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Notes de lecture sur l’intelligence artificielle (épisode 3)

Voici un troisième épisode de mes notes de lecture sur l’intelligence artificielle, où je commence à cerner l’objectif de ces notes :

avoir une vision d’ensemble sur la question et qui me permette de proposer ou de concevoir des séances pédagogiques sur l’IA, aussi bien dans des disciplines associées aux sciences pures (SNT, enseignement scientifique, mathématiques) que dans les sciences humaines (SES, éco-gestion, EMC, HGGSP, HLP…).

Ce troisième épisode abordera donc la question sous l’angle des sciences humaines avec un premier focus sur les aspects économiques et géopolitiques de l’intelligence artificielle.

Dans cet épisode :

  1. les ouvrages Intelligence artificielle, l’affaire de tous et Géopolitique de l’intelligence artificielle
  2. revue de presse avec les numéros de la revue Le Monde diplomatique n° 829 et du Courrier international n°1685, 1695 et 1704
  3. une sélection de ressources

Intelligence artificielle, l’affaire de tous : de la science au business, Thierry Bouron

Il s’agit donc pour moi d’un quatrième ouvrage sur l’intelligence artificielle, après une première lecture à coloration davantage scientifique, et deux lectures de vulgarisation qui tendaient à proposer une vision d’ensemble de la question.

Cet ouvrage a été publié en juillet 2020 aux éditions Pearson et apporte un éclairage davantage professionnel : économie, business, management et marketing. 

Cela se remarque dans les exemples donnés et dès l’introduction, qui revient sur la révolution induite par les intelligences artificielles à la fois dans les différents secteurs économiques mais aussi dans les formations professionnelles.

Ainsi l’auteur rappelle que la Chine a été la première à expérimenter des cours sur l’intelligence artificielle dans une quarantaine de lycées. 

La coloration économique de l’ouvrage est visible aussi dans sa construction, puisqu’en introduction l’auteur souligne les impacts économiques de l’IA, et comment mettre en place une stratégie d’entreprise en en tenant compte.

Deux chapitres rappelant l’essentiel par des exemples et une base historique et scientifique. 

Le chapitre 1 « L’observation d’IA » fait un top 10 des IA impressionnantes, et explique en quoi elles le sont : une IA capable de créer un morceau de musique ou un texte littéraire, les robots Kiva d’Amazon capables d’aller chercher les produits dans les étagères où ils sont stockés, les boutiques Go store, AlphaGo, l’assistant Google qui prend un rendez-vous à notre place. 

Le chapitre 2 « L’IA est plurielle » fait un rappel historique de l’IA qui était déjà abordé dans les ouvrages des précédentes notes de lecture : test de Turing, conférence de Dartmouth, hivers de l’IA. Il revient également sur les notions de machine learning, deep learning et sur les différents courants de pensées liés à l’IA.

  • Le business de l’intelligence artificielle : innovations, investissements économiques et politiques

Dans le chapitre 3 « Un business démesuré », l’auteur s’intéresse aux évolutions induites par l’IA dans l’entreprise, avec le phénomène d’innovations disruptives (ruptures qui peuvent provenir de la création d’un nouveau service, d’un élargissement de l’accessibilité, d’un nouveau modèle de business ou de nouveaux systèmes opératoires). 

Pour ces derniers est convoqué l’exemple du système de recommandation de produits par Amazon. 

L’auteur revient ensuite sur les perspectives de marché de l’IA (impact sur la croissance mondiale par une augmentation de la productivité, la proposition de nouveaux services et un gain de temps), sur les investissements en IA (notamment distribution de contenus sur les réseaux sociaux) et sur les politiques gouvernementales. Pour la France : rapport Villani publié en 2018, prévision d’investir 1,5 Milliards sur cinq ans, sélection de 4 pôles de recherche régionaux. 

Dans le domaine de l’industrie. Les GAFAM ont investi dans l’IA : Alphabet est le premier acteur dans l’acquisition de sociétés d’IA. 

Définition d’une IA COMPAGNY

  1. Stratégie d’acquisition de données
  2. Regroupement et centralisation des données dans des entrepôts
  3. Mise en place de procédures contrôlant le respect des données privées
  4. Automatisation des procédures
  5. Création de nouveaux métiers autour des data sciences

Description des différentes stratégies des GAFAM en IA. Google : agents conversationnels. Facebook : recherche et analyse semantique de textes, images et vidéos (détection de contenus / de faux comptes). Amazon : robots. Apple : Siri. 

Pour soutenir ces évolutions : développement des compétences et des formations universitaires dans ce domaine.

  • Risques de l’intelligence artificielle dans le secteur économique

Dans le chapitre 4, « Les risques effectifs », l’auteur revient sur plusieurs risques soulevés par l’IA. La question des systèmes autonomes permet de traiter le domaine de l’armement et de la défense militaire. 

La partie la plus éclairante concerne les risques propres aux machines apprenantes, notamment à travers la question des corrélations de données (voir l’étude mentionnée de Tyler Vigen : Spurious Correlations et celle sur les fausses corrélations dans un contexte politique : Hack your way to scientific glory) et celle de la généralisation induite par un jeu de données (un outil de recrutement qui élimine certains profils parce qu’ils sont au départ peu représentés). 

Les autres risques mentionnés sont les usages abusifs (exemple de Compas) et les risques liés aux données personnelles avec l’exemple de l’affaire Cambridge Analytica. 

Le dernier risque évoqué est l’impact de l’IA sur l’emploi.

  • Fonctionnement de l’intelligence artificielle

Les 3 chapitres suivants reviennent sur le fonctionnement de l’intelligence artificielle, déjà abordé dans d’autres ouvrages à coloration plus scientifique : « machines apprenantes », « réseaux de neurones artificiels » et « systèmes autonomes » avec des apartés mathématiques pour creuser la question. 

J’ai quelque peu survolé ces chapitres parce qu’ils sont un peu trop mathématiques pour moi, même si dans celui consacré aux systèmes autonomes, une sous-partie « Simulation multi-agents » a retenu mon attention. L’auteur y étudie le renforcement des comportements de consommateurs via l’IA, illustré par le schéma suivant :

Il propose également un jeu de rôles sur les comportements de consommateur, pour manipuler des agents intelligents et se mettre dans la peau d’une IA.

Ce jeu pourrait éventuellement être réutilisé en SNT ou en éco-gestion. Certaines indications sur le nombre de cartes et leur répartition ne sont pas très claires, aussi j’ai essayé de l’adapter de mon mieux dans un jeu que j’ai intégré à une séance de SNT, et que je compte tester prochainement. 

Enfin le dernier chapitre de l’ouvrage « Études de cas » revient sur différentes applications d’intelligence artificielle dont Internet et les agents conversationnels.

Concernant Internet, sont abordés la recommandation et le ciblage : de quelle manière Amazon influence les achats par le système de recommandation personnalisée (un quart des achats sur le site), la suggestion de vidéos sur YouTube et Netflix, la publicité ciblée via les cookies et l’historique de navigation.

Concernant les agents conversationnels, l’auteur fait un rappel du test de Turing, et étudie quelques applications : Siri, Alexa, les chatbots et les enceintes connectées.

En conclusion l’auteur rappelle l’importance de se tenir au courant de l’actualité dans le domaine de l’intelligence artificielle, pour le secteur économique mais cela peut être élargi. Il fait un récapitulatif par un exercice de questions / réponses des différents points abordés dans l’ouvrage.

Mon avis sur l’ouvrage :

Le plus : un véritable éclairage thématique de l’intelligence artificielle. J’ai certes laissé de côté les aspects les plus mathématiques, mais l’ensemble du propos est très éclairant, et peut interroger même sur des domaines comme différents secteurs économiques (immobilier, ressources humaines, entreprise) ou les formations professionnelles, ce qui peut permettre de lier aussi la thématique aux filières d’études des élèves et à leur choix d’orientation.

Par ailleurs, l’auteur a une posture véritablement pédagogique, avec des moments de questions / réponses qui peuvent être réutilisés en classe.


Géopolitique de l’intelligence artificielle, Pascal Boniface

Cet ouvrage a été publié aux éditions Eyrolles en janvier 2021, et il fait partie de la bibliographie très prolifique de Pascal Boniface, spécialiste de géopolitique.

