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Mois : avril 2014

Le dragon de la cinémathèque

En ce moment a lieu à la Cinémathèque française, une exposition consacrée à Henri Langlois, à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance.

Source : Cinémathèque française

Source : Cinémathèque française

Henri Langlois est l’homme qui a fondé la Cinémathèque française en 1936 et, comme j’ai déjà eu l’occasion de le mentionner, le premier qui a eu l’idée de rassembler dans un même espace le film et le non-film (archives, costumes, affiches, ouvrages sur le cinéma).

Personnalité incontournable du cinéma – Cocteau le compare à un dragon gardien de ses trésors – Henri Langlois est également quelqu’un de fascinant du point de vue documentaire, ce qui se révèle à la fois dans ses écrits et dans cette exposition présentée jusqu’au 3 août 2014.

Les écrits de Langlois

À cette occasion, les écrits de Langlois ont été compilés dans un ouvrage intitulé Écrits de cinéma, publié en avril 2014 aux éditions Flammarion.

Source : Decitre

Source : Decitre

Cet ouvrage réunit près de 800 pages de textes, présentés et annotés par Bernard Benoliel et Bernard Eisenschitz, en collaboration avec la Cinémathèque et le ministère de la culture, et sous la direction d’un comité d’honneur pour le centenaire Henri Langlois. Il est préfacé par le cinéaste Costa-Gavras, président de la Cinémathèque. Suit un avant-propos des deux personnes ayant réuni les textes.

Les textes ne s’embarrassent pas toujours de la chronologie. L’ouvrage s’ouvre sur un entretien d’Henri Langlois avec Éric Rohmer et Michel Mardore pour les Cahiers du cinéma, publié en 1962. Suivent les « cahiers de jeunesse » de Langlois, poésies, textes autobiographiques, et premières critiques de films.

Les textes suivants accompagnent la « Naissance et vie de la Cinémathèque », font le panorama de vingt-cinq ans de cinéma entre 1936 et 1956, avec plusieurs hommages à des cinéastes. Trois textes rendent hommage à des figures clefs du cinéma et de la critique : André Bazin, Paul-Auguste Hardé et Georges Sadoul.

Enfin, « Cinéma d’ici et d’ailleurs » revient sur l’histoire du cinéma sous diverses formes : panoramas historiques ou géographiques, portraits de cinéastes et de comédiens, critiques de films. Un dernier chapitre est consacré aux textes publiés après 1968 et l’Affaire Langlois, et avant sa disparition en 1977.

L’importance du « commentaire » au cinéma

Contrairement à ce que pensent certains esprits étriqués qui ne supportent pas qu’un ouvrage sur le cinéma se consacre à autre chose qu’au film en lui-même, Henri Langlois se révèle, aussi bien dans ses écrits que durant cette exposition, comme l’être qui manie le mieux la comparaison, la rêverie sur le film, le pont entre deux films, entre deux cultures cinématographiques, entre deux arts.

Langlois

Pour lui, le cinéma est l’art par excellence du vingtième siècle, et c’est en cela qu’il l’associe, toujours dans un esprit poétique et « touche à tout », à toutes les autres formes d’art – peinture, musique, littérature – que ce soit à travers une programmation, dans un écrit personnel ou voué à la publication, ou dans le déroulement et la présentation d’une des expositions qu’il organisait au Musée du cinéma.

Bien entendu, le film reste la matière première, indispensable à l’amour porté au cinéma et à la transmission de cet amour. Mais pour Langlois, tout fait document. Tout aide à la compréhension du film, et c’est pour cette raison qu’il faut tout conserver. Selon lui, dès qu’une cinémathèque décide de sélectionner ce qu’elle conserve, elle fait oeuvre de vandalisme envers l’art cinématographique tout entier.

Si la Cinémathèque française faisait une sélection, où irions-nous ?

Comme la Bibliothèque nationale, nous prenons tout ce qu’on nous offre.

Nous ne sommes pas Dieu, nous n’avons pas le droit de croire à notre infaillibilité, et, d’ailleurs, d’après quel critère ?

Il y a l’art et il y a le document. (p.43)

Langlois, personnalité documentaire

À la lumière de cette lecture, et lors de la visite de l’exposition, j’ai pu explorer davantage l’univers documentaire de Langlois, tel que je le connaissais déjà – j’avais travaillé sur le non-film dans les bibliothèques spécialisées durant mon Master – mais j’ai fait aussi quelques belles découvertes.

De connu, il y avait d’abord cette volonté de « tout garder, tout montrer ». Les documentalistes connaissent la classification à facettes de Ranganathan, bibliothécaire indien, également connu pour avoir édicté cinq lois de bibliothéconomie, dont la dernière est : « Une bibliothèque est un organisme en développement ».

