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Mois : septembre 2015

Septembre 2015 : séances et animations du CDI

Après des vacances ensoleillées et reposantes, et une escapade numérique à #Ludovia12, voici l’article des activités du CDI pour le mois de septembre, un tout petit peu en avance.

Cet article sera à l’image de mon mois de septembre : démarré sur les chapeaux de roues, bien occupé et tout en vidéos, infographies et numérique, avec les aléas et les surprises qui vont avec.

Je laisserai volontairement de côté les passages obligés d’une rentrée au CDI : manuels scolaires (forcément il en manque, mais je les gère uniquement en juin, en septembre c’est la vie scolaire qui s’en occupe), réabonnements, dernières commandes avant l’assèchement des crédits (pour les commandes j’y reviendrai lorsque j’aurai tout reçu et que je mettrai les nouveautés en exposition aux élèves), et réunion de rentrée où l’on parle projet d’établissement et politique documentaire.

Commençons par les séances au CDI.

Séances de septembre : les 6e et les 3e

À mon agenda ce mois-ci, également un passage obligé : les séances d’initiation à la recherche documentaire.

  • IRD sixième

Depuis un an je les fais en classe entière sur le même créneau pour les deux premières : l’heure d’aide au travail personnel, obligatoire pour tous les sixièmes, pour la séance 1, et une heure de français gracieusement cédée par mes collègues pour la séance 2.

Chaque année, c’est la même chose, j’ai modifié durant l’année l’organisation de ma séance, parce que j’ai perçu telle et telle difficulté chez les élèves, ou tel et tel défaut dans ma manière de fonctionner. Et chaque année, évidemment, je ne suis pas satisfaite, et je veux tout bouleverser l’année d’après.

J’avais gardé les documents de l’année dernière pour la séance 1 (découverte du CDI et de l’objet livre) et pour la séance 2 (se repérer dans le rayon fictions), j’avais juste essayé de clarifier sur la fiche élève quelques éléments.

Mais je pense tout remettre à plat pour l’an prochain – et ce d’autant plus avec la réforme du collège, mais ma réflexion à ce sujet et pour le contexte précis de mon collège est encore trop désordonnée pour que je la formalise…

Cette année, ce qui m’a frappée c’est la difficulté de mes bouts de choux 1) à remplir un texte à trous où ils ont définitions et exemples et où ils doivent retrouver le bon mot pour chaque phrase ; 2) à se détacher d’un exemple précis pour trouver la définition générale (le concept) attendue.

La grande nouveauté de cette année reste qu’à l’issue de ces séances je présente systématiquement aux élèves une vidéo récapitulative, vidéos que je réutiliserai lors d’une séance d’évaluation finale par QCM à la fin du trimestre.

Vous trouverez donc ci-dessous la vidéo de la première séance, davantage centrée sur les missions du professeur documentaliste :

Et la vidéo de la deuxième séance, consacrée au rayon fictions :

Bien-sûr, je le rappelle, je suis toujours loin d’être satisfaite de mes séances, et il en va de même de mes vidéos.

  • Autres séances

Ce mois-ci, à part les six séances d’initiation à la recherche pour les sixièmes, j’ai participé à deux séances avec les élèves de troisième faisant l’option DP3 (découverte professionnelle 3h).

La première séance était une séance de présentation de l’option, durant laquelle les élèves ont également fait des recherches sur un métier.

À partir de ces recherches, et de la fiche métier qu’ils remplissent via les documents du kiosque ONISEP et d’une liste de sites internet, ils doivent présenter à l’oral ce métier, en ayant comme support un diaporama.

La seconde séance durant laquelle je suis intervenue était donc une séance d’oraux blancs, qui avait pour but de les conseiller dans la manière de présenter un travail en public.

C’est avec ces élèves de 3ème que j’ai le plus l’habitude de travailler et qui m’avaient amenée à leur proposer l’an dernier de publier des articles sur un blog et d’alimenter un compte Twitter sur l’orientation.

Cette année, ils vont également être impliqués dans la refonte du site internet du collège, qui est l’un des enjeux numériques de l’année.

CDI et collège connectés

Mon collège ne fait pas partie des COCON, mais je récupère cette dénomination pour aborder toutes les questions en lien avec le numérique au CDI depuis début septembre.