On lui doit des ouvrages plusieurs fois réédités sur les relations internationales (Comprendre le monde) et qui relient la géopolitique à certaines thématiques (le sport, les jeux olympiques, le Covid…).

L’ouvrage consacré à l’intelligence artificielle se décline en sept chapitres, après une introduction où l’auteur rappelle son parcours littéraire malgré son intérêt pour la question, ce qui sera éclairant pour la suite de l’ouvrage.

Le premier chapitre « Intelligence artificielle, histoire et définition » revient de manière succincte sur des éléments déjà abordés dans les ouvrages abordés précédemment : le test de Turing, la conférence de Dartmouth, les hivers de l’IA, deep learning et machine learning, traitement des données.

Un encart revient sur le rôle de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency) créée en 1958 qui finance aux États-Unis la recherche et le développement dans le domaine des technologies militaires, avec un département dédié à l’innovation et à l’information créé en 2005.

Dans le deuxième chapitre « Corne d’abondance ou machine à exclure ? », l’auteur revient sur la vision que la société a généralement des innovations techniques et des craintes qu’elles suscitent, largement relayées par Pascal Boniface (inégalités, chômage, accès à la santé et transhumanisme, relations des états avec les géants du numérique).

Le troisième chapitre « Les GAFAM vont-ils tuer l’État ? » accentue ces craintes, en faisant notamment un tableau comparatif entre les fortunes des dirigeants et le PIB de certains pays (Amazon / Bezos en 2020 = Qatar en 2019, Elon Musk = Maroc).

Il étudie de quelle manière ces dirigeants s’emparent de domaines jusqu’ici régaliens (la conquête spatiale pour Musk) et affaiblissent les institutions, et leurs arrangements avec la fiscalité, malgré les tentatives de régulation étatiques ou inter-étatiques.

Dans le quatrième chapitre, « Printemps des libertés ou hiver totalitaire ? », Pascal Boniface revient sur le risque d’une surveillance absolue induite par le Big data, en s’appuyant notamment sur l’affaire Cambridge Analytica.

Pour contrebalancer, il rappelle également le rôle des réseaux sociaux notamment dans les mobilisations populaires (printemps arabe, mouvement #MeToo), et relativise le lien entre réseaux sociaux et bulle de filtres, rappelant qu’un lecteur de Libération ira rarement lire Le Figaro.

Le point le plus intéressant du chapitre est l’encart consacré au contrôle social en Chine, et à la façon dont les citoyens chinois sont classés, de AAA (citoyen exemplaire) à D (citoyen malhonnête).

Le chapitre 5 revient d’ailleurs sur « Le duel Chine / États-Unis ». En effet, la Chine concentre ses dépenses non dans le domaine militaire, mais dans le domaine technologique, surtout depuis qu’elle a connu son « moment Spoutnik » avec la défaite de son champion contre AlphaGo.

Elle conjugue depuis croissance économique, montée en puissance technologique et patriotisme, ce qui lui donne un avantage considérable par rapport aux GAFAM, dont les dirigeants n’ont pas les mêmes relations aux institutions gouvernementales. Elle dépasse les États-Unis en publications scientifiques et en dépôt de brevets. Le chapitre revient sur les tentatives américaines pour juguler certaines entreprises chinoises (Huawei et plus récemment l’application TikTok).

Face aux deux géants, le chapitre 6 « Quo vadis, Europa ? » rappelle le retard européen en matière d’investissements. Le RGPD adopté en 2016 peut-être perçu à la fois comme un frein et comme un modèle attractif. Une stratégie européenne a été proposée en 2018 pour rattraper ce retard, en finançant la recherche et l’innovation.

Le dernier chapitre « La France dépassée ? » revient sur les initiatives françaises en matière d’informatique et d’intelligence artificielle :

  • 1966 : Plan calcul et création de l’IRIA (Institut de Recherche, d’informatique et d’automatisme) ancienne INRIA
  • 2018 : lancement des quatre instituts interdisciplinaires de l’IA  (3IA)
  • 2019 : plan de 1.5 milliard d’euros d’investissement dans l’IA jusqu’en 2022 ; supercalculateur installé sur le plateau de Saclay
  • projet d’un cloud souverain et appels d’offres sur la protection des données

En 2019, un tableau recense les pays et régions du monde ayant déposé le plus de brevets IA dans le monde. Rang 1 : USA, rang 2 : Chine. La France arrive au rang 14.

Mon avis sur l’ouvrage :

L’ouvrage de Pascal Boniface était celui que je souhaite le plus lire dans la sélection que je m’étais faite sur la question, et c’est également ce qui m’avait attiré dans son introduction : le fait qu’il s’agisse d’un littéraire se questionnant sur une problématique scientifique.

Cependant, j’ai eu l’impression durant ma lecture que, malgré les éléments de définition du premier chapitre, il traite de l’intelligence artificielle quasiment exclusivement avec la perspective des géants du numérique, même en considérant les aspects qui y sont corrélées (contrôle social, traitement des données).

En gros, j’aurais lu ce livre en premier, il m’aurait servi de porte d’entrée. L’avoir lu en dernier m’a laissé quelque peu sur ma faim. Au lieu d’un auteur spécialiste de géopolitique qui s’intéresse à l’intelligence artificielle, j’aurais eu besoin (à titre personnelle) d’un spécialiste de l’intelligence artificielle qui s’intéresse à la géopolitique.

Revue de presse

Pour cette revue de presse, contrairement aux épisodes précédents, j’ai décidé de ne pas trop détaillé le contenu des périodiques concernés et de me concentrer sur ce que j’ai pu trouver de plus récent – hors quotidiens.

Le Monde diplomatique n°829

Je l’ai retenu parce qu’il propose un éclairage sur l’intelligence artificielle en Chine : «La Chine entravée dans la bataille de l’intelligence artificielle » (p.12-13).

La Chine a porté ce secteur comme priorité nationale dès 2017 et dispose de différents atouts : précurseur dans le paiement via smartphone, le recours aux robots dans les services publics, l’association étroite entre entreprises, chercheurs et administrations.

Elle bénéficie de travailleurs qualifiés et ses applications sont reconnues (TikTok, cloud d’Alibaba, chatbots, système de circulation automobile, reconnaissance faciale, service de robots taxis, générateur d’images).

Plusieurs freins viennent gêner ces progrès : la fuite des cerveaux chinois, le retard et le blocage des investissements notamment dans le secteur des semi-conducteurs (et du coup le risque de pénurie qu’ils suscitent), la mainmise de l’État, les sanctions des États-Unis à l’encontre de la Chine.

Un encart revient sur l’application TikTok et les pressions et initiatives pour l’interdire en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest.

Courrier international n°1685 (16-22 février 2023)

C’est le premier de l’année, pour ce périodique, à s’intéresser en Une à ChatGPT, avec un article publié dans The Sunday Times du 5 février. Il revient sur les « exploits » de l’outil depuis son lancement en novembre 2022, l’utilisation de ChatGPT par les étudiants britanniques (et les réactions des universités), par les employés pour rédiger des lettres de motivation, dans le milieu du journalisme ou de la programmation.

Le numéro de The Economist du 30 janvier propose lui un retour sur les centres de recherche privés et les entreprises qui ont favorisé la montée en puissance de l’intelligence artificielle, avec d’un côté les géants OpenAI, Amazon, Google et Meta, et de l’autre les organismes chinois financés par l’État comme la Beijing Academy of AI.

Un entretien publié dans le New York Times en décembre 2022 avec Yejin Choi, scientifique et informaticienne, revient enfin sur les idées reçues concernant l’intelligence artificielle.

Le dossier propose en outre :

  • une chronologie de la genèse de ChatGPT
  • une revue de presse revenant sur les réactions suscitées par l’outil (éducation, emploi, recherche, sécurité)
  • ses principaux exploits

Courrier international n°1695 (27 avril – 3 mai 2023)

Le dossier proposé dans ce numéro « Intelligence artificielle : fini de rire » est un peu plus conséquent et propose une vision plus pessimiste, étayée par des articles de la presse américaine, suisse et tchèque.

Il revient sur les risques suscités par le développement des modèles de langue : fuite d’informations, réponses biaisées, hameçonnage, tentatives d’arnaques, qui passent par l’injection dans l’outil de prompts (consignes) pour obtenir des informations personnelles de la part de l’internaute.  (MIT Technology Review)

Un extrait du Temps est consacré au double jeu d’Elon Musk en matière d’IA : signataire d’une pétition demandant une pause de la recherche tout en créant une start-up spécialisée sur la question.

