire n’en faisait pas la personne la plus facile à vivre)
  • non, je ne déciderai pas de préférer Dewaere à Depardieu (quoique) ou Dorléac à Deneuve parce que les premiers ont eu le malheur de mourir tragiquement
  • oui, on peut apprécier De Funès autant que Bourvil parce que leur art comique repose sur des ressorts complètement différents et donc complémentaires

Au fur à mesure, le charme a fini par opérer, au gré des rediffusions régulières de ses films et de l’exposition organisée par la Cinémathèque qui lui rendait enfin l’hommage mérité.

Alors le nombre d’articles qui lui est consacré sur ce site, je ne sais plus… mais je suis sûre pour le coup d’avoir déjà parlé d’un compte Twitter que je suis avec assiduité et qui fait mes délices :

au même titre que le compte Twitter et le compte Instagram qui reprennent des images des films d’Yves Robert Un éléphant ça trompe énormément et Nous irons tous au paradis… mais je m’égare une fois de plus !

J’échange régulièrement avec une amie quelques répliques de La Folie des grandeurs ou de La Grande vadrouille, qui viennent agrémenter nos conversations au milieu de citations de Kaamelott ou de quelques « Papuche » bien senties tirées de Moi moche et méchant.

Au palmarès de ces répliques : « Qu’est-ce que je vais devenir ? Je suis ministre, je ne sais rien faire » et « Non sire, pour une fois c’est pas moi, j’étais là, je priais. »

Un film de De Funès, c’est comme un bon petit plat… ça réchauffe.

Ynnis Éditions

On voit qu’avec la phrase précédente, je soigne mes transitions (ou pas). L’ouvrage qui m’intéresse aujourd’hui, En cuisine avec Louis de Funès, a été publié chez Ynnis Éditions en décembre 2022.

C’est un livre à six mains : comme on le découvre dès les premières pages : « Minh-Tri Vo aux fourneaux, Photographies mitonnées par Marion Saupin, Contextes concoctés par Eugénie Michel ».

J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer ici quelques-unes des publications d’Ynnis Éditions, des ouvrages qui retiennent souvent mon attention non seulement par leur thématique mais aussi par le soin apporté à leur mise en page.

Parmi mes préférés, on retrouve la collection « Hommages » dont voici en images quelques exemples :

un bon nombre de livres sur le cinéma d’animation japonais, l’ouvrage Voyage avec Chihiro de Marta Garcia Vilar dont j’ai parlé l’an dernier, et quelques livres de recettes.

La grande majorité de ces derniers concerne l’univers Ghibli ou le cinéma d’animation, avec parmi eux trois exceptions au moment où j’écris cet article :

Lorsque j’ai appris ces publications, j’étais déjà décidé à me procurer le livre consacré à Louis de Funès. Un manque d’attention m’a fait croire que le deuxième livre était consacré à Jurassic Park, et quand je me suis rendu compte de mon erreur, ce qui dans ma tête pouvait être un article sur les livres de cuisine en général s’est transformé en article sur Louis de Funès. Tant pis, ou tant mieux.

Si je peux garder une idée spécifique aux livres de cuisine que j’ai pu feuilleter ces derniers temps, c’est là encore le soin apporté à la mise en page, et que justifie les six mains associées à la conception : un cuisinier, un auteur qui va ici se pencher sur les « contextes » et un photographe qui va donner reproduire fidèlement les plats réalisés dans les films et donner envie au lecteur, à son tour, de passer aux fourneaux.

En cuisine avec Louis de Funès

L’ouvrage propose dix-neuf recettes. Dix-huit d’entre elles sont tirées des films cultes de Louis de Funès, à commencer par La Soupe aux choux et en terminant par un cheesecake qui apparaît dans Les Aventures de Rabbi Jacob.

La dernière recette est celle d’un des plats préférés de Louis de Funès : le canard à l’orange.

Chacune des recettes est introduite par une double-page de contexte qui revient sur la scène du film et le film en lui-même dont la recette est tirée.

Voici un exemple avec La Soupe aux choux :

Puis on passe à la recette en elle-même, sur plusieurs pages en fonction du degré de complexité de cette dernière :

Feuilleter ce livre procure un réel plaisir, car certains films avec Louis de Funès sont de véritables odes à la gourmandise. Évidemment on songe à L’aile ou la cuisse ou au Grand restaurant. Et l’on ne se restreint pas à la cuisine française, puisque sont évoquées la culture japonaise grâce à La Zizanie, ou les affres de la cuisine anglaise grâce aux Grandes vacances (sans toutefois qu’une recette du repas que subit Michonnet soit retenue).

De mon côté j’ai une tendresse toute particulière pour la mère supérieure dans La Grande Vadrouille qui sort à Big Moustache : « Vous aimez bien tout ce qui est bon ? eh bien c’est très mauvais ». Et je pense régulièrement à ces images d’archives de Louis de Funès, faisant l’éloge des produits de son jardin :

Après avoir évoqué Lino Ventura et sa cuisine (un peu plus gargantuesque) dans mon article de février, je poursuis cet itinéraire cinéphilo-gastronomique avec Louis de Funès.

L’ouvrage réussit à merveille le pari à la fois de nous donner envie de cuisiner et de revoir les films qui y sont évoqués.

Mon seul regret ? Que ne soit pas reproduite la recette du soufflé à la pomme de terre donnée à Herr Muller dans cette scène mythique du Grand restaurant :

car pour connaître cette scène quasiment par coeur, j’aurais adoré pouvoir la retrouver sous la forme d’une recette réalisable… peut-être à retrouver ailleurs ?

Espérant vous avoir mis de bonne humeur avec ces évocations cinéphiles et culinaires, je vous souhaite un excellent appétit et vous dis à très bientôt pour un nouvel article sur Cinephiledoc !