  • Site internet

Je l’ai dit, la refonte du site est une priorité, l’existant étant assez ancien et actuellement en friche. Avec plusieurs collègues, nous souhaiterions le supprimer et travailler directement sur quelque chose de neuf. Les démarches sont en cours, bien que nous soyons peu nombreux à être motivés par le sujet, à mon grand regret.

  • L’ENT

En toute naïveté, je pensais échapper au calvaire de l’an dernier, les élèves conservant (ou plutôt étant censés conserver) leur mot de passe d’une année sur l’autre. Cette année il y a donc à gérer la même lenteur de mise en place, la nouvelle version soit disant plus belle et plus intuitive, les oublis de mots de passe, et les premières connexions – heureusement simplifiées – pour les élèves de sixième, en cours de technologie.

  • Mise à jour du portail e-sidoc : nouvelles rubriques

Depuis septembre, j’ai ajouté à mon Portail deux nouvelles sous-rubriques : l’une dans l’onglet « EMI » où je pense intégrer au fur à mesure mes vidéos d’initiation à la recherche : « Apprendre à… Chercher, s’informer, se documenter », l’autre sur la page d’accueil, « Découvrir… Le CDI en ligne ».

On y retrouve la page Facebook et le compte Twitter du CDI, qui ont fait peau neuve. Pour le compte Twitter, je souhaite l’alimenter un peu plus cette année (l’an dernier il était destiné principalement aux élèves de troisième) et à terme, qu’il soit implémenté sur le nouveau site du collège. Je souhaite également former les élèves volontaires à publier des infos via ce compte, selon des modalités que j’expliquerai un peu plus loin…

  • Tablettes

Je dispose depuis fin mars de trois tablettes au CDI. Depuis cette date, j’ai également fait auprès du conseil général une demande d’installation d’une borne Wifi, que j’attends toujours. Je butais bêtement sur ce problème jusqu’à ce que je me décide, provisoirement, à mettre mon smartphone en partage de connexion, et à faire venir le wifi, si le wifi ne venait pas à moi… là encore, la suite des explications arrive !

Expositions

Durant la première semaine de la rentrée, j’ai repris mes expos thématiques sous leur forme traditionnelle. J’ai gardé la rétrospective en images de l’année 2014-2015, ce qui me semblait une bonne idée pour montrer aux nouveaux sixièmes tout ce qui pouvait se passer en un an au CDI.

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Puis j’ai voulu systématiser un procédé que j’avais déjà commencé à tester l’an dernier :

  • une grande exposition thématique et « permanente » (ou presque), sur le modèle des musées, qui mobilise plusieurs tables et plusieurs grilles,
  • une exposition en images sur une autre grille (il faut d’ailleurs que j’enlève celle consacrée à la seconde guerre mondiale qui est au CDI depuis le 8 mai)
  • et une mini-expo à côté du coin lecture sur un sujet d’actualité, exposition « temporaire ».

Mais cette année, ce que j’ai aussi voulu faire, grâce à mes tablettes, ce sont des expos avec QR-codes, bluffée que j’ai été, entre autres, par les initiatives de Marie Soulié à #Ludovia12. Pour chaque exposition, j’ai donc (après quelques tâtonnements réflexifs) au moins 4 QR-codes :

  • un texte ;
  • un son ;
  • une image ;
  • une vidéo.

Depuis le début de l’année, j’ai intégré ce dispositif aux mini-expos et aux grandes expos. J’ai proposé aux élèves : une mini-expo sur les 300 ans de la mort de Louis XIV (avec des vidéos sur Versailles et des musiques de Lully)

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une mini-expo sur les 75 ans de la découverte de Lascaux, avec des vidéos de « C’est pas sorcier » sur le néolithique et une visite virtuelle de la grotte

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une exposition consacrée à la Fête de la science, avec des sons d’inventions, le texte de La Machine à explorer le temps, une analyse picturale d’une affiche de promotion du cinématographe Lumière et des vidéos de « C’est pas sorcier » (encore)

Fête de la science

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enfin, une mini-expo plus traditionnelle sur la coupe du monde de rugby

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Cependant, devant le peu de réactions suscitées, et voyant mes loustics intimidés à l’idée de me demander les tablettes, j’ai affiché ceci devant mon ordinateur :

Expos CDI

Le lien est disponible ici : https://magic.piktochart.com/output/8031135-expos-cdi

J’espère qu’ils seront moins timides dans les semaines qui viennent…

Ateliers

J’espère aussi qu’ils participeront aux ateliers que j’anime, et que je présente cette année avec cette affiche :

Ateliers CDI

Malheureusement, malgré mes efforts, également mis en affiche, l’atelier journal a du mal à trouver des volontaires.