Un entretien avec Niels Ackermann, photojournaliste, revient sur les prouesses des IA génératives dans la création d’images et l’utilisation de ces images et de deepfakes dans les médias. (Heidi news)

La revue de presse du dossier revient sur certaines mesures de régulation prises au moment où paraissait ce numéro : suspension de ChatGPT en Italie, censure en Chine.


Courrier international n°1704 (29 juin – 5 juillet 2023)

Il s’agit ici d’une controverse proposée sur une seule page : « IA : L’Europe fait-elle bien de légiférer ? » avec

  • côté POUR un article du Süddeutsche Zeitung (Allemagne) : publication du IA ACT le 14 juin par le Parlement européen avec l’accent mis sur la protection des données personnelles et le respect de la vie privée, ainsi que la lutte contre la désinformation ;
  • côté CONTRE un article de Rzeczpospolita (Pologne) : l’excès de réglementation européenne comme frein à l’essor économique et le fait pour l’Europe de rester à la traîne dans la course technologique.

En deux mots, d’un côté sécurité, de l’autre liberté.

Autres ressources

Espionnage et cinéma, espionnage au cinéma

Pour cet article de rentrée et ce nouveau compte-rendu de lecture cinéphile, je vais revenir sur une exposition de la Cinémathèque française qu’une fois n’est pas coutume, je n’ai pas pu visiter.

Il s’agissait de l’exposition organisée entre octobre 2022 et mai 2023 : « Top secret : cinéma et espionnage ». Généralement, ces expositions thématiques et transversales, propices aux associations d’idées et à la convocation des références cinématographiques les plus diverses font mes délices.

Cependant, cette fois-ci, l’occasion ne s’est tout simplement pas présentée. Néanmoins, j’avais vu sur la page dédiée à l’exposition un descriptif de son catalogue qui m’a pour le moins alléchée :

Sous la forme d’un abécédaire thématique, le livre interroge la relation entre le cinéma et l’espionnage, des années 1920 à aujourd’hui, en faisant appel à des spécialistes des deux univers.

J’ai pu feuilleter le catalogue et c’est cette forme d’abécédaire thématique, ainsi qu’une mise en page soignée et très largement illustrée qui m’a décidée à en faire la lecture, et globalement, je n’ai pas regretté le voyage.

Couverture

Je choisis à dessein le terme « couverture » qui m’amuse dans cet article précis pour sa polysémie. Voulant vérifier cette polysémie, j’ai cherché simplement le mot sur un moteur de recherche, et je me suis vue proposer tous les sites commerciaux vendant des plaids et autres couettes…

Un petit tour sur Wiktionnaire et je me suis davantage sentie dans mon élément :

  1. Grande pièce d’étoffe épaisse couvrant le lit, se plaçant au-dessus des draps.
  2. (Imprimerie) Première page d’un ouvrage imprimé.
  3. (Sens figuré) Ce qui sert à cacher ou à dissimuler.
  4. (Par extension) Fausse identité endossée ponctuellement par un agent secret ou un policier en mission d’infiltration.

Je ne donne ici que les définitions les plus significatives, puisque le Wiktionnaire en relève plus d’une vingtaine. Mais revenons à la deuxième d’entre elles.

Ce qui m’a happée (et ce qui avait attiré mon regard lorsque je voulais aller visiter cette exposition sans jamais réussir à bloquer une date pour le faire) c’est l’affiche de l’exposition, qui se décline sur la couverture du catalogue d’exposition :

Les deux silhouettes de Jean Dujardin dans OSS 117 et de Eva Marie Saint dans La Mort aux trousses avaient effectivement tout pour me séduire.

La quatrième de couverture m’a confortée dans mon choix : en effet, comme souvent avec les ouvrages proposés par la Cinémathèque française dans le cadre de ses expositions, le catalogue ne se réduit pas à une recension en images des objets et des films présentés.

Certes, voir l’exposition aurait pu mettre ma lecture en perspective. Mais le propos de l’ouvrage est suffisamment riche et évocateur pour rappeler cette exposition tout en laissant le lecteur cinéphile y injecter ses propres références cinématographiques.

La perspective de retrouver la filmographie d’Hitchcock aux côtés des films des franchises comme James Bond, Jason Bourne ou Mission impossible, de la série Le Bureau des légendes et quelques-unes des icônes du cinéma telles que Marlene Dietrich, Greta Garbo ou Hedy Lamarr a achevé de me convaincre.

Missions

Ce livre ressemble à la panoplie du parfait espion, et dès le sommaire, le lecteur aura l’impression de se retrouver dans l’atelier de Q, responsable de la division recherche et développement du MI6 dans la série des James Bond.

On y côtoie de manière hétéroclite et sous la forme promise de l’Abecedarium (pourquoi avoir choisi le terme latin ?) des rôles, des films, des personnages, des noms et des objets.

Alphabétiquement l’ouvrage nous conduit de A comme Argo à Z comme Zero dark thirty en passant par C comme Cicéron , F comme Farewell, ou M comme Mata Hari.

Numériquement, il s’ouvre en toute logique avec 007.

007 fonctionne comme le produit d’appel : le placer en premier est stratégiquement idéal, et il en remplit presque parfaitement la mission.

Le court texte de l’article, proposé par l’un des contributeurs de l’ouvrage, Léo Soesanto, est efficace et les pages suivantes reviennent en images (photos et affiches) sur quelques moments clés de la franchise.

À la suite de ces photos, le premier entretien de l’ouvrage, ce qui opère pour le lecteur un premier changement de rythme : c’est l’interview de Léa Seydoux, dernière James Bond girl en date.

Si l’un des objectifs affichés de l’exposition et du catalogue est de redonner toute leur place et leur valeur aux rôles que jouent les femmes dans l’espionnage, on aura rarement vu une interview plus contre-productive, tant elle est creuse et narcissique.

Heureusement, dès la page suivante, l’entretien avec le réalisateur Olivier Assayas relève à nouveau le niveau et le lecteur y retrouve son compte.

De manière générale, les contributeurs de l’ouvrage donnent un éclairage des plus passionnants à la question. Ils réussissent à intéresser, même lorsque l’on a pas (encore) vu les films qu’ils évoquent.

On peut les ranger en deux catégories : les professionnels du cinéma (acteurs et réalisateurs) et les cinéphiles professionnels (commissaires d’exposition, collaborateurs artistiques, auteurs et journalistes).

Les seconds vont se pencher sur certains films, certaines séries, et parmi eux, quatre ont retenu mon attention : Léo Soesanto que j’ai déjà mentionné et qui va proposer généralement sur une page le résumé d’un film et la plongée dans son univers ; Alexandra Midal et Mathieu Orléan, et Chloé Aeberhardt.

Les premiers vont donner un tour plus personnel à la question, et vont évoquer des souvenirs de tournage – voire pour certains des souvenirs tout court.

Le déguisement dans le déguisement

Le pari le plus réussi de l’ouvrage, c’est d’expliquer au lecteur cinéphile la manière dont espionnage et cinéma s’entrecroisent constamment.

Ainsi, si l’on songe évidemment au costume de l’espion, au rôle qu’il incarne, et au fait qu’il soit sous couverture, si l’on a en tête le smoking de James Bond et les postiches d’Ethan Hunt dans Mission Impossible, c’est à travers les objets, mais également à travers le film que l’ouvrage explore cette thématique…

Ou plutôt à travers les films, puisque l’une des entrées de l’Abecedarium est le nombre  et on y retrouve les films avec lesquels la Stasi formait ses agents à leurs différentes missions.

Parfois, avec une mise en abîme ingénieuse et vertigineuse, on ne parvient pas à démêler le faux du vrai, la réalité de la fiction – et les contributeurs ne le peuvent pas davantage.

À la lettre K comme Kaplan, le réalisateur Nicolas Saada nous raconte l’aventure qui lui est survenue lors d’un contrôle dans un aéroport, où un homonyme était recherché par la police.

L’occasion pour lui de convoquer avec virtuosité le personnage de George Kaplan / Roger Thornhill / Cary Grant / Archibald Leach dans La Mort aux trousses, les figures des doubles dans le cinéma d’Hitchcock, et de finir sur cette question quelque peu angoissante :

Et si ce Nicolas Saada était mon George Kaplan ? De qui suis-je le George Kaplan ? Affaire à suivre.