Trente, quarante, soixante

Nous passons notre temps à nous souvenir et à commémorer.

Lorsque j’ai commencé à envisager ce nouvel article cinéphile et son compte-rendu de lecture habituel, c’était en plein été, et deux constats me sont venus en tête.

Le premier, c’est qu’une nouvelle fois, je parlerai de Romy Schneider en septembre, fidèle à la chanson d’Hélène : « Ce soir, nous sommes septembre », sur laquelle j’ai eu plusieurs fois l’occasion de revenir.

Le second, je l’ai énoncé dès la première phrase de cet article.

En effet, lorsque l’on regarde certaines émissions télévisées, lorsque l’on feuillette la presse, ou même lorsque l’on consulte la page d’accueil de Wikipédia, il ne se passe pas un jour sans que l’on soit confronté, forcément, à ce qui s’est passé le même jour il y a un an, dix ans, cent ans…

Cet été, à quelques jours d’intervalles, ce sont trois de ces anniversaires qui sont venus se rappeler à moi.

Trente, quarante, soixante

Commençons par les deux extrémités, et gardons le milieu pour la fin.

  • Trente

Le premier de ces anniversaires pourrait paraître surprenant sur un site consacré principalement au cinéma, puisqu’il s’agit de la disparition, le 2 août 1992, de Michel Berger.

Au coeur de l’été, le 2 août, nous avons donc eu eu droit au lot habituel de reportages, de passants qui ânonnent des chansons de manière plus ou moins juste, et d’émissions hommages à l’artiste fauché en pleine gloire.

Ayant été bercée par les musiques de cette génération Berger et ayant écouté plus qu’à mon tour Starmania, Berger, Gall, Balavoine et Sanson, je n’ai alors pas été épargnée par l’envie moi aussi de réécouter La Groupie du pianiste ou Ella, elle l’a.

Par ailleurs, j’ai toujours trouvé un côté très cinématographique aux chansons de Michel Berger, et du coup, si je l’ajoute à cet article « célébrations », il ne fera pas figure d’intrus.

Quelques jours après, c’est un autre anniversaire que nous avons célébré.

  • Soixante

Le 5 août 1962 disparaissait Marilyn Monroe.

Le 5 août 2022 a donc vu son lot d’hommages, de passants croisés dans la rue qui évoquent la soirée d’anniversaire de John Fitzgerald Kennedy « Happy birthday Mr President » en lui associant le Poupoupidou de Certains l’aiment chaud.

Nous avons revu la robe blanche au dessus de la bouche de métro, et les reportages sont revenus à l’envi sur la comédienne incarnation du glamour, avec ses portraits réalisés par Andy Warhol, l’une des femmes les plus photographiées, et sur sa mort toujours sujet aux théories les plus fantasmées, à 36 ans.

Parmi les personnalités interrogées durant ces reportages, l’une des plus intéressantes reste Isabelle Danel, qui avait publié en 2012 (pour les cinquante ans de la disparition de la star, donc) un dictionnaire thématique : Marilyn Monroe de A à Z, un ouvrage qui, selon moi, reste la référence sur Marilyn.

Dans ces reportages, Isabelle Danel rappelait que Marilyn, au-delà de l’image du sex-symbol quelque peu écervelé, était aussi une femme passionnée de lectures et d’écritures, et qu’avaient été publiés pour la première fois en 2010 les Fragments :

des textes de Marilyn accompagnés de leurs fac-similés.

Si l’on veut poursuivre l’évocation de Marilyn, on se replongera dans sa filmographie (pour ma part, je reverrais bien Certains l’aiment chaud, qui reste mon préféré…), on relira le superbe Blonde, de James Carol Oates :

dont il me tarde de découvrir l’adaptation sur Netflix, et dont la sortie est prévue le 23 septembre…

  • Quarante

Nous avons passé les trente et les soixante en revue, arrêtons-nous maintenant sur les quarante.

En effet, le 29 mai 1982, une autre icône du cinéma disparaissait : Romy Schneider.

À nouveau, depuis le début de l’année, hommages et publications – certaines racoleuses, d’autres plus sérieuses – se sont succédés.

Les néophytes ont pu découvrir certains des films de Romy sur Netflix, la plateforme ayant mis en ligne pas moins de 8 films où elle apparait (vérification faite à la mi-août) : entre autres trois Claude Sautet, Les Choses de la vie, Max et les ferrailleurs et César et Rosalie, mais aussi Christine et La Piscine pour ne citer qu’eux.

Mais le plus bel hommage, c’est évidemment celui proposé par la Cinémathèque française, une exposition et une rétrospective qui ont été organisées entre le 16 mars et le 30 juillet 2022.

Exposition Romy Schneider – Cinémathèque française

Cette exposition, que j’ai découverte à ses tout derniers jours le 28 juillet, était magnifiquement orchestrée.

Jusqu’ici, il n’y a qu’une seule exposition proposée par la Cinémathèque qui m’a un petit peu déçue, celle proposée sur l’enfance au cinéma en 2017, qui était davantage une exposition d’ambiances – mais ce n’est que mon avis personnel.

Depuis, chacune des expositions proposées à laquelle j’ai pu me rendre n’a suscité chez moi que l’émerveillement, et celle consacrée à Romy Schneider n’a pas fait exception !

Retour en images et en quelques étapes…

La première rencontre que nous faisons à l’entrée de l’exposition est celle-ci, le regard de Romy Schneider, magnétique et hypnotique dans Les Choses de la vie, de Claude Sautet :

L’évocation est ensuite à la fois chronologique et thématique, associant les photographies, les extraits de films et d’archives, les ambiances, les objets et les costumes.