Affiche atelier journal

Cela fait 3 ans que je le porte à bouts de bras et que je constate, à chaque fin d’année, les mêmes phénomènes : des élèves qui, arrivés en 3ème, n’ont plus le temps de participer (et c’est le cas de la majorité de mes élèves de l’an dernier), et d’autres, qui sont tiraillés entre tous les autres ateliers qu’on leur propose (slam, théâtre, AS, soutien, chorale, etc.). Pour l’instant, je n’ai donc qu’un inscrit.

C’est pour cette raison que j’essaye de mettre en place un atelier Twitter, qui semble un peu plus les attirer :

Atelier Twitter

Je poursuis toujours l’atelier jeux et l’atelier coloriage dont le succès ne se dément pas, et j’ai organisé la première session de l’atelier cinéma, qui a attiré quelques petits yeux…

Atelier cinéma

Évidemment, avec l’obligation de mettre en place un média scolaire par établissement, c’est l’atelier journal qui me tient le plus à cœur : quelle que soit la forme définitive qu’il prendra dans les semaines qui viennent, transformé ou non en atelier Twitter, conduit en collaboration avec un ou des collègues, je continuerai à le promouvoir et à chercher à le remettre sur pied.

Déco du CDI

Pour finir avec ce long article bien occupé, comme le mois de septembre, une petite note légère : j’avais fait pas mal de choses pour rendre attrayante la signalétique des fictions au CDI et pour aménager le coin lecture en mai et juin 2015.

J’ai poursuivi cette décoration, épaulée de manière assez inattendue par un ancien élève de 3ème, qui a offert au CDI des affiches d’Harry Potter : ces dernières ont fait la joie des élèves qui ont assisté à leur installation, elles sont respectivement proche du rayon science-fiction et du coin lecture et on m’a déjà réclamé une exposition Harry Potter pour cette année.

Cette initiative est pour moi l’occasion de vous montrer le CDI dans son ensemble :

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Merci donc à Lucas pour cette excellente idée !

À la recherche de Maurice Jaubert

Voici le premier compte-rendu de lecture de la rentrée, qui arrive assez tôt, puisqu’il s’agit d’un livre paru au mois d’août, et que je garde un deuxième compte-rendu en réserve pour fin septembre ou début octobre.

Pour le titre de cet article, j’ai quelque peu hésité : il aurait pu s’appeler, en référence à l’auteur du livre « La Femme qui aimait Maurice Jaubert » (référence également truffaldienne) mais cela m’a paru quelque peu excessif… et pourtant… j’y reviendrai.

Pv31

Finalement je me suis décidée pour ce « À la recherche… » car ce livre, que je nommerai dans quelques lignes, tout en allers et en retours, tout en nostalgie et en sensations, avait quelque chose de proustien.

Truffaldien et proustien, ça y est les deux termes sont posés, ceux qui me connaissent bien savent que l’ouvrage dont je vais parler m’a plu.

Parfums, promenades et musiques

Le livre en question est un roman publié par Maryline Desbiolles aux éditions du Seuil, collection Fiction & Cie, Le Beau temps. Comme j’avais déjà trouvé il y a quelques jours, un livre consacré au cinéma dont faire le compte-rendu pour le mois de septembre, je n’avais pas prévu d’acheter ce livre…

desbiolles

Mais le premier ouvrage ne devant sortir que dans une semaine, j’ai découvert en me promenant dans le rayon fictions de ma librairie, ce roman qui se trouvait parler surtout d’un homme, beaucoup de musique, mais aussi de cinéma, et dont je ne connaissais absolument pas l’auteure.

C’est en lisant une par une les quatrièmes de couverture des nouveautés que mon attention s’est fixé sur Le Beau temps. Il y avait aussi un autre livre, dont j’ai perdu le titre, mais la lecture – déterminante – des quelques premières lignes ne m’a pas vraiment emballée. Celles du Beau temps, au contraire, m’ont saisie :

L’Ariane est une donneuse. L’Ariane, la banlieue à l’est de Nice, est une donneuse de noms. Ariane en tout premier. Ariane, Maurice Jaubert. Maurice Jaubert est le nom du collège de l’Ariane où je suis invitée pour parler avec les élèves d’un de mes livres qui met leur quartier en scène.