Spectateur espion

J’ai parcouru cet ouvrage avec une attention parfois quelque peu distraite, quand certains articles évoquaient des films, des séries ou des personnages qui ne m’évoquaient pas grand chose… mais souvent mon intérêt était à nouveau éveillé par l’article suivant.

L’article E comme Enigma rédigé par Alexandra Midal et qui venait faire s’entrelacer espionnage, intelligence artificielle et cinéma, avec ses références au film Imitation Game, et en toile de fond au moment de ma lecture la grève des scénaristes et des acteurs à Hollywood en raison de l’utilisation par les industries cinématographiques de l’intelligence artificielle, m’a hameçonnée.

L’article H comme Hitchcock m’a définitivement emportée. Pas seulement parce qu’il s’agissait d’Hitchcock, pas seulement pour cette envie quasiment irrépressible de revoir La Mort aux trousses ou L’Étau, qui même s’il ne fait pas l’unanimité, reste pour moi l’un des meilleurs films d’espionnage.

Pas seulement parce retrouver un article H comme Hitchcock m’a aussi donné envie de me replonger dans le brillant Dictionnaire Hitchcock de Laurent Bourdon, où j’étais sûre de retrouver des articles sur le MacGuffin ou sur le George Kaplan déjà cité.

Mais aussi parce qu’à la suite de cet article est reproduit l’intégralité du roman-photo d’Alfred Hitchcock « Have you heard ? The story of Wartime Rumors », publié dans Life le 13 juillet 1942, et dont la chaîne Blow Up d’Arte avait proposé le récit en vidéo, ce qui reste l’un de mes épisodes préférés de cette chaîne :

S’il me manquait une raison de lire ce livre, je l’ai trouvée à ce moment, et j’ai poursuivi ma lecture, bondissant d’une référence à l’autre…

Je me suis dit qu’il fallait absolument que je relise le livre de Guillaume Evin, L’Histoire fait son cinéma, qui doit évoquer quelques films ayant la Guerre froide comme toile de fond, ou celui consacré à la série James Bond, Bons baisers du monde, co-écrit avec Laurent Periot et même me plonger dans l’un des derniers livres de Guillaume Evin, Les 101 meilleurs films historiques, même si d’ailleurs j’ai déjà parlé d’un de ses livres les plus récents, C’est un scandale, dans mon article de juin dernier

Je me suis dit qu’il fallait que je revois des films sur la Guerre froide, que j’avais adoré le film La Vie des autres, pour moi l’un des meilleurs films autour du mur de Berlin avec Goodbye Lenin, sur ce capitaine de la Stasi qui se trouble progressivement en surveillant un auteur de théâtre est-allemand soupçonné de dissidence.

Je me suis dit qu’il fallait que je revois aussi Le Bureau des légendes, qui constitue l’un de ces miracles de séries télévisées françaises, et que je redonne une chance peut-être à Homeland et à la série The Americans que j’avais commencée.

Je me suis dit que j’avais aussi envie de revoir OSS 117 (au moins les deux premiers) et ce malgré la petite erreur présente dans l’article de l’ouvrage qui lui est consacré, et qui lui fait porter un costume de Peter Pan, alors qu’il se grime en Robin des Bois / Errol Flynn.

Au féminin

Enfin, et c’est parce que je les ai évoquées plus haut, et qu’elles ont dans le livre une place de choix, notamment grâce à Chloé Aeberhardt, cette lecture m’a donné envie de voir avec un autre oeil les figures féminines du cinéma d’espionnage (et de l’espionnage en général) :

celles que l’on cantonne comme on l’a longtemps déploré, au rôle de « piège à miel » (mais qui m’ont aussi donné envie de revoir tous ces films peuplés de femmes fatales) ;

celles que l’on surnomme de manière involontairement péjorative, les nouvelles Mata-Hari ;

celles qui ont été victimes des opérations Roméo organisées par la Stasi, les comédiennes qui se sont faites espionnes, les espionnes qui ont joué un double rôle, et celles à qui justement Chloé Aeberhardt donne justement la parole dans son ouvrage et dans sa série documentaire Les espionnes racontent :

Mission accomplie donc pour cet ouvrage de la Cinémathèque, qui suscite bien des images et révèle bien des secrets !

Notes de lecture sur l’intelligence artificielle (épisode 2)

Voici un deuxième épisode de mes notes de lecture sur l’intelligence artificielle, qui tentera entre autres de répondre à la question suivante : les livres jaunes sont-ils de bons vulgarisateurs ?

En d’autres termes : l’expression « pour les nuls » permet-elle réellement à un non-spécialiste de maîtriser un sujet ?

Ce deuxième épisode s’intéressera donc, après celui qui m’avait mis le pied à l’étrier et qui s’intéressait à la question en proposant une chronologie et un regard scientifique, à des ressources qui revendiquent, si je peux m’exprimer ainsi, de traduire l’intelligence artificielle en langage naturel.

Dans cet épisode :

  1. les ouvrages Comprendre la révolution de l’intelligence artificielle et L’intelligence artificielle pour les nuls
  2. les dossiers de Geek junior n°23 et du hors-série de Tangente n°86
  3. une sélection de ressources

Comprendre la révolution de l’intelligence artificielle, Stéphane d’Ascoli

Ouvrage publié en 2020 chez First éditions, 189 pages. 13 chapitres, un glossaire à la fin, ainsi que des propositions bibliographiques de prolongement.

Les 13 chapitres sont répartis en quatre parties distinctes. La première partie « Intelligence artificielle : retour aux sources » revient sur des éléments définitionnels et chronologiques.

chapitre 1 : le monde des algorithmes / chapitre 2 : l’ia des mythes originels à aujourd’hui
  • retour sur des éléments de définition déjà évoqués dans mon épisode 1 : algorithme, machine learning, deep learning.

L’ouvrage fait en outre la distinction entre IA symbolique qui suit des règles explicites et IA connexionniste qui utilise des exemples pour fonctionner et améliorer ses réponses.

  • chronologie depuis l’Antiquité (Pygmalion et Galatée) jusqu’à AlphaGo.

Les deux parties suivantes vont s’intéresser aux deux modes de fonctionnement de l’intelligence artificielle : le machine learning (3 chapitres) et son sous-domaine le deep learning (4 chapitres).

chapitre 3 : comprendre le machine learning
  • apprendre à partir de données et généraliser l’apprentissage à de nouvelles données en ajustant avec différents curseurs. Plus un algorithme dispose de curseurs, plus il pourra résoudre des problèmes en ayant une fonction de perte satisfaisante (un score de performance : plus il est élevé, moins les performance sont bonnes) ;
  • bruit et silence en intelligence artificielle : l’overfitting (un algorithme avec trop de curseurs mémorise des informations inutiles) et l’underfitting (un algorithme avec trop peu de curseurs qui n’aura pas assez de données pour fonctionner correctement)
  • 3 types d’apprentissages pour les algorithmes : supervisé, non supervisé et par renforcement.
chapitre 4 : un jour dans la vie d’un concepteur d’ia

Pour mettre au point une IA, l’analogie de la recette de cuisine : il faut une recette (l’algorithme), des ustensiles (les processeurs de calcul) et des ingrédients (les données).

Le chapitre détaille les différentes étapes de traitement des données :

  1. récolter les données
  2. les nettoyer
  3. sélectionner les caractéristiques d’intérêt
  4. formater les données
  5. séparer les données d’entrainement et de test

et l’évaluation d’un algorithme à travers deux types de critère : la sensibilité (capacité d’un algorithme à donner un résultat positif lorsqu’une hypothèse est vérifiée) et la spécificité (capacité à donner un résultat négatif lorsqu’une hypothèse n’est pas vérifiée).

chapitre 5 : quelques applications célèbres
  • la régression linéaire pour déterminer les taux de prêt
  • l’utilisation d’arbres décisionnels pour établir un diagnostic médical à partir d’une série de symptômes
  • les systèmes de recommandation

Pour suggérer des films susceptibles de vous plaire, Netflix doit apprendre vos goûts au moyen d’un système de recommandation. (…) Cette méthode se résume dans une formule récurrente « Les utilisateurs qui ont aimé X ont également aimé Y ».