Il est intéressant de constater qu’Henri Langlois, fondateur de la Cinémathèque, avait édicté une loi quasi similaire pour le domaine du cinéma : « Une cinémathèque ne doit pas être un cimetière ». On doit y voir vivre les films, à travers toute sorte d’actions et de manifestations dévolues à cette institution.

Dans un texte intitulé « Pour une Cinémathèque française idéale », daté de 1941, Langlois fait l’énumération de ces actions : d’un côté les archives, de l’autre la diffusion.

Dans les archives, on retrouve les photos, les documents (scénarios, matériels de publicités, partitions de musique, correspondances), les documents filmés, des fichiers de classifications, la documentation journalistique et technique, ainsi que la bibliothèque :

Revues cinématographiques de tous pays. Livres sur le cinéma de tous pays. Catalogues et prospectus commerciaux de tous pays. Livres et articles manuscrits. Conférences imprimées, manuscrits ou dactylographiées.

La partie « diffusion » comporte aussi bien les expositions permanentes et temporaires du musée du cinéma, les projections, et une « bibliothèque publique sur le cinéma ».

Enfin, ce qui m’a fascinée dans l’exposition, et ce qui est directement liée à la vision de cette cinémathèque multiforme qui doit tout conserver et tout montrer, ce sont les dessins de Langlois, présentés dans le livre comme des « sortes d’organigrammes fantastiques (avec) la Cinémathèque en (leur) centre, véritable système solaire en expansion autour duquel gravite tout un monde de satellites à son service : bibliothèques, écoles, archives et cinémathèques étrangères. »

Source : http://www.telerama.fr/livre/ce-que-cachent-les-dessins-des-genies,68936.php

Source : http://www.telerama.fr/livre/ce-que-cachent-les-dessins-des-genies,68936.php

Ces dessins, pour moi, ce sont ni plus ni moins des cartes heuristiques ou des nuages de tags, destinés à synthétiser l’idée de la Cinémathèque tout en rendant compte de la profusion d’amour porté par Langlois au cinéma.

Un amoureux du cinéma

Dans sa préface, Costa-Gavras fait ainsi le portrait de Langlois :

Langlois n’était pas un critique de cinéma, il livrait au lecteur son plaisir à avoir vu, à avoir aimé un film. Et il essayait, en écrivant comme en projetant, de faire aimer le film à d’autres, ce qui touchait à l’essence même de sa vie : montrer à tout prix, collectionner pour montrer. (…) Avant tout, il y avait les films : pas le fétichisme du film, de ce qui accompagne les films, mais ce qui fait qu’ils sont, que ce soit l’écriture, les costumes, les accessoires… tout ce qui compose un film. C’est par là qu’il avait su toucher profondément à l’idée, non de la cinéphilie, mais de l’amour du cinéma. (p.22)

C’est cela qui transparait complètement lorsque l’on parcourt les textes de Langlois, aussi bien les écrits sur la Cinémathèque et sur les films, que les textes autobiographiques et personnels. On y trouve, omniprésents, un enthousiasme, une passion, quelque chose d’emporté, de fou, et d’incroyablement poétique – certaines critiques d’ailleurs sont écrites sous forme de prose poétique.

Heureux le cinéma qui m’a donné le don de la couleur et du mouvement, sans lui quelle place aurais-je à cette composition ? (p.65)

(…) le cinéma, cette force qui vous arrache à la banalité, ce songe que l’on fait tout éveillé, cette boîte à rêves, comme je l’appelle, qui est le plus puissant plaisir de l’imagination et du coeur (p.96)

Le cinéma est la synthèse des arts : arts plastique, dramatique, musical. (…) Le cinéma est ainsi l’équivalent de notre mémoire pour le cosmos. (p.207)

Dans ses critiques de films et dans ses portraits, Langlois se montre tout aussi passionné : les films qu’il évoque sont souvent grandioses, comme jamais on n’en avait vu avant, il les encense et prend souvent le lecteur à parti, pour lui faire partager cette adhésion totale et contagieuse.

Ses portraits sont, quant à eux, fourmillants de comparaisons aux autres arts : René Clair est comparé à Giotto et à Picasso, Visconti à Stendhal, Rossellini à Rembrandt, et l’historien du cinéma Georges Sadoul, à Champollion, Livingstone et Cuvier. Enfin, voilà quelques mots d’un portait de Chaplin :

Avec Chaplin, toutes les hyperboles deviennent lieu commun. Un mot suffit à définir sa place : il personnifie depuis plus de quarante ans le cinéma, il est la constante qui témoigne de l’universalité de cet art, il s’identifie si bien avec son langage qu’il défie la mode et le temps. (p.578)

Sous sa plume, tout est cinéma, chaque réalisateur, chaque film, chaque comédien devient le réceptacle de ce qu’est le cinéma, et son meilleur témoignage. Garbo est le cinéma, Sadoul est le cinéma, Stroheim est le cinéma, Chaplin est le cinéma. Car Henri Langlois « pense cinéma, voit cinéma, (son) imagination est cinéma ».