Période autrichienne avec Sissi (mais pas seulement) et pour l’occasion, un dais projetant des extraits des films et dans lequel on retrouve la fameuse perruque de 5 kilos que l’actrice devait supporter, un tableau en pied d’Elisabeth de Wittelsbach, une photo où Romy pose devant ce même tableau :

Période parisienne et la rencontre notamment avec Alain Delon, Coco Chanel et Luchino Visconti – qui lui fera ré-endosser le costume de l’impératrice dans son Ludwig :

L’exposition nous replonge ensuite dans les diverses aventures cinématographiques de Romy Schneider : les comédies américaines, la rencontre avec Orson Welles, le tournage interrompu de L’Enfer, d’Henri-Georges Clouzot, avant de revenir sur les retrouvailles avec Alain Delon dans La Piscine.

Les occasions manquées aussi, dont témoigne cette lettre de Truffaut, évoquant un projet avec Romy :

Suit la période Claude Sautet, où l’on retrouve les plans de travail hyper méticuleux du réalisateur, et les photographies issues de ses films, accompagnés du costume de Rosalie :

Les dernières parties de l’exposition sont consacrées aux différents projets « mémoriels » de la comédienne, et retrace cette volonté de travailler sur des films évoquant la seconde guerre mondiale (Le Train, Le Vieux fusil, La Passante du Sans-souci)

mais aussi de faire confiance à de jeunes réalisateurs, comme Andrzej Żuławski avec L’important c’est d’aimer, ou Francis Girod qui tourne Le Trio infernal et qu’elle retrouve en 1980 dans La Banquière (mon préféré) :

Enfin on retrouve à la fin de l’exposition une sélection de photographies, nous rappelant qu’avec Marilyn, Romy Schneider reste la comédienne dont le visage et la silhouette ont le plus impressionné la pellicule, qu’elle soit fixe ou en mouvement.

L’exposition proposait d’ailleurs une sélection en partenariat avec l’INA :

Un autre livre sur Romy Schneider

Sortie de cette exposition, comme toujours à la cinémathèque, l’arrêt à la librairie est un passage incontournable.

J’aurais pu, pour changer, me plonger dans le très bel ouvrage de Luc Larriba sur le tournage du film La Piscine, publié en février 2022 :

J’aurais pu tenter l’une ou l’autre des nouvelles biographies publiées cette année, ou rééditées en grand format, comme celle de David Lelait.

Mais ce que je voulais surtout, c’était pouvoir retrouver le cheminement de l’exposition, avec ses extraits d’interviews, ses citations, ses photographies, ses affiches et ses costumes.

Or, à la librairie de la Cinémathèque, le catalogue de l’exposition était introuvable, je ne l’ai retrouvé que quelques jours plus tard en librairie.

Il s’agit cependant d’un ouvrage magnifique, publié par Clémentine Deroudille, et doublement édité par la cinémathèque et Flammarion :

L’ouvrage revient en toute sobriété et élégance sur l’ensemble de l’exposition, le texte étant principalement composé d’interviews de Romy Schneider, d’extraits de ses journaux intimes et de ses lettres, ou de témoignages de ceux qui l’ont directement côtoyée.

Encore une fois, il s’agit donc d’un pari magistralement gagné par la Cinémathèque française, dont je guette avec impatience la prochaine exposition : « Top secret : cinéma et espionnage » qui sera proposée à partir d’octobre prochain !

Et même si le catalogue de l’exposition n’était pas disponible dans la librairie du 51 rue de Bercy, je n’ai pas pu résister à la tentation de rapporter de cette énième visite un petit souvenir : il s’agit de deux jeux de cartes réservés exclusivement aux cinéphiles, l’un reprenant les films d’Hitchcock, l’autre ceux de Charlie Chaplin.

Je vous en glisse ici un petit aperçu :

Ce que j’ai trouvé vraiment chouette avec ces deux jeux de cartes, c’est que contrairement à certains jeux de cartes thématiques que j’avais quand j’étais enfant, les images ne figurent pas seulement sur les figures (rois, dames, valets), mais bien sur la totalité des cartes, sur lesquelles on retrouve acteurs, scènes et affiches des films de Chaplin et d’Hitchcock.

Et cela ajoute à la panoplie d’objets et d’images dont j’ai pu parler dans mes deux hors-série de cet été, pour le prolonger un peu…

Voilà pour l’évocation de ces icônes du cinéma, au premier plan desquelles figure, comme à l’accoutumée en septembre, mélancolique et automnale, Romy Schneider, qui clôt l’article comme elle l’a ouvert, avec cette citation que je garde en mémoire :

Je vous souhaite un bon mois de septembre, et vous dis à très bientôt pour un nouvel article sur Cinephiledoc !

Hors-série 2 : dix images de cinéma qui sont chez moi

Comme à mon habitude, je vous propose deux hors-série estivaux sur ce blog.

Après un petit mois de déconnexion, voici le deuxième hors-série, qui sera tout aussi léger et, comme le promet le titre, tout aussi imagé que le premier.

Avec un peu de paresse, mais tout de même une pincée de réflexions, j’ai voulu vous partager dix images qui peuplent mon intérieur, et qui, pour certaines, m’accompagnent depuis un long moment.

Je ne vais pas forcément les présenter de manière chronologique, ni même faire une étude approfondie de leur composition, mais juste expliquer, en toute subjectivité, comment elles ont, elles aussi, construit ma cinéphilie.

Portraits en solo

  • Les Lumières de la ville

Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours connu cette photographie de Charlot, descendant les escaliers dans Les Lumières de la ville.