L’idée est simple : séparer les utilisateurs en groupes, correspondant à des « communautés » de goûts.


chapitre 6 : comprendre le deep learning
  • le perceptron (modèle mathématique du neurone) comme premier pas vers le deep learning ;
  • le transfer learning permet aux algorithmes entrainés à une certaine tâche de se conformer à une nouvelle tâche

Les trois chapitres suivants s’intéressent à différentes applications du deep learning : les images, le langage et les agents intelligents.

chapitre 7 : deep learning et images

Ce chapitre revient sur les différentes formes de traitement de l’image par les algorithmes dont :

  • la reconnaissance faciale qui utilise des réseaux convolutifs (opération qui consiste à scruter par parcelles pour extraire de manière autonome les caractéristiques d’une image),
  • la génération d’image qui s’appuie sur des algorithmes génératifs (comme pour les deep fakes) fonctionnant avec des réseaux de neurones encodeurs et décodeurs.
chapitre 7 : deep learning et langage

Pour représenter les mots, les algorithmes utilisent la méthode du plongement lexical qui consiste à représenter des mots par des vecteurs – soit un paquet de nombres (cela permet entre autres de repérer les discours de haine sur les réseaux sociaux).

Le chapitre étudie également le fonctionnement des claviers prédictifs avec les réseaux récurrents, le mécanisme d’attention utilisé par les outils de traduction automatique, et les étapes de réponse à une demande par les assistants vocaux.

chapitre 8 : deep learning et agents intelligents

L’agent intelligent est un algorithme capable de percevoir son environnement et d’interagir avec lui.

Le chapitre revient sur l’apprentissage par renforcement des algorithmes avec les exemples d’AlphaGo et des voitures autonomes.


La dernière partie de l’ouvrage est consacrée à « L’humanité face à l’intelligence artificielle » avec des problématiques qui peuvent être réutilisées dans le cadre de débats avec les élèves (SNT, enseignement scientifique, EMC, philosophie).

  • Chapitre 10 : l’intelligence artificielle face à l’intelligence humaine (avec le test de Turing) avec un retour sur le fonctionnement d’AlphaGo.

Citation d’Albert Einstein : « Les ordinateurs sont incroyablement rapides, précis et stupides. Les hommes sont incroyablement lents, inexacts et intelligents. L’ensemble des deux constitue une force incalculable ».

  • Chapitre 11 : faut-il craindre l’IA ? Culture populaire avec Asimov, Kubrick, Terminator… Applications militaires et dérives de l’intelligence artificielle (système de crédit social en Chine, reconnaissances faciales, deep fake, falsification d’identité). Impacts de l’IA sur le monde du travail et sur l’environnement.
  • Chapitre 12 : comment concevoir une IA « éthique » ?

Le chapitre revient sur les problématiques d’utilisation des données : collecte des données personnelles, enfermement dans les bulles de filtres, retour sur le scandale Cambridge Analytica, biais des algorithmes.

Quelle responsabilité donner aux algorithmes (Moral Machine) ? Comment réduire les impacts environnementaux du numérique ?

  • Chapitre 13 : l’IA peut-elle servir l’humanité ? Retour sur les potentialités de l’intelligence artificielle dans les domaines du handicap, de la recherche scientifique (lutte contre le cancer, physique des particules, astrophysique) et de l’éducation.

Mon avis sur l’ouvrage :

Le plus : il s’agit d’un véritable ouvrage de vulgarisation, les schémas sont parlants et lisibles, des encarts permettent de faire des rappels synthétiques, et l’auteur propose pour des notions techniques des analogies qui permettent vraiment de comprendre le sujet sans être noyé d’informations.


L’intelligence artificielle pour les nuls, John Paul Mueller & Luca Massaron

Ouvrage publié en 2019 chez F1rst intractive, 343 pages. 20 chapitres, une introduction qui fait office de mode d’emploi du livre, un index en fin d’ouvrage.

Les 20 chapitres sont répartis en 6 parties distinctes, dont l’introduction explicite si le propos s’adresse davantage aux novices ou aux spécialistes.

Partie 1 : introduction à l’ia

Cette première partie se décompose en 4 chapitres qui vont expliciter le fonctionnement basique d’une intelligence artificielle.

Le premier chapitre « Introduction à l’IA » redonne des points de définition (en particulier sur ce que l’on entend par intelligence) et un bref aperçu historique de l’intelligence artificielle.

La porte d’entrée de l’ouvrage, contrairement aux deux autres livres abordés précédemment (Turing à la plage et Comprendre la révolution de l’intelligence artificielle) se fait non pas via la machine mais de manière plus approfondie via les données traitées et les algorithmes.

Dans le deuxième chapitre « Définir le rôle des données« , les auteurs reviennent sur les sources et la fiabilité des données exploitées par les algorithmes.

Focus sur les listes déroulantes :

Les listes déroulantes sont adaptées à toutes sortes d’entrées de données, et elles rendent la saisie de données par un utilisateur humain extrêmement fiable, puisque l’utilisateur n’a pas d’autres possibilité que d’utiliser une des entrées proposées par le système.

Les auteurs identifient cinq types de données incorrectes : les données mensongères, les omissions volontaires, les erreurs de perspectives (divergence de points de vue), les biais et le cadre de référence (c’est-à-dire le contexte et la situation d’utilisation des données).

L’intérêt de ce chapitre est de mettre en lumière la vigilance à avoir vis à vis de l’information, et ce au-delà de la question de l’intelligence artificielle :

  • utilisation d’un thesaurus / descripteurs VS mots clés pour la question des listes déroulantes
  • différentes formes de désinformation et prolongement de la question des données incorrectes vers les biais de confirmation et les bulles de filtres.
  • l’ouvrage renvoie vers le site Data never Sleeps qui permet de voir l’évolution de la collecte des données quotidiennes depuis 2013

Les chapitres 3 et 4 reviennent sur le fonctionnement des algorithmes et du matériel informatique (processeurs graphiques).

partie 2 : recenser les utilisations de l’ia dans la société

Cette seconde partie revient sur les utilisations de l’intelligence artificielle dans les applications informatiques, et sur les deux fonctionnalités principales qui sont attendues de l’intelligence artificielle : les corrections et les suggestions.

On retrouve notamment les corrections non seulement dans les vérificateurs orthographiques mais aussi dans la correction de trajectoire des voitures, et la suggestion dans le traitement automatique du langage naturel et la recherche d’information.

L’intelligence artificielle sert également à automatiser des processus courants et à s’épargner des tâches ennuyeuses et répétitives (principalement dans le domaine de l’industrie). Dans le domaine médical, l’IA est utilisée pour le suivi des patients, le diagnostic et de nouvelles techniques chirurgicales.

Enfin elle permet d’améliorer l’interaction humaine en créant de nouveaux alphabets (emojis), en automatisant la traduction ou en créant des liens sur les réseaux sociaux.

partie 3 : travailler avec des applications électroniques de l’ia / partie 4 : travailler avec l’ia dans des applications matérielles

Dans la troisième partie de l’ouvrage, les auteurs reviennent sur les analyses de données par l’intelligence artificielle.

Les points que je retiens de ces chapitres :

  • l’utilisation pour l’analyse des données des outils statistiques (moyenne et variance) et du calcul de corrélation et de la régression linéaire, qui indiquent si des phénomènes peuvent être liés les uns aux autres, ce qui m’a rappelé l’épisode d’E-penser sur la différence entre corrélation et causalité ;
  • un retour sur l’apprentissage machine avec les distinctions entre apprentissage supervisé, non supervisé et par renforcement ;
  • les probabilités, les graphes et les arbres de décision.

Le dernier chapitre de la troisième partie est consacré à l’apprentissage profond et à ses modes de fonctionnement. Les auteurs s’intéressent à son application dans les agents conversationnels.

Ils reviennent sur le premier agent conversationnel, ELIZA, élaboré par Joseph Weizenbaum en 1966, qui propose une réponse à partir d’un ensemble d’associations et de sujets présélectionnés. Deux autres agents plus récents sont mentionnés : Google Smart Reply et Tay, ainsi que le prix Lobner. Le chapitre se termine par la mention suivante :

Pour avoir une idée des progrès de ces technologies, lisez les pages consacrées à ces réseaux sur le site Internet d’OpenAI, un organisme de recherche sur l’IA à but non lucratif (…).