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Il n’est donc pas étonnant que la cinémathèque soit le cinéma, et que le cinéma soit cinémathèque.

Pour compléter…

  • le catalogue de l’exposition Henri Langlois, Le Musée imaginaire d’Henri Langlois, sous la direction de Dominique Païni, coédité par la Cinémathèque et les éditions Flammarion ;
  • L’Histoire de la Cinémathèque française, par Laurent Mannoni, publiée en 2006 aux éditions Gallimard ;
  • Toute la mémoire du monde, rapport de Serge Toubiana publié en 2003 et disponible ici en format PDF ;
  • La Cinéphilie, d’Antoine de Baecque, publiée aux éditions Hachette (réédition 2013) collection Pluriel Arts ;
  • le film documentaire Le fantôme d’Henri Langlois, sorti en 2004, réalisé par son dernier assistant Jacques Richard

Avril 2014 : séances et animations du CDI

Malgré un mois d’avril bien écourté par les vacances scolaires, voici un résumé des activités du CDI durant cette période.

Semaine de la presse, suite et fin

  • Débat sur la relation entre médias d’information et politique

Comme je l’avais indiqué dans un précédent article, j’avais réussi à organiser en collaboration avec un collègue d’histoire géographie, deux séances pour chacune de ses deux classes de troisième, avec comme thématique principale « Les médias doivent-ils être indépendants de la politique ? ».

Dans le même article, j’avais fourni une trame assez concise de ces deux séances, qui constituait davantage un document de travail pour les professeurs qu’une fiche à destination des élèves. Une autre fiche a été proposée aux élèves, expliquant le déroulé des deux heures :

  • Une heure de séance d’analyse des Unes de presse présentant le résultat du premier tour des municipales (comparaison du Monde, du Figaro, de Libération et de L’Humanité), suivie d’une partie de recherche en groupes ;
  • Une heure de débat où les élèves utilisaient les sources qui leur avaient été fournies pendant la première séance – une sélection de liens internet – pour argumenter sur différents thèmes déclinant le thème principal, à savoir :
  1. Les médias doivent-ils informer les citoyens sur la vie politique ?
  2. Les médias peuvent-ils utiliser la vie privée des hommes politiques ?
  3. Les institutions politiques peuvent-elles censurer les médias ?
  4. Tous les médias prennent-ils parti politiquement ?
  5. Les médias doivent-ils dénoncer les scandales politiques ?
  6. Les médias peuvent-ils soutenir un / des candidat(s) à une élection ?
  7. Les médias peuvent-ils influencer les décisions politiques ?

Malgré un temps de préparation assez court, les élèves s’en sont, pour la plupart, bien sortis. Ils devaient s’exprimer sur le sujet pendant quelques minutes, élaborer une courte argumentation, avec des exemples si possibles d’actualité, et choisir eux-mêmes d’être tous d’accord ou non sur la réponse à apporter à la question traitée.

Sauf environ un groupe par classe, ils se sont tous prêtés au jeu, même si quelques prestations nous ont laissés assez interloqués – ainsi, dans un groupe, l’un des élèves n’avait pas du tout interprété la notion de scandale comme une affaire éclaboussant un homme politique, mais plutôt comme une décision politique qui aurait fait scandale à ses yeux, c’est-à-dire pour lui l’augmentation des impôts et le mariage pour tous…

Bref, si les résultats étaient globalement intéressants, sans nul doute un temps de préparation plus important aurait permis d’enrichir le débat et d’éviter ce genre de « hors sujet ».

  • Information d’actualité et argumentation

Dans la foulée de ces séances sur deux classes de troisième, j’ai proposé la même séance à une collègue de français, pour sa classe de troisième qu’elle ne partage pas avec le même collègue d’histoire. À juste titre, elle a trouvé cette séance, certes intéressante, mais beaucoup trop tournée vers l’éducation civique, et elle m’a demandé si je pouvais construire une séance plus en relation avec la partie du programme de français consacrée à l’argumentation.

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Je lui ai fait plusieurs propositions, qui d’ailleurs, avec celle qu’elle a retenue, étaient bien plus en relation avec le thème de la Semaine de la presse « Une info, des supports », que le débat sur l’indépendance des médias. Je lui ai notamment proposé de travailler sur les réseaux sociaux, sur Facebook et sur Twitter, ou sur la comparaison des journaux et des sites de presse en ligne.