Elle est d’une assez bonne taille (environ 90×75 cm) et elle était à l’origine accrochée dans la maison familiale sur un pallier donnant sur ma chambre et sur celle de mes parents.

Mon père était un fan de Chaplin, et quand j’étais petite, il m’invitait chaque soir à dire « Bonne nuit » à Charlot avant d’aller me coucher.

Malgré toute l’affection que j’ai eue depuis pour Charlot, le fait de lui dire « Bonne nuit » me terrifiait, j’étais persuadée que le bonhomme allait descendre durant la nuit de son affiche pour venir jouer les vampires dans ma chambre…

Depuis, évidemment, j’ai vu et revu les films de Chaplin, j’ai ajouté d’autres images des Temps modernes et du Kid et du Cirque à cette affiche, qui s’est déplacée plusieurs fois, que j’ai fait ré-encadrer et qui est désormais dans mon salon.

  • La Nuit américaine

Par comparaison à celle de Charlot, cette photographie de Truffaut paraît minuscule : elle est dans un cadre en bois posé sur l’une de mes bibliothèques (elle figure juste à côté du clap mentionné dans l’article précédent).

On reconnaît qu’il s’agit d’une photographie de tournage de La Nuit américaine, non seulement à la veste de cuir portée par le personnage de Ferrand dans le film, mais aussi, étant donné la façon dont la photo est découpée, à l’oreille droite de Nathalie Baye qui figure à gauche de Truffaut – et qui joue le rôle de la scripte Joëlle dans le film.

C’est aussi l’une des seules photographies que j’ai imprimée directement et que j’ai encadrée de manière quelque peu artisanale, et figurant ainsi à côté d’autres dont je parlerai un peu plus loin, elle me fait aussi l’effet d’une de ces photographies qui figurent dans la chapelle de Julien Davenne dans La Chambre verte

  • Bogie

Justement, pas très loin de Truffaut, on retrouve cette photographie d’Humphrey Bogart dans un beau cadre noir…

Cette photo m’a été offerte par mon père. Bogart, comme Marilyn Monroe ou Audrey Hepburn, faisait partie (et fait peut-être toujours partie) des acteurs qui sont le plus facile à trouver dans des magasins de décoration.

Vous voulez un décor d’intérieur de cinéma ? Vous trouverez forcément Marilyn et sa robe blanche dans Sept ans de réflexion (ou bien-sûr la série d’Andy Warhol), Audrey Hepburn et son fume-cigarettes dans Diamants sur canapé, et Bogart en évocation incontournable du film noir.

Couples mythiques

  • Bogie and The Look

Sur la même bibliothèque, entre Bogart et Truffaut, il y a cette photographie d’Humphrey Bogart et Lauren Bacall issue du Grand sommeil.

Le Grand sommeil est le deuxième film qui les réunit, après Le Port de l’angoisse, et avant Les Passagers de la nuit et Key Largo.

J’ai découvert le couple Bacall / Bogart peu après avoir vu La Nuit américaine, Howard Hawks faisant partie des cinéastes auxquels Truffaut rend hommage dans son film. Cherchant donc méthodiquement à construire ma culture cinématographique, j’ai découvert Le Port de l’angoisse dans l’un des cinémas parisiens qui a l’époque projetait les grands classiques, l’Action écoles.

Je suis allée ensuite farfouiller plusieurs fois dans la librairie Cinédoc qui était située passage Jouffroy à Paris, à côté du musée Grévin, et qui proposait, outre des ouvrages et des revues sur le cinéma, quantité d’affiches, photos de tournage et cartes postales… d’où provient entre autres cette photo du Grand sommeil.

  • La Belle et la Bête

C’est dans cette même librairie que j’avais trouvé nombre d’affiches de films, la plupart des affiches néerlandaises (je ne sais pas pourquoi). Je ne les ai pas toutes conservées, mais l’une de mes préférées reste cette affiche du film de Cocteau, avec Jean Marais et Josette Day, que j’ai fait depuis ré-encadrer.

On y retrouve la fameuse rose issue du conte – et que réutilisera Disney – et si je fais une entorse à ce que j’ai indiqué en introduction et m’intéresse brièvement à la composition, on retrouve sur cette affiche un élément fréquent, avec l’homme qui littéralement surplombe / domine la femme, cette dernière en posture de fragilité ou d’évanouissement, dans une position qui donnerait un torticolis à tout être humain normalement constitué…

  • Gone with the wind

Même composition pour cette affiche d’Autant en emporte le vent, qu’une amie m’avait offert dans une taille absolument gigantesque (si l’on mesure avec les images précédentes, je dirais que l’affiche faisait au moins deux Charlot et demi, soit environ 2m X 1,5m).

Pour les besoins de la photo, j’ai quelque peu tronqué la partie droite de l’affiche et le nom d’une des comédiennes, Olivia de Havilland, qui incarne cependant mon personnage préféré, avec celui de Clark Gable.

La version « géante » de cette affiche a d’abord trôné dans l’une de mes chambres d’étudiantes – il n’y avait quasiment pas de place pour autre chose. Puis dans l’une des pièces de mon appartement. Enfin, pour être un peu plus raisonnable sans forcément y renoncer, je lui ai trouvé une version « miniature » et j’ai roulé et rangé la grande soeur dans un placard.

  • It’s a wonderful life

Pour cette dernière image de couple, j’ai choisi cette affiche du film de Frank Capra, en français La Vie est belle.

J’ai toujours trouvé l’argument de ce film incroyable : un homme au bord du suicide reçoit la visite d’un ange qui lui fait découvrir ce qu’aurait été son environnement proche s’il n’avait pas existé, lui redonnant ainsi goût à la vie.

Sur ma photo vous pouvez voir en reflet comme cette affiche fait pendant à l’affiche de Charlot.