La quatrième partie s’intéresse aux applications matérielles : la robotique (prétexte à reprendre les lois de la robotique d’Asimov), les drones et les voitures autonomes. Ces problématiques peuvent être réutilisées dans le cadre de débats avec les élèves (SNT, enseignement scientifique, EMC, philosophie).

Un encart dans le chapitre sur les drones revient sur le film WarGames qui donne l’exemple d’une intelligence artificielle (l’ordinateur PROG) dont le fonctionnement est biaisé par le piratage.

partie 5 : se pencher sur l’avenir de l’ia / partie 6 : la partie des dix

Ces deux dernières parties sont consacrées aux perpectives offertes par l’intelligence artificielle, dont certaines sont à relativiser ou à actualiser étant donnée la date de publication de l’ouvrage.

Dans la partie 5, les auteurs reviennent sur certains domaines de l’intelligence humaine et où l’intelligence artificielle trouve ses limites, à savoir la créativité, l’imagination, l’originalité, et la fiabilité des données – puisque les résultats d’une IA peuvent être biaisés par des facteurs humains ou des déficiences techniques.

Sont abordés à nouveau les « hivers de l’IA« , périodes durant lesquelles un optimisme démesuré se confronte à des échecs pourtant prévisibles.

Le chapitre 16 est consacré aux applications de l’IA dans l’espace (question qui peut être traitée notamment dans le programme d’HGGSP Terminale) avec l’observation spatiale, l’exploration, l’exploitation des ressources. Le chapitre 17 aborde les possibilités de l’IA notamment dans le domaine environnemental.

La « partie des 10 » propose des pistes de réflexion autour de trois chapitres (à réutiliser en EMC, philosophie et HLP, et en sujets de grand oral) :

  • 10 activités à l’abri de l’IA, où l’on retrouve le domaine de l’interaction humaine, notamment l’enseignement (ouf), de la créativité et de l’intuition
  • 10 contributions importantes de l’IA à la société (médecine, industrie, projets spatiaux)
  • 10 exemples d’échecs de l’IA, principalement dans le domaine des relations et de la connaissance intrapersonnelle : compréhension, éthique, extrapolation des données, empathie, affinité intellectuelle, remise en question et croyances.

Mon avis sur l’ouvrage

Comme beaucoup d’ouvrages de la collection « Pour les nuls » que j’ai pu parcourir, celui-ci ne m’a pas vraiment satisfait.

Cette collection peut être très utile lorsqu’il s’agit de proposer un guide pratique pour apprendre une langue (ou un langage informatique… le seul qui figure dans ma bibliothèque est consacré aux codes HTML, XML et CSS).

En revanche pour traiter d’une thématique, je trouve la structure et le propos souvent complexes et alambiqués, et vulgarisant finalement très mal le sujet qu’ils sont censés aborder, avec des systèmes de renvois à des articles en ligne et certaines phrases jouant sur une connivence avec le sujet que le lecteur ne parvient pas à s’approprier.

Geek Junior n°33 d’avril 2023

Cette revue dédiée à la culture numérique proposait un dossier consacré à l’intelligence artificielle et à ChatGPT dans son numéro d’avril 2023.

Ce numéro aborde l’intelligence artificielle sous différents aspects :

  • le dossier donne la parole à un « expert » (Laurence Devillers, chercheuse au CNRS) avec 3 questions : définition / limites de ChatGPT et conseils d’utilisation (p.9)
  • 8 questions / réponses sur ChatGPT et un encart de mise en garde face aux fake news (p.10-11)
  • un lexique de l’intelligence artificielle et un retour sur ce qu’est un prompt (p.12)
  • un tutoriel pour s’initier à l’intelligence artificielle avec Adacraft (une application web qui fonctionne en prolongement de Scratch) p.21-23
  • un quiz et des mots mêlés  p.29-30

Tangente Hors-série n°86 de juin 2023

Cette revue spécialisée dans l’enseignement des mathématiques consacre un article à « Chat-GPT : une IA très mathématique » (p.16-18).

L’article revient sur le mode de fonctionnement de Chat-GPT : agent conversationnel et réseau de neurones, où la modélisation du texte généré passe par la vectorisation (chaque mot = un vecteur), par l’apprentissage par renforcement et par un mécanisme d’attention (scores et récompenses données en fonction de la pertinence de la réponse).

Autres ressources

Pour finir voici un petit panel de ressources pour prolonger ces lectures et pour garder la trace d’autres lectures à venir :

  • deux Digipad : une veille sur l’IA et un Digipad « IA et éducation« 
  • le journal gratuit Day-Click que l’on reçoit gratuitement dans les établissements scolaires, et son numéro de mai 2023, qui revient sur les technologies de rupture, avec deux pages sur l’intelligence artificielle

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Notes de lecture sur l’intelligence artificielle (épisode 1)

Voici mes notes de lecture et une sélection de ressources sur l’intelligence artificielle.

 

Ce premier épisode revient sur :

  1. l’ouvrage Turing à la plage
  2. le dossier « ChatGPT : ce n’est que le début… » du numéro 25 de la revue Epsiloon
  3. une sélection de ressources numériques

Turing à la plage : l’intelligence artificielle dans un transat, Rachid Guerraoui, Rachid et Lê Nguyên Hoang.

Ouvrage publié en 2020, 220 pages. 8 chapitres, un glossaire à la fin, ainsi que des propositions bibliographiques de prolongement.

Le prologue propose quelques éléments biographiques sur Alan Turing. Sur l’intelligence artificielle les points clefs sont :

  • le test Turing qui met à l’épreuve la faculté d’une machine à discuter avec un être humain (prix Loebner : lien avec les bots conversationnels) ;
  • l’article publié en 1936 par Turing qui décrit une machine modèle de nos futurs ordinateur ;
  • le décryptage d’Enigma ;
  • l’article Computing Machinery and Intelligence publié en 1950 sur les machines qui pensent.
Chapitre 1 : au cœur de l’intelligence artificielle

Selon Turing, l’intelligence des machines réside nécessairement dans l’algorithme qu’elles exécutent, c’est-à-dire une liste d’instructions et d’opérations logiques ou une recette permettant de résoudre des problèmes compliquées à partir d’étapes simples.

Ada Lovelace est la première à avoir l’idée de programmer les machines à calculer inventées initialement par Pascal et Babbage, en utilisant des cartes perforées.

Dans son article de 1936, Turing propose une machine universelle qui serait capable d’apprendre des algorithmes et de les exécuter à la demande, algorithmes qui peuvent être transposés d’une machine à l’autre.

L’exemple de PageRank : cet algorithme développé par Google consiste à calculer un score de popularité pour chaque page web, en s’appuyant sur les liens entre les pages.

« Plus les liens qui pointent vers une page sont nombreux, plus PageRank lui attribue un score élevé. »

Ce système de recommandations s’applique également aux suggestions d’amis sur Facebook ou sur le conseil de produits sur des sites et des applications.

Ce que l’on désigne généralement sous le terme « intelligence artificielle », ce sont les algorithmes auto-apprenants qui apprennent de leurs expériences pour résoudre des problèmes de plus en plus complexes et les systèmes experts qui déduisent des faits à partir de règles, et qui peuvent en déduire de plus en plus lorsque de nouvelles données leur sont fournies.

Idée de définition retenue : l’intelligence artificielle est la capacité d’un algorithme à résoudre un problème que seul l’humain pensait être capable de résoudre.

chapitre 2 : les limites des machines

Notions retenues :

  • la théorie d’incomplétude de Kurt Gödel selon laquelle toute théorie mathématique contient des vérités non démontrables ;
  • le paradoxe du Crétois. Un Crétois déclare « je mens ». Si ce qu’il dit est vrai, alors ce qu’il dit est faux. Et si ce qu’il dit est faux, alors le Crétois dit la vérité.
  • les algorithmes seront toujours confrontés à des problèmes qu’ils ne pourront pas résoudre.
Chapitre 3 : des progrès ahurissants

Des premières machines purement mécaniques, on en vient à la Seconde guerre mondiale à construire des machines électromécaniques à des fins de cryptanalyse (la plus connue est Enigma).

Pour décoder Enigma, Turing et ses collègues conçurent une machine à calculer surpuissante, la Bombe de Turing.