Passées ces quelques lignes, je me dis : un livre qui s’ouvre par la visite d’un collège… J’hésite, puis je poursuis, car je pense en moi-même que l’auteure rêve sur les noms et sur les lieux – une onomastique, en somme – et déjà je pense à Proust et à son « Nom de pays : le Nom »…

Sa visite la fait s’interroger sur Maurice Jaubert, tout comme je me suis demandée moi-même souvent qui sont les Maryse Bastié, Corentin Celton, Paul Bert ou encore Edgar Quinet en voyant leur nom dans les rues et les stations de métro.

Mais c’est en revoyant La Chambre verte de Truffaut que sa curiosité va plus loin, Jaubert occupant dans ce film une place prépondérante.

Qui est Maurice Jaubert ?

Dans La Chambre verte, une photographie, une époque et surtout une musique.

La photographie, c’est celle-ci :

jaubert chambre verte

Elle apparaît dans la chapelle des morts imaginée par Julien Davenne, le héros du film incarné par Truffaut lui-même, un homme veuf, rescapé de la Grande guerre, qui préfère se consacrer au culte de ses chers disparus que vivre parmi les vivants.

Dans cette chapelle, Truffaut a fait figurer les hommes, vivants ou morts, qu’il admirait : Cocteau, Proust, Henry James, et donc, Maurice Jaubert.

Dans la scène ci-dessus, la chapelle restaurée de Davenne s’offre pour la première fois au regard du spectateur, avec, évidemment la musique de Maurice Jaubert.

La musique de ce dernier apparaît dans trois autres films de Truffaut : L’Histoire d’Adèle H., L’Argent de poche et L’Homme qui aimait les femmes.

Mais au moment où Truffaut utilise la musique de ce compositeur, celui-ci est mort depuis plus d’une trentaine d’années, victime malheureuse de la drôle de guerre, et même disparu d’une manière injustement idiote trois jours avant l’armistice signé par Pétain, le 19 juin 1940.

C’est donc à travers les films de Truffaut que Jaubert est connu aujourd’hui, mais aussi par son travail avec certains des plus grands cinéastes français de l’entre-deux-guerres : Jean Vigo, René Clair et Marcel Carné.

Pour Jean Vigo, il a notamment écrit la musique de l’Atalante et de Zéro de conduite :

Pour Marcel Carné, il compose la musique de Drôle de drame, Quai des brumes, Le Jour se lève et Hôtel du Nord :

(Je ne mets pas forcément ces films dans l’ordre chronologique, j’ai simplement fait la part belle à ceux que je préférais).

Je dois avouer que, pour moi, Maurice Jaubert est resté longtemps indéfectiblement lié à Truffaut. Je le savais compositeur et disparu en 1940, mais je n’avais pas fait le rapprochement entre Carné, Jouvet, Arletty, Hôtel du Nord – pour ne citer qu’eux – et Maurice Jaubert.

Je rêvais d’ailleurs sur les noms moi aussi, les titres des films de Carné étant pour moi des expressions en trois mots, avec une poétique bien particulière à faire résonner : Drôle de drame, Hôtel du Nord, Quai des brumes, visiteurs du soir, enfants du paradis (j’ôte le déterminant à dessein). Et je rêvais sur les visages : celui de Jouvet aux sourcils froncés, celui de Michèle Morgan transfigurée dans Quai des brumes, celui d’un Jean-Pierre Aumont espiègle dans l’un et fiévreux dans l’autre…

Bien-sûr, j’ai une petite préférence pour Les Enfants du paradis, fresque sur les arts du spectacle, dont Jaubert n’a pas pu composer la musique, à laquelle j’avais déjà consacré un article, et dont de temps en temps, quelques répliques me reviennent en mémoire :

« Vous êtes trop fier Pierre-François, il faut rentrer en vous-même ». Alors je suis rentré en moi-même… Les imprudents ! Me laisser seul avec moi-même et ils me défendaient les mauvaises fréquentations !

Ou encore…

Paris est tout petit pour ceux qui s’aiment, comme nous, d’un aussi grand amour.