Je n’ai pas revu ce film depuis longtemps, mais je me souviens que dans un épisode de Friends, Monica le conseille à Phoebe, et l’affiche, il me semble, apparaît également dans le décor.

Ce serait d’ailleurs intéressant que quelqu’un se penche sur les références cinématographiques dans les séries télévisées, en particulier dans Friends, qui en abonde (la chambre de Joey étant, entre autres, tapissée d’affiches de cinéma).

Deux hommes, une femme

Attention, rien de tendancieux dans cette formulation. Il y a simplement chez moi, encadrées de manière rigoureusement similaire, deux photographies de cinéma.

  • Jules et Jim

La première est issue du film Jules et Jim, avec la fameuse course de Jeanne Moreau, Oskar Werner et Henri Serre sur le pont.

  • Fenêtre sur cour

La seconde est une photographie de tournage de Fenêtre sur cour où figurent James Stewart, Grace Kelly et Alfred Hitchcock.

Retour aux sources

Enfin pour la dernière des dix images, je vous propose un petit retour aux origines du cinéma :

avec cette affiche du Voyage dans la Lune de Georges Méliès. J’avais trouvé celle-ci lors d’une de mes nombreuses visites à la Cinémathèque, ce qui me donne une transition toute trouvée avec le prochain article cinéphile, dans lequel je reviendrai, entre autres, sur ma dernière visite à la Cinémathèque française.

D’ici là je vous souhaite une excellente fin d’été et je vous dis à très bientôt sur Cinephiledoc !

En compagnie de Sir Ridley

Pour alterner les évocations cinéphiles entre cinéma muet et parlant, entre Hollywood et films français, j’ai choisi pour ce nouvel article de convoquer un réalisateur qui fait partie de mes cinéastes contemporains préférés.

Le titre étant sans ambiguïtés aucunes, je veux évidemment parler de Ridley Scott. J’ai loin d’avoir une connaissance exhaustive et approfondie du cinéma de Ridley Scott, qui me donne souvent l’impression d’exceller dans tous les genres, mais c’est l’un des réalisateurs pour lesquels, lorsque j’entends parler d’une sortie à venir, mes antennes de cinéphiles se dressent.

Gage Skidmore, CC BY-SA 3.0 <https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0>, via Wikimedia Commons

L’ouvrage qui est à l’origine de cet article, et que je vous présenterai un peu plus bas, m’a permis de faire le point sur la filmographie de Sir Ridley, de retrouver des éléments plus que familiers, et de me dire aussi que j’avais encore quelques confusions à éclaircir et quelques belles découvertes à faire.

Filmographie

Dans le livre consacré à une rétrospective de Ridley Scott, la filmographie apparaît tout à la fin, juste avant les remerciements de l’auteur et les sources. Mais c’est la rubrique que j’ai consultée en premier, histoire de faire un petit point sur l’état de mes connaissances, qui peuvent se résumer ainsi, avec des catégories relativement mouvantes :

  1. les vus, vus, vus et revus : Gladiator, Kingdom of heaven (à un détail près), Robin des Bois, Seul sur Mars
  2. les piliers : Alien, Blade Runner (et les 4 films de la catégories précédente)
  3. les vus une ou deux fois et qu’il faudrait revoir : Les Duellistes, Exodus, The Last Duel (c’est bien historique tout ça)
  4. je l’ai vu une fois et cela me suffit… 1492: Christophe Colomb
  5. ceux qui sont sur ma pile « à voir » : Thelma & Louise, Hannibal, American gangster, House of Gucci
  6. et puis tous les autres…

Mon affection pour le cinéma de Ridley Scott est fluctuante, et ne lui est pas toujours acquise, mais une chose est sûre : il ne m’a jamais laissée indifférente.

Je m’arrange toujours pour aller voir ses films au cinéma – même si certains de ses univers me sont plus familiers que d’autres – mais immanquablement, je vais avoir des trous dans la raquette. À raison de 4 films par décennie, peut-on parler d’un réalisateur prolixe ou méticuleux ? Ou les deux à la fois ?

Maximus, Maximus, Maximus

Le premier souvenir, ce n’est ni Blade Runner, ni Alien.

C’est Gladiator en cours de latin en classe de troisième. Je ne suis pas sûre que l’enseignante avait payé les droits (tiens là c’est la prof doc qui parle) mais c’était encore sur VHS, c’est une certitude.

Gladiator a enraciné en moi un goût très prononcé pour les films historiques et pour Russell Crowe, et a fait se manifester dans mon cerveau une presque vérité : les films de Ridley Scott étaient forcément avec Russell Crowe. Jusqu’en 2010 et le refroidissement de leurs relations, j’avais presque bon…

Mais c’est aussi pour cette raison que, dans ma tête, pendant un petit moment, Master & Commander de Peter Weir et Noé de Darren Aronofsky, avaient été réalisés par Ridley Scott.

Russell Crowe a longtemps fait partie des acteurs (hollywoodiens) pour lesquels j’avais le plus d’admiration, et si je mets hollywoodiens entre parenthèses, c’est parce que je lui adjoins Leonardo di Caprio et les britanniques Gary Oldman et Alan Rickman.

Des acteurs caméléons, capables de prendre 20 kilos pour un rôle et de les perdre juste derrière pour un autre, capables de se métamorphoser, devenant tour à tour gladiateur de l’empire romain, génie des maths schizophrène ou encore capitaine de vaisseau engagé dans les guerres napoléoniennes.

J’ai vu Gladiator un nombre incalculable de fois, je suis capable de scander la musique de la scène de bataille, de réciter un bon nombre de répliques de mémoire, et ma vision de l’histoire romaine est très certainement influencée par la reconstitution que nous en offre Ridley Scott.