  • 1943 : Mark 1, une machine de la société IBM
  • 1956 : invention du transistor, un interrupteur actionnable électroniquement. La combinaison de plusieurs transistors permet la fabrication de circuits logiques.
  • 1988 : le joueur d’échecs David Levy est battu par l’algorithme Deep Thought, lui-même battu l’année suivante par Gary Kasparov.
  • 1996 : l’algorithme Deep Blue bat Kasparov, avant d’être battu par d’autres algorithmes.

La mise en réseau des machines (Internet) permet d’aller plus vite et de traiter un plus grand nombre de données en répondant à deux besoins : la tolérance aux défaillances et la puissance de calcul. Google répond à presque 4 milliards de requêtes par minute.

chapitre 4 : le code de l’intelligence

Contrairement au langage naturel, le langage machine n’a pas d’ambiguïté. Il est composé par les symboles 0 et 1 manipulés par le processeur d’une machine. Les langages de programmations sont des intermédiaires entre ces langages machines et le langage naturel.

Un langage de programmation est dit « Turing-complet » s’il est universel, c’est-à-dire traduisible dans un autre langage. On parle de « pensée algorithmique » pour décrire une façon de construire des idées à l’aide de ces langages de programmation.

Extrait p.109 :

Nous sommes capables instinctivement de reconnaître un chat dans une image, mais nous ne savons pas comment. (…) Nous parvenons à exécuter l’algorithme de détection de chat qui se trouve dans nos cerveaux, mais il nous est impossible de décrire cet algorithme.

Cette distinction est particulièrement importante à faire dans le cadre des sciences afin d’aiguiser son esprit critique. Il nous arrive souvent d’être persuadés d’une chose sans être capable de décrire le raisonnement logique qui nous a conduits à cette conclusion.

Exemple des captchas : démontrer qu’on est un humain revient à trouver les objets demandés, une tâche facile pour l’humain et complexe pour l’algorithme.

1950 : l’argument de Turing. Aucun humain ni groupe d’humain ne serait capable d’écrire ligne à ligne le code algorithmique d’une IA de niveau humain. Cela induit le principe des learning machines, qui doivent remplacer l’humain dans l’écriture du code et apprendre leur propre algorithme.

chapitre 5 : des machines qui pensent

Le jeu de l’imitation ou test de Turing est un test visant à mesurer la capacité d’une intelligence artificielle à imiter une conversation humaine.

Voir notamment le prix Loebner mentionné plus haut, les chat bots, le film Her de Spike Jonz ou les applications développées récemment comme ChatGPT.

De nombreuses IA modernes fonctionnent avec un apprentissage par renforcement, c’est-à-dire par le fait de recevoir des récompenses en cas de prouesses (ou de clics de l’utilisateurs) et des punitions en cas de défaillances, le tout sous la forme de signaux, qui vont modifier leurs propres algorithmes.

chapitre 6 : des artistes de silicium

Ce chapitre s’intéresse aux capacités des machines à développer de la créativité, c’est-à-dire la capacité à nous fasciner ou à nous surprendre.

  • l’algorithme AlphaGo développé par Google Deepmind en 2016
  • les créations artistiques réalisées par des algorithmes qui passent un test de Turing artistique
  • les algorithmes de recommandation développés pour estimer ce qui plaira aux utilisateurs (Spotify, Netflix)
Chapitre 7 : des algorithmes dans la nature

Dans ce chapitre sont étudiés les mécanismes naturels qui déterminent les différentes formes et structures des êtres vivants (soit le domaine de la morphogénèse) et le mécanisme de l’hérédité (soit la réplication de l’information génétique).

Applications vivantes de l’intelligence collective : les nuées d’oiseaux et les bancs de poissons.

chapitre 8 : l’IA est-elle un danger pour l’humanité ?
  • Inquiétudes autour de l’IA : dans la culture populaire avec 2001, l’Odyssée de l’espace, Terminator et Matrix.
  • Dans l’univers de la science-fiction avec Isaac Asimov et ses lois de la robotique.
  • Applications militaires et gouvernementales de l’IA : armes, drones, reconnaissance faciale. Dérives avec les deepfakes.

Le chapitre s’intéresse en outre aux biais des algorithmes, dont le logiciel de recrutement proposé en 2015 par Amazon qui éliminait systématiquement les CV des femmes.

Les effets secondaires : la question des algorithmes de recommandation, p.188

Typiquement, ces algorithmes de recommandation nous conduisent à cloisonner nos centres d’intérêt. Il s’agit d’une conséquence du biais de familiarité : plus une chose nous est familière, plus nous l’apprécions. Mais alors, plus nous apprécions un contenu, plus l’IA de YouTube nous recommandera ce contenu, et plus ce contenu nous deviendra familier. Et plus nous l’apprécierons. Petit à petit, les différentes communautés d’intérêt se referment ainsi sur elles-mêmes, tandis que s’appauvrit l’esprit critique de ses membres. On assiste à une polarisation croissante des opinions, et au développement d’une culture de l’entre-soi.

Mon avis sur l’ouvrage :

Le plus : un rappel historique et scientifique de ce qu’est l’intelligence artificielle et une bonne mise en bouche qui permet une compréhension du sujet, même pour des non-scientifiques.

Cette approche est la plus théorique et scientifique de l’intelligence artificielle, et me permet de survoler certains des concepts abordés dans les autres ouvrages.

Dossier « ChatGPT : ce n’est que le début… » du numéro 25 de la revue Epsiloon (juillet 2023) pp. 42-57

Ce dossier s’intéresse aux implications les plus récentes de l’intelligence artificielle, avec GPT-4, le successeur de ChatGPT.

Il prend comme point de départ la fascination évoquée plus haut et suscitée par ChatGPT, et les craintes qui vont de pair.

Aux origines : un article publié par une équipe de Google : « Attention is all you need » en 2017 qui proposait une nouvelle architecture, Transformer, basée sur un mécanisme d’attention, en d’autres termes « un système statistique qui tente de prédire le mot suivant d’une phrase, en s’appuyant sur le texte environnant ».

GPT-4 intègre 1000 milliards de paramètres, et parvient à réussir différents examens et concours mieux que la plupart des étudiants.

GPT-4 semble capable de développer des capacités sociales telles que raisonnement, sens commun, compréhension, créativité ou abstraction.

L’enjeu est de comprendre le fonctionnement de ces machines pour mieux appréhender les failles qu’elles présentent : biais sexistes et racistes, fautes de langage, réponses intuitives et précipitées, invention de faits et de concepts.

Pistes d’évolution de ces intelligences : leur fournir de nouvelles perceptions comme la vue, la mémoire à long terme…

En fin de dossier : les réactions de chercheurs de différents domaines (géopolitique, sociologie, droit, physique, SIC, sciences cognitives…).

Les encarts « Des étincelles d’intelligence » 

Ces encarts reviennent sur certaines prouesses de GPT-4 :

  • la capacité à réussir des tests cognitifs
  • le test de l’équilibre
  • la recherche d’informations (chercher une info dans un moteur de recherche, utiliser les commandes Linux d’un ordinateur pour le pirater…)

Le dossier propose en prolongements les trois vidéos sur la question publiées par l’INRIA : Comment fonctionne ChatGPT, Le Prompting, Les limites de ChatGPT.

Ressources supplémentaires

  • Le site Moral Machine qui compile différentes perspectives humaines sur les décisions morales prises par les machines intelligentes
  • La vidéo d’Hugo Décrypte publiée en février 2023 :

La recette de la bonne humeur

Au moment où je commence à écrire cet article, nous sommes au lendemain du 27 janvier.

Oui j’ai décidément cette année une belle avance dans l’écriture de ces articles cinéphiles.

Si je rajoute que j’avais ce livre sur ma pile de lecture depuis le mois de décembre 2022, et que je l’ai également lu à cette période, cela peut donner une petite idée de mon rythme d’écriture de cette année.

Je n’ai pas eu de grandes difficultés, comme les années précédentes, à trouver ou à lire les ouvrages dont je souhaitais faire un compte-rendu, et j’aime bien profiter de quelques week-ends pluvieux ou grelottants pour écrire ces articles.

Pour celui-ci, le thermomètre est légèrement sous la barre des zéros degrés, mais il fait un grand soleil d’hiver par la fenêtre… de quoi avoir envie de se réchauffer avec un plat bien réconfortant.

