Une fois n’est pas coutume, pour ce compte-rendu de lecture d’avril 2016, j’évoquerai non pas un mais deux livres… d’où le titre de cet article, général et fourre-tout à souhait !

Il y a longtemps que je n’avais pas parlé de Truffaut

Vous l’aurez compris, j’ai une fois de plus déniché un ouvrage sur mon réalisateur préféré…

On aurait pu croire que le filon était quelque peu tari après les multiples et très riches publications qui ont marqué les 30 ans de la disparition de François Truffaut.

Que nenni ! (j’arrive enfin à placer cette expression désuète dont je raffole !)

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Deux hypothèses, tout aussi subjectives l’une que l’autre :

  • soit l’œuvre de Truffaut, et plus globalement sa vie, sont des sources inépuisables d’inspiration pour les écrivains cinéphiles ;
  • soit son œuvre ne cesse de susciter l’intérêt, ce dont les mêmes écrivains susnommés se rendent très bien compte…

Ce qui est sûr, c’est que, chez moi, la deuxième hypothèse l’emporte, je suis donc la cible facile, inévitable et consentante d’un livre qui arborera pour titre « François Truffaut… »

Je ne vais pas faire la liste des articles de ce blog que j’ai consacrés à Truffaut, ou encore de ceux où je n’ai fait que l’évoquer au détour d’une phrase. Si l’envie vous en prend, vous pouvez allez jeter un coup d’oeil ici, ici ou encore ici.

Mais l’un d’entre eux, cependant, est suffisamment proche du sujet que traite le livre qui va m’intéresser dans quelques instants, j’en profite donc pour vous l’indiquer : il s’agit de ma participation, il y a environ un an et demi, à un concours d’écriture organisé par la Cinémathèque française et Télérama, Lettre à la Femme d’à côté.

De la spectatrice à la comédienne

En février 2016, est paru aux éditions Grasset un ouvrage d’Elizabeth Gouslan, journaliste et déjà auteur de biographies de Grace Kelly et Ava Gardner, Truffaut et les femmes.

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Toute à mon impatience et à la lecture du livre de Luchini, je n’y ai d’abord pas prêté attention.

Et quand je l’ai enfin aperçu, je n’ai pas été convaincue. J’ai déjà dit mes réserves sur les autobiographies de célébrités, qui risquent toujours racolage et nombrilisme, même lorsqu’il s’agit d’une célébrité que j’affectionne.

C’est dire à quel point j’étais réticente devant un ouvrage qui me proposait d’évoquer Truffaut et les femmes. Et d’abord quelles femmes ? Les mères, les épouses, les maîtresses, les filles, les comédiennes, les amies ?

Et puis je me suis dit que, certes, si l’auteur choisissait de me parler des femmes, c’était pour (mieux – ça j’allais le voir très vite, ou pas) me parler de lui. J’ai donc cédé à la tentation, et j’ai décidé de laisser sa chance à Elizabeth Gouslan.

Je l’ai laissée me parler de la mère de Truffaut, de sa famille, de Jeanne Moreau, Françoise Dorléac, Claude Jade, Catherine Deneuve.

Finalement, je n’y ai bien-sûr pas appris grand chose – et j’en suis très heureuse, car je ne vois pas ce qu’aurait pu m’apporter un scoop, une révélation sur Truffaut, qu’en aurais-je fait ?

L’auteur de ce livre évoque les femmes que Truffaut a aimées, et celles qui l’ont aimé, qui continuent à l’aimer. C’est au fond une biographie par les femmes, pas très différentes des autres ouvrages qui se sont penchés sur le réalisateur.

Les moments les plus émouvants du texte, c’est lorsque Elizabeth Gouslan évoque la façon dont Truffaut filme ses comédiennes, mais surtout lorsqu’elle partage son expérience de spectatrice, lorsqu’elle se promène avec d’autres cinéphiles dans les rues de Paris où ont vécu le cinéaste et ses personnages, lorsqu’elle tente de parler avec Jeanne Moreau au téléphone, ou lorsqu’elle cherche à croiser Deneuve dans la rue, sans jamais réussir à lui adresser la parole…

Des moments intenses, personnels, où la biographie rejoint, par petites touches impressionnistes, l’autoportrait.

Au fond elle ne fait rien de plus que tous les spectateurs qui ont aimé et qui aiment (ce qui me rappelle cette chanson de Cabrel que j’écoutais enfant « Quand j’aime une fois j’aime pour toujours ») Truffaut : partir dans une quête qui n’a pas de fin, à la poursuite d’un être qu’on ne connaît pas, qu’on n’a, pour certains, jamais connu, mais qui reste le grand frère, le père, l’ami spirituel, le guide inévitable en cinéphilie.

Et puis, si je dois ne garder le livre d’Elizabeth Gouslan que pour une raison, c’est pour m’avoir fait connaître cette blague de Truffaut, grand amateur de bons mots et de calembours, et que je cite, maladroitement, de mémoire :

« Pourquoi les prêtres n’ont pas de voiture ? – Parce qu’ils ont des habits sacerdotaux. »

Je dois à l’auteur un éclat de rire équivalent à celui suscité par la découverte d’un petit ouvrage sur Le Dictateur que j’ai commandé il y a quelques jours : Pourquoi les coiffeurs ? de Jean Narboni.