Je revois Arletty descendre le boulevard du crime, tout comme je peux revoir Jouvet caresser sa fourchette dans Drôle de drame, en répétant « Bizarre, bizarre… », Michel Simon chanter « Dormez, dormez, petits moutons », et Michèle Morgan demander à Gabin de l’embrasser. Tout comme je peux aussi revoir, chez Renoir, Pierre Fresnay jouer de la flûte dans La Grande illusion, ou Paul Meurisse sortir de la baignoire des Diaboliques de Henri-Georges Clouzot… il y a des choses qu’on a du mal à oublier.

Mais revenons-en à Maurice Jaubert, et plus précisément, au Beau temps de Maryline Desbiolles.

Mesures d’une vie ensoleillée

Si j’ai hésité à donner comme titre à mon article « La Femme qui aimait Jaubert » – en référence à L’Homme qui aimait les femmes – c’est parce que de la première à la dernière page, ce dont le lecteur fait l’expérience, c’est une rencontre amoureuse qui a eu lieu et n’a pas eu lieu.

Elle a eu lieu car nous y assistons, nous la voyons prendre forme et vie au fil des pages, à mesure que l’auteure explore et nous raconte la brève existence de Maurice Jaubert, qui prend plusieurs visages : Niçois, fils aimé, élève trop bon élève, amateur d’alpinisme et de voitures, étudiant en droit, soldat, musicien autodidacte devenu compositeur, intellectuel, époux et père de famille, mort pour la France… j’en oublie certainement.

Elle n’a pas eu lieu parce qu’elle reste un rendez-vous manqué, avec une figure immortelle et immortalisée mais absente, disparue, une photographie dans la chapelle des morts de La Chambre verte, où pour Maryline Desbiolles, il n’y aurait que les portraits de Jaubert, de sa naissance à sa disparition.

L’auteure n’est pas une spécialiste de musique : elle le dit elle-même, elle sait à peine lire les partitions, qui lui font l’effet d’un langage mystérieux et d’autant plus irrésistible. Elle s’attache davantage à l’homme derrière la partition, dont elle guette les moindres mouvements passés comme s’ils allaient encore advenir.

Elle suit Jaubert à la trace comme on se lancerait dans une filature. Elle nous en restitue la voix, que nous pouvons presque entendre, les mouvements, que nous pouvons presque sentir, et le regard, que nous pouvons presque croiser.

Ainsi, entre allers et retours, entre enfance et maturité, Maurice Jaubert n’est-il pas seulement compositeur de musiques des films que nous avons vus et revus, il devient à part entière un personnage de cinéma – d’une usine à rêves dans laquelle tantôt il s’éloigne, tantôt il se rapproche, flashbacks, gros plans, ralentis et arrêts sur image.

Arrêts sur image au milieu d’une promenade, qui passe par Nice, principalement, au passé (celui de l’auteur et celui de Jaubert) mais aussi au présent, par Paris, par le sud et la Provence, par l’Angleterre, par l’est fatal enfin.

Une page surtout m’a beaucoup plu, dans ce livre imprégné de poésie, de nostalgie et de tendresse :

Je regarde de nouveau À propos de Nice. Il est dit que Maurice Jaubert n’a pas rencontré Jean Vigo avant 1932. On m’a pourtant raconté que Maurice et son frère René auraient figuré dans À propos de Nice tourné en 1930. (…) je crois reconnaître Maurice parmi les endormis de la promenade des Anglais,  alangui sur une chaise, la figure posée sur sa main, la bouche entrouverte, le chapeau sur les genoux. Ce n’est sûrement pas lui, mais soudain l’innocente sieste m’annonce le dormeur du val de 1940, le dormeur soustrait au soleil du Midi, soustrait à la mer, le dormeur des futaies, de la mousse, des intermittences de la lumière, de l’ombre, il aura deux trous rouges au côté droit, son visage s’enfoncera dans la paume des bois, des Hauts Bois d’Azerailles dont la sonorité même est l’envers de Nice, de son unique syllabe, brillante, aérienne.

Les références poétiques, musicales et cinématographiques fourmillent dans ce roman, on y croise non seulement Carné et Vigo, mais aussi Ravel et Jean Giono, on s’y souvient de Rimbaud et de Proust, en attendant Truffaut.

L’auteur y mêle ses souvenirs à ceux de Maurice Jaubert, sa vie à la sienne, et partageant cette relation rêvée et privilégiée – elle nous y convie, nous amène à littéralement à vivre avec lui, avec elle – elle ne fait pas seulement de nous des spectateurs, ou les lecteurs attentifs d’une partition, mais le témoin indispensable de son amour en fuite.

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