Que mon article sorte au mois de mai ne change rien à la donne : le printemps aura fini peut-être par pointer le bout de son nez et d’autres recettes pourront aisément convenir.

Si je me suis décidée à écrire cet article juste après le 27 janvier, c’est parce que le livre qui était sur ma pile de lecture s’intitulait : En cuisine avec Louis de Funès, et parce que le 27 janvier dernier marquait les quarante ans de la disparition de cet acteur mythique.

C’est donc après avoir vu passer un certain nombre d’interviews, de reportages, d’extraits de films (et de films en totalité), d’images d’archives, que j’ai repris ce livre lu en décembre et me suis replongée dedans pour vous en donner un aperçu.

Les comédiens dans ma bibliothèque : état des lieux

J’ai sans doute eu déjà l’occasion d’en parler sur ce site – j’ai dû avoir trois ou quatre fois l’occasion d’évoquer Louis de Funès dans des articles qui lui étaient exclusivement consacrés.

C’est moins que Truffaut ou Romy Schneider, moins qu’Hitchcock ou Chaplin, mais cela reste pour le coup certainement l’acteur masculin dont j’ai parlé le plus – peut-être à égalité avec Lino Ventura.

C’est curieux d’ailleurs : ayant une certaine prédilection pour le cinéma hollywoodien, et me concentrant dans mes lectures soit sur des domaines transversaux, soit sur des figures de réalisateurs, je me rends compte que c’est finalement les comédiens français qui prédominent (et généralement toujours les mêmes : un panthéon féminin composé de Romy, Signoret et Girardot) dans ma bibliothèque, si l’on excepte deux figures : Audrey Hepburn et Marilyn Monroe.

Même les plus appréciés y sont moins à l’honneur : l’autobiographie de Lauren Bacall, deux livres sur Humphrey Bogart, deux sur Cary Grant, un livre sur Grace Kelly et un sur Greta Garbo…

Un comique à bonne maturation

Comme je le disais un peu plus haut, c’est donc Louis de Funès (avec Lino Ventura) qui a généralement eu les honneurs de ce site, ce qui m’a toujours paru quelque peu inattendu, étant donné le temps que j’ai mis à l’apprécier.

Mes parents lui préféraient toujours Bourvil et m’avaient appris à le trouver insupportable et gesticulant. C’est avec ce genre de préceptes que l’on construit d’abord sa cinéphilie puis qu’on la reconstruit avec un nouveau regard une fois que l’on a appris à aimer les choses par soi-même… Ainsi :

  • non, Vivien Leigh n’était pas forcément dans la vie en tout point conforme à Scarlett O’hara (même s’il est désormais avéré que son trouble bipolaire n’en faisait pas la personne la plus facile à vivre)
  • non, je ne déciderai pas de préférer Dewaere à Depardieu (quoique) ou Dorléac à Deneuve parce que les premiers ont eu le malheur de mourir tragiquement
  • oui, on peut apprécier De Funès autant que Bourvil parce que leur art comique repose sur des ressorts complètement différents et donc complémentaires

Au fur à mesure, le charme a fini par opérer, au gré des rediffusions régulières de ses films et de l’exposition organisée par la Cinémathèque qui lui rendait enfin l’hommage mérité.

Alors le nombre d’articles qui lui est consacré sur ce site, je ne sais plus… mais je suis sûre pour le coup d’avoir déjà parlé d’un compte Twitter que je suis avec assiduité et qui fait mes délices :

au même titre que le compte Twitter et le compte Instagram qui reprennent des images des films d’Yves Robert Un éléphant ça trompe énormément et Nous irons tous au paradis… mais je m’égare une fois de plus !

J’échange régulièrement avec une amie quelques répliques de La Folie des grandeurs ou de La Grande vadrouille, qui viennent agrémenter nos conversations au milieu de citations de Kaamelott ou de quelques « Papuche » bien senties tirées de Moi moche et méchant.

Au palmarès de ces répliques : « Qu’est-ce que je vais devenir ? Je suis ministre, je ne sais rien faire » et « Non sire, pour une fois c’est pas moi, j’étais là, je priais. »

Un film de De Funès, c’est comme un bon petit plat… ça réchauffe.

Ynnis Éditions

On voit qu’avec la phrase précédente, je soigne mes transitions (ou pas). L’ouvrage qui m’intéresse aujourd’hui, En cuisine avec Louis de Funès, a été publié chez Ynnis Éditions en décembre 2022.

C’est un livre à six mains : comme on le découvre dès les premières pages : « Minh-Tri Vo aux fourneaux, Photographies mitonnées par Marion Saupin, Contextes concoctés par Eugénie Michel ».

J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer ici quelques-unes des publications d’Ynnis Éditions, des ouvrages qui retiennent souvent mon attention non seulement par leur thématique mais aussi par le soin apporté à leur mise en page.

Parmi mes préférés, on retrouve la collection « Hommages » dont voici en images quelques exemples :

un bon nombre de livres sur le cinéma d’animation japonais, l’ouvrage Voyage avec Chihiro de Marta Garcia Vilar dont j’ai parlé l’an dernier, et quelques livres de recettes.

La grande majorité de ces derniers concerne l’univers Ghibli ou le cinéma d’animation, avec parmi eux trois exceptions au moment où j’écris cet article :

Lorsque j’ai appris ces publications, j’étais déjà décidé à me procurer le livre consacré à Louis de Funès. Un manque d’attention m’a fait croire que le deuxième livre était consacré à Jurassic Park, et quand je me suis rendu compte de mon erreur, ce qui dans ma tête pouvait être un article sur les livres de cuisine en général s’est transformé en article sur Louis de Funès. Tant pis, ou tant mieux.

Si je peux garder une idée spécifique aux livres de cuisine que j’ai pu feuilleter ces derniers temps, c’est là encore le soin apporté à la mise en page, et que justifie les six mains associées à la conception : un cuisinier, un auteur qui va ici se pencher sur les « contextes » et un photographe qui va donner reproduire fidèlement les plats réalisés dans les films et donner envie au lecteur, à son tour, de passer aux fourneaux.

En cuisine avec Louis de Funès

L’ouvrage propose dix-neuf recettes. Dix-huit d’entre elles sont tirées des films cultes de Louis de Funès, à commencer par La Soupe aux choux et en terminant par un cheesecake qui apparaît dans Les Aventures de Rabbi Jacob.

La dernière recette est celle d’un des plats préférés de Louis de Funès : le canard à l’orange.

Chacune des recettes est introduite par une double-page de contexte qui revient sur la scène du film et le film en lui-même dont la recette est tirée.

Voici un exemple avec La Soupe aux choux :

Puis on passe à la recette en elle-même, sur plusieurs pages en fonction du degré de complexité de cette dernière :

Feuilleter ce livre procure un réel plaisir, car certains films avec Louis de Funès sont de véritables odes à la gourmandise. Évidemment on songe à L’aile ou la cuisse ou au Grand restaurant. Et l’on ne se restreint pas à la cuisine française, puisque sont évoquées la culture japonaise grâce à La Zizanie, ou les affres de la cuisine anglaise grâce aux Grandes vacances (sans toutefois qu’une recette du repas que subit Michonnet soit retenue).

De mon côté j’ai une tendresse toute particulière pour la mère supérieure dans La Grande Vadrouille qui sort à Big Moustache : « Vous aimez bien tout ce qui est bon ? eh bien c’est très mauvais ». Et je pense régulièrement à ces images d’archives de Louis de Funès, faisant l’éloge des produits de son jardin :

Après avoir évoqué Lino Ventura et sa cuisine (un peu plus gargantuesque) dans mon article de février, je poursuis cet itinéraire cinéphilo-gastronomique avec Louis de Funès.

L’ouvrage réussit à merveille le pari à la fois de nous donner envie de cuisiner et de revoir les films qui y sont évoqués.

Mon seul regret ? Que ne soit pas reproduite la recette du soufflé à la pomme de terre donnée à Herr Muller dans cette scène mythique du Grand restaurant :

car pour connaître cette scène quasiment par coeur, j’aurais adoré pouvoir la retrouver sous la forme d’une recette réalisable… peut-être à retrouver ailleurs ?

Espérant vous avoir mis de bonne humeur avec ces évocations cinéphiles et culinaires, je vous souhaite un excellent appétit et vous dis à très bientôt pour un nouvel article sur Cinephiledoc !

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