Sa seule restriction était : pas trop de politique. Finalement, la proposition retenue est une séance consacrée à l’étude du journal télévisé à travers ses gros titres. J’ai choisi comme date le 8 mars 2014, avec comme informations principales la disparition de l’avion de la Malaysia Airline, et la journée internationale des droits de la femme, entre autres. J’ai soumis à la collègue deux documents :

  • une fiche d’exercice pour faire analyser aux élèves la forme et l’argumentaire du journal télévisé Séance 3e JT FICHE EXOS ;
  • une fiche de cours faisant également un bref historique et un aperçu géographique du journal télévisé 3e cours JT

Bien que le JT ne soit plus à l’heure actuelle la « grand messe » qu’il représentait à une certaine époque, pas si lointaine d’ailleurs, j’ai hâte de voir s’il fait encore partie des pratiques des élèves pour s’informer, ce qui permettra peut-être d’orienter d’éventuelles séances, l’année prochaine, vers d’autres supports d’information, tout en conservant le lien avec l’argumentation. La séance ayant normalement lieu au mois de mai, j’en ferai le bilan à cette date.

  • Etude et fabrication d’une Une de presse ?

Ce projet est encore à l’étape de la discussion et a été retardé en raison de formations que j’avais à suivre. Il s’agit de faire étudier aux élèves de l’UPE2A différentes Unes de presse, pour analyser la manière dont est construite l’information, et peut-être, à proposer au collègue référent, pour fabriquer une Une de presse.

Sachant que ces élèves viennent déjà une fois par semaine au CDI, et qu’ils travaillent en ce moment sur un projet d’expression écrite et orale où ils sont tous les habitants d’un village subissant un tremblement de terre, il serait, selon moi, intéressant de créer la Une du journal du village au lendemain du tremblement de terre.

  • Expositions en lien avec la semaine de la presse

J’avais déjà montré, dans un article précédent, l’exposition des différents journaux et magazines reçus durant cette semaine, ainsi que les concours proposés aux élèves. Le dossier pédagogique du CLEMI m’a soufflé une autre idée – même si je n’ai pas pu la pousser aussi loin que le projet proposé.

En lien avec le centenaire de la Première guerre mondiale, j’ai donc affiché au CDI différentes Unes de journaux faisant référence aux événements ayant eu lieu en 1914 et jusqu’en 1915/16 (assassinat de l’archiduc d’Autriche, de Jaurès, déclarations de guerre, et premières batailles). Voilà ce que ça donne :

Expo Unes 1914

Voilà pour cette Semaine de la presse 2014, bien plus fournie que celle de 2013.

Expositions

Puisque j’en suis restée aux expositions, voici celles proposées début avril, juste avant les vacances. Après avoir démonté l’exposition consacrée à la semaine de la presse, j’étais un peu en manque d’inspiration pour proposer une sélection thématique aux élèves, hormis bien-sûr la traditionnelle exposition des nouveautés :

Expositions nouveautés avril 2014

Désormais j’adjoins toujours à cette exposition de nouveautés une affiche que j’envoie généralement avec mon Buzz (les actualités du CDI) sur la liste de diffusion du collège, et que j’affiche également en salle des professeurs. Voir document ci-joint : Nouveautés avril 2014

Pour compléter cette exposition, mon collègue d’histoire m’a donc suggéré une sélection thématique autour de l’antiquité et de la mythologie romaines, à destination principalement de ses élèves de sixième – exposition mélangeant documentaires, romans, pièces de théâtre et bandes dessinées :

Exposition antiquité

Voilà pour les expositions.

Liaison CM2-6e, suite…

Dans le cadre de la liaison CM2-6e, j’ai accueilli les deux semaines avant les vacances les cinq classes de CM2 qui dépendent du collège, pour la suite du projet déjà mentionné dans un précédent article.

Pour rappel : les élèves de CM2 viennent quatre fois dans l’année. Une séance de découverte du CDI, deux séances de recherche sur différents supports et en ateliers, et une dernière séance en mai, où ils sont répartis en demi-groupes avec les actuels élèves de sixième.

Début avril, c’était donc la 3e séance, où les élèves poursuivaient les travaux engagés en janvier / février, sur quatre ateliers suivants :

  • une fiche biographique de Jean Mermoz, sur Internet – même si par malchance, trois classes avaient dû durant la 2e séance travailler sur les ressources papier, en raison d’une panne de connexion ;
  • un planisphère à remplir sur les voyages de Mermoz, à l’aide de dictionnaires et d’atlas ;
  • deux fiches sur les avions et l’aviation, à remplir avec les documentaires ;
  • un atelier « artistique » où il leur fallait créer le logo et la devise du collège

Pour ces deux séances j’ai constaté de très bonnes choses, le bilan étant globalement très positif, mais également un défaut, dans l’organisation du 2e atelier, beaucoup trop complexe et plutôt abstrait, et que j’ai beaucoup simplifié entre la séance 2 et la séance 3.

Ces deux séances m’ont aussi amenée à réfléchir à l’organisation de la quatrième séance, avec