Il est donc naturel que les films de Ridley Scott vers lesquels je me tourne le plus naturellement sont ses films historiques : le deuxième de ses films que j’ai visionné à haute dose est Kingdom of Heaven (même si je me suis rendue compte, grâce à mes lectures, que je n’en avais jamais vu la version Director’s cut).

Viennent ensuite :

  • Robin des bois (que j’aime malgré tout ce qu’on peut en dire, et en dépit de la scène de bataille finale*),
  • Les Duellistes et The Last Duel qui forment dans ma tête une symétrie parfaite,
  • Exodus, qui est bien lointain dans mon souvenir et que je croyais même ne pas avoir vu
  • et 1492 : Christophe Colomb, que je garde en tête même s’il ne fait pas du tout partie de mes préférés…

*de toute façon je ne peux pas m’empêcher de voir un film consacré à la figure de Robin des bois, et je n’arrive pas à décider, entre Errol Flynn, Kevin Costner, Russell Crowe ou le renard de Disney, lequel a ma préférence…

Une pincée de SF et d’espace…

Un autre versant du cinéma de Ridley Scott que j’ai découvert bien plus tardivement est celui de la science-fiction, avec Blade Runner et Alien, et avec beaucoup plus récemment Seul sur Mars.

Si j’arrive à reconnaître ce que les deux premiers ont de fondamental pour le cinéma de science-fiction, et si je les ai vus tous les deux plusieurs fois, ce n’est pas cette partie de l’univers Scott qui me fait aller au cinéma. J’ai vu les 3 premiers de la saga Alien, je n’ai vu ni Prometheus, ni Alien : Covenant.

Quant à Blade Runner : 2049 réalisé par Denis Villeneuve et produit par Ridley Scott, il m’a laissé beaucoup moins de souvenirs que son illustre parent.

Parmi ce pan de l’univers, le film que j’apprécie le plus c’est Seul sur Mars, qui rentre dans ma catégorie des « vus, vus, vus et revus », mais ce n’est pas tant pour sa thématique – quoique le thème de la survie en solitaire me parle bien – que pour l’humour dont fait preuve le scénario.

Ridley Scott : rétrospective

C’est avec toutes ces images en tête, celles obsédantes de Maximus, celles dépaysantes autour de Jérusalem, celles terrifiantes d’un vaisseau spatial bientôt dévasté ou celles désertiques de la planète rouge, que je me suis dans l’ouvrage qui m’intéresse aujourd’hui.

Il s’agit, en toute sobriété, d’un livre de Ian Nathan publié en octobre 2021 aux éditions Gründ – la sortie du livre était contemporaine de la sortie en France sur les écrans de The Last Duel et de House of GucciRidley Scott : rétrospective.

C’est un beau livre, qui offre un panorama tout à fait satisfaisant et agréable du cinéma de Ridley Scott, mais qui nous donne aussi un aperçu humain du cinéaste.

Ce qui fait que le livre est plus qu’un beau livre, ce qui le rend beaucoup moins impersonnel que le premier ouvrage venu sur tel ou tel réalisateur, c’est l’intervention régulière de l’auteur. Ian Nathan ne se contente pas de présenter et d’analyser la filmographie de Ridley Scott, il raconte Ridley Scott.

Il évoque non seulement sa biographie, son parcours – ce qui pousse encore un homme qui a maintenant 84 ans à continuer à faire des films tous plus étourdissants les uns que les autres – mais aussi les tournages et les interviews.

On y découvre un cinéaste méticuleux et obsessionnel à la Stanley Kubrick et un amoureux du cinéma qui aime tester les journalistes en entretien, en faisant mine de ne pas se souvenir de tel ou tel acteur ou de tel ou tel réalisateur.

C’est en le lisant, en lisant combien pouvait être épique rien que le tournage d’un film de Ridley Scott, que j’ai eu envie de voir les autres films : enfin découvrir Thelma & Louise, enfin essayer de revoir 1492 : Christophe Colomb (même si je ne parviens pas, certainement, à l’apprécier à sa juste valeur), enfin voir House of Gucci.

Lorsque l’on retourne le livre et que l’on s’attarde sur la quatrième de couverture, on voit les autres cinéastes qui ont arrêté le regard de Ian Nathan : Guillermo del Toro, Wes Anderson, Quentin Tarantino… tous ces noms, avec Ridley Scott, que l’on associe à une identité visuelle bien marquée et à une rare minutie, des cinéastes de l’obsession.

Dans les dernières pages du livre, Ian Nathan m’a rappelé cette promesse avortée de Kubrick et non tenue par Spielberg : ce Napoléon tellement fantasmé pour lequel Kubrick avait accumulé les notes, les idées de costumes et une documentation gigantesque.

Je guette ce Napoléon depuis des années, je l’aperçois de temps à autre dans tel ou tel ouvrage de cinéma, comme une mention, une petite note de bas de page, et cependant, pour une fois, le mirage semble prendre des contours un peu plus nets qu’à l’accoutumée : la fin du dernier chapitre du livre évoque un tournage début 2022 (en Angleterre et à Malte), l’article consacré à Ridley Scott sur Wikipédia annonce une sortie en 2023, certes directement sur Apple TV mais quand même…

Croisons les doigts !

Tout le monde veut être Cary Grant…

Pour ce premier compte-rendu de lecture de 2022, j’ai décidé de reprendre une structure déjà éprouvée sur ce site : un acteur / un cinéaste / un ou des films.

C’est cette forme que j’ai utilisée pour mon article cinéphile de septembre dernier, avec Romy Schneider et Claude Sautet, mais aussi l’article de mai 2021 où j’évoquais Sean Connery et l’univers James Bond.