Après un petit clin d’œil (pas si hors sujet que ça) aux amateurs de tendresse, passons maintenant à la deuxième lecture.

D’une ville à l’autre

Elizabeth Gouslan nous avait promené dans Paris, sur les traces de Truffaut et Antoine Doinel, dans l’immeuble qui abritait les Films du Carrosse, dans les rues de Montmartre, avec comme point de repère, la Tour Eiffel qui surplombe tout ça…

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Mais Paris, au-delà de Truffaut, c’est une ville de cinéma, où Hôtel du Nord côtoie Drôle de frimousse, Le Dernier métro (Truffaut encore), French Cancan, On connaît la chanson, Amélie Poulain, Inception ou encore le Paris de Cédric Klapisch.

Partons pour d’autres horizons, tout aussi cinématographiques, et juste un peu plus ensoleillés peut-être.

Le deuxième ouvrage que j’ai choisi ce mois-ci est un petit livre d’une centaine de pages, à peine, lui aussi publié en février 2016, aux éditions Espaces & signes, dans la collection Ciné voyage : Rome mise en scènes, par Edouard Dor.

9791094176078

L’auteur est le créateur de cette collection, Ciné Voyage, dont nous apprenons plus dans les toutes premières pages du livre, et également sur le site internet des éditions :

Chaque livre de cette collection propose d’aller à la découverte, partout dans le monde, des « lieux du cinéma » : un quartier (ex. Montmartre), une ville (ex. Tokyo), une région (ex. la riviera italienne).

Les « lieux du cinéma » sont aussi bien :
– les lieux où ont été tournées des scènes emblématiques (lieux précis de tournage),
– que les lieux représentés ou évoqués dans certaines scènes (lieux utilisés comme symboles).

Ces ouvrages se présentent sous la forme de parcours-guides dont le fil rouge est le cinéma – comme reflet de la vie d’un quartier, d’une ville, d’une région, etc., mais aussi comme témoin de leur passé.
Ces livres ne se veulent pas exhaustifs concernant la filmographie du lieu choisi, cependant les films les plus emblématiques de ce lieu ne sont pas oubliés (même s’ils ne sont qu’abordés brièvement).

La collection compte pour l’instant quatre ouvrages, dont Rome n’est que le deuxième, et dont 2 sont encore, pour l’instant, à paraître.  C’est aussi celui de la collection qui m’a le plus attirée, puisque j’ai déjà eu l’occasion d’aborder, dans certains articles, le cinéma italien, à retrouver ici et ici.

Rome à redécouvrir

À la lecture de ce livre, je me suis cependant rendue compte, que, à de rares exceptions près, si j’aimais le cinéma italien, ce n’était pas forcément celui qui avait Rome pour cadre. Les films qui me plaisent le plus m’offre un panorama de l’Italie, Rome comprise, qu’il s’agisse du bien-nommé Voyage en Italie, de Parfum de femmes, de Padre Padrone, de Cinema Paradiso ou encore de Nos meilleures années.

Mais il y a, bien-sûr, des incontournables, que j’ai évidemment retrouvés dans l’ouvrage d’Edouard Dor, tout en tours et en détours, en vagabondages entre conquêtes et mélancolie, entre tendresse et violences.

Et j’ai eu beaucoup de bonheur à l’évocation de deux d’entre eux :

  • le Fellini Roma, évidemment de Fellini, qui est le premier film sur lequel l’auteur s’arrête, et dont la scène de découverte, puis d’estompement d’une fresque antique m’a vraiment marquée :

  • et les Vacances romaines, de William Wyler, avec la toute fraîche Audrey Hepburn et le séduisant Gregory Peck

Pour les films les plus récents, malgré des excursions à Florence, en Toscane et en Norvège, c’est définitivement Nos meilleures années qui me laisse le souvenir le plus ébloui de l’Italie.

Mais évidemment, le lieu de Rome que je connaissais le mieux, sans le savoir, c’est la Cinecitta, qu’évoque l’auteur dans son dernier chapitre, et où furent tournés les péplums emblématiques tels que Ben Hur ou Cléopâtre, et plus récemment la série Rome, qui reste une des références indépassables en matière de séries historiques.

La qualité majeure de cet ouvrage est de répondre totalement à son ambition : un parcours guide subjectif et non-exhaustif, pour des films à découvrir ou à redécouvrir, illustré de petites photographies efficaces, avec LE plus à la fin du livre : des promenades par films abordés, avec d’un côté le plan, de l’autre la mention des lieux du film dans leur ordre chronologique. À nouveau, simple et efficace.

Ce livre pourrait tout à fait être glissé dans la valise avant une petite escapade romaine… ne manquerait plus, pour ajouter une petite touche de modernité, qu’une application correspondante, qui proposerait au lecteur un extrait de film lorsqu’il passe dans telle ou telle rue, une image, un dialogue, que sais-je encore, pour s’immerger encore un peu plus dans la ville et dans son atmosphère cinématographique.

Voilà pour ces deux promenades cinéphiles, l’une presque exclusivement parisienne, l’autre tout à fait romaine, pour vous donner des envies d’escapades avec les beaux jours qui reviennent ou tardent à revenir…