Cette structure, je ne la trouve pas forcément naturellement, et je ne l’utilise pas systématiquement.

Écrire l’article

Pour certains articles, la forme est intuitive, je vais pouvoir les préparer longtemps à l’avance, utiliser le prétexte d’une date anniversaire, d’un événement, d’un déclic (c’est ce qui sera le cas pour le prochain article du mois de mars, que j’ai déjà bien en tête).

Pour d’autres, même après avoir lu le livre auquel est consacré le plus gros de l’article, je rame. Je cogite, je tourne les idées dans ma tête, je me demande comment fournir au compte-rendu de lecture proprement dit l’écrin de l’article.

En effet, pour moi, il ne s’agit pas (seulement) de faire un compte-rendu exhaustif de ma lecture. Il s’agit de convoquer tout un contexte cinéphile pour l’accompagner.

Je laisse le livre à proximité – c’est aussi la raison pour laquelle j’évite d’utiliser des versions numériques de ce livre – pour pouvoir le feuilleter à nouveau. Je le reprends, je tourne autour, j’en feuillette d’autres, je procrastine et je grogne.

Et puis, généralement, je trouve enfin l’idée par hasard, l’idée qui donnera à l’article son fil conducteur, en tous les cas pour moi.

À l’origine, feuilleter le catalogue Gallimard

Revenons en arrière, à ce qui m’a poussé à choisir l’ouvrage que j’évoquerai dans un instant.

Je feuilletais les brochures que publie régulièrement la maison d’édition Gallimard, et qu’elle envoie aux établissements scolaires, pour indiquer les nouvelles sorties. Généralement, j’y glane quelques idées d’achats pour le CDI, mais pas la majorité, loin de là.

Au milieu des romans, dans la brochure que je tenais entre les mains, je trouve ce titre : Être Cary Grant, de Martine Reid, publié en avril 2021. Pas dans les pages consacrées aux essais, mais au milieu des romans.

Je vois la couverture, avec le visage familier et sa fossette. Je fais appel à ma mémoire et je fouille dans mes rayonnages… mis à part La Vie que tu t’étais imaginée de Nelly Allard, je n’ai pas souvenir d’avoir lu beaucoup de romans publiés chez Gallimard et consacré à un acteur.

Flammarion, avec sa pépite sur Greta Garbo, Un renoncement, de René de Ceccatty, me semble plus coutumier du fait.

Va donc pour Être Cary Grant.

Replonger dans des souvenirs cinéphiles

Cary Grant fait partie des acteurs que j’ai côtoyés au moment où je commençais à construire, tout doucement, mon univers cinématographique, de manière consciente. Je ne parle pas des premiers films vus étant enfant, mais de ceux que j’ai progressivement choisis.

Vers 15-16 ans donc, après le déclic « Truffaut », j’ai commencé à regarder les cycles du Cinéma de minuit, enregistrés sur cassettes. J’ai aussi choisi, pendant les vacances scolaires, quelques films à aller voir dans les cinémas parisiens (Grand action, Action école, Action Christine et le Championnet).

Ces choix s’appuyaient alors sur ce que je considérais comme une bible : les Chroniques du cinéma

C’est avec ce livre que je découvrais le parcours de Lauren Bacall et d’Humphrey Bogart, de Bette Davis, de Katharine Hepburn et de Spencer Tracy, de Vivien Leigh, de Grace Kelly.

J’ai donc pu découvrir dans les cinémas parisiens L’Impossible Mr Bébé, qui réunit Katharine Hepburn et Cary Grant, puis plus tard, en DVD ou à la télévision : La Dame du vendredi, Sylvia Scarlett, Indiscrétions, Elle et lui ou encore Charade, beaucoup plus tard.

Je retrouvais aussi l’image lisse et très bien mise en scène de Cary Grant dans un ouvrage acheté à l’époque :

Cary Grant : les images d’une vie, de Yann-Brice Dherbier, publié en 2009 chez YB Editions, une maison d’éditions qui proposait au lecteur pour différentes stars hollywoodiennes ces « images d’une vie », sous un format particulièrement soigné.

Retour au présent

C’est en ayant ces souvenirs en tête que j’avais posé le livre de Martine Reid sur ma bibliothèque, à l’été 2021. Il était en bonne place sur ma pile de lecture, mais je retardais le moment de venir à sa rencontre.

Puis, en novembre dernier, je tombe sur un documentaire Arte, disponible en replay jusqu’au 11 février 2022 : Cary Grant, de l’autre côté du miroirqui donne la part belle à cette citation émouvante de l’acteur : « Tout le monde voudrait être Cary Grant. Moi aussi, je veux être Cary Grant ! »

J’y découvre de nouvelles facettes du personnage : l’enfance, les mariages successifs, la psychothérapie sous LSD…

J’ai envie de confronter à ce documentaire le roman biographique de Martine Reid. Je me plonge donc dans cette lecture.

Quatrième de couverture

La quatrième de couverture de Être Cary Grant part de cette même citation, si troublante :

« Tout le monde veut être Cary Grant. Même moi, je veux être Cary Grant. »

Des comédies romantiques de l’âge d’or du cinéma américain aux chefs-d’œuvre d’Alfred Hitchcock, Cary Grant (1904-1986) demeure l’une des stars d’Hollywood les plus célèbres au monde.
Gentleman flegmatique, séducteur caustique, il a réussi grâce à un physique exceptionnel à incarner « l’homme idéal », fantasme de millions de spectatrices et spectateurs. Derrière cette belle image de cinéma se cache pourtant un être tourmenté, dont toute l’existence est fondée sur le leurre.

Sur cette quatrième de couverture, le mot leurre est en italique. C’est ce résumé qui a retenu mon attention, et qui m’a donné envie d’aller plus loin : Cary Grant n’y est pas seulement une star hollywoodienne, ou un être complexe comme le présente le documentaire produit par Arte.

C’est un personnage de roman à part entière, une incarnation qu’il a méticuleusement construite lui-même, avec des fêlures que l’on entrevoit à intervalles plus ou moins réguliers.

C’est tout cela que veut nous faire ressentir Martine Reid, en choisissant comme titre non pas simplement Cary Grant, mais Être Cary Grant.

L’homme dont on va entendre l’histoire a deux noms. Ceux-ci désignent dans le temps deux vies qui n’ont pas grand-chose à voir l’une avec l’autre. Du fait de ces deux noms, tout est irrémédiablement double chez lui : il est né deux fois, dans deux lieux distincts ; il est mort deux fois aussi, mais de façon assez dissemblable, la première mort, on va le voir, apparaissant aussi interminable que la deuxième est soudaine.

Cette construction opérée par les studios de cinéma et par l’acteur lui-même s’est faite au détriment d’un nom, Archibald Leach, d’une enfance et d’un milieu, d’une sexualité et d’une identité. Pour parvenir à incarner Cary Grant, il faut se débarrasser des oripeaux Archie Leach, quitte à les voir resurgir par inadvertance.

Non seulement, Martine Reid réussit à faire de Cary Grant ce personnage de roman qu’il était déjà de son vivant, mais elle réussit aussi à nous restituer admirablement l’ambiance du Hollywood de ces années-là, la période d’activité de l’acteur s’étalant de 1932 à 1966.

L’ouvrage ne s’ouvre pas, comme on pourrait le croire, par la citation que je viens d’en extraire. Il s’ouvre avec une scène beaucoup plus familière pour le lecteur et le spectateur : il s’ouvre sur La Mort aux trousses.

Spectateur d’Hitchcock : James Stewart ou Cary Grant ?

Parmi les films que j’ai cités plus haut de la filmographie de Cary Grant, il y en a que j’ai volontairement omis.

Si je voulais consacrer cet article à l’acteur hollywoodien, c’est aussi pour le prétexte qu’il me donnait de parler à nouveau du cinéma d’Alfred Hitchcock, que j’évoque déjà assez régulièrement sur ce site, pour parler de ses intrigues, de ses actrices fétiches, de ses storyboards, de sa cuisine, de ses itinéraires… mais pas encore de ses acteurs.

Cary Grant est à égalité avec James Stewart dans le cinéma d’Hitchcock. Et pour moi il ne s’agit pas de dire si l’un est meilleur que l’autre.

  • James Stewart : période hitchcockienne 1948-1958. Quatre films : La Corde, Fenêtre sur cour, L’Homme qui en savait trop, Sueurs froides.
  • Cary Grant : période hitchcockienne 1941-1959. Quatre films : Soupçons, Les Enchaînés, La Main au collet, La Mort aux trousses.

Ce que l’on peut comparer, ce sont les personnages qu’ils incarnent.

Concernant James Stewart, nous sommes spectateurs avec lui. Nous observons, nous sommes voyeurs de l’action, nous assistons à l’intrigue, nous la voyons se construire sous ses yeux comme sous les nôtres. Nous avons le vertige avec lui.

Concernant Cary Grant, notre rôle est moins celui d’un voyeur que d’un témoin, voire d’un complice. Nous partageons l’action.

C’est du moins ce que je ressens, à titre personnel, lorsque je revois les films d’Hitchcock avec ces deux acteurs.

Et qu’ai-je fait sitôt ma lecture de la biographie de Martine Reid achevée ? Évidemment, j’ai revu La Mort aux trousses.

Revoir La Mort aux trousses

Il y a deux films d’Hitchcock que j’ai vus et revus et que je connais jusqu’au bout des ongles. Fenêtre sur cour et La Mort aux trousses.

Lorsque je les revois, je cède soit à l’envie du huis-clos, soit à l’envie du voyage.

Pour le deuxième, ce sont les mêmes images qui me reviennent en tête :

  1. un générique qui dessine peu à peu les immeubles new-yorkais et Hitchcock qui rate son bus
  2. une soirée et une course-poursuite alcoolisées avec Cary Grant qui finit au poste de police de Glen Cove
  3. Jessie Royce Landis en mère tellement insupportable « Alors messieurs, vous voulez vraiment tuer mon grand garçon ? »
  4. une visite aux Nations Unies
  5. un repas sans dessert avec Eva Marie Saint mais avec une truite un peu trop saumonée dans le Chicago Express
  6. la fameuse scène avec l’avion qui prend le contrepied de tous les rendez-vous cinématographiques (de jour, au milieu de nulle part, au soleil)
  7. la main de James Mason sur le cou d’Eva Marie Saint à la soirée d’enchères
  8. le mont Rushmore et le pistolet chargé à blanc (avec le petit garçon à l’arrière-plan qui se bouche les oreilles)
  9. la maison de James Mason, inspirée de Frank Lloyd Wright
  10. la poursuite sur le mont Rushmore et la scène finale

Mais si vous voulez voir ou revoir La Mort aux trousses, c’est tout de même Blow Up qui en propose le meilleur visionnage en accéléré :

Bref, l’ouvrage de Martine Reid m’a permis de revoir La Mort aux trousses (en vitesse normale), m’a fait rouvrir L’Amérique évanouie de Sébastien Clerget – qui nous fait propose quelques itinéraires cinématographiques à travers les États-Unis – et La Sauce était presque parfaite, un superbe recueil de recettes hitchcockiennes.

De quoi donner envie, sinon d’être Cary Grant, du moins de lire Être Cary Grant, non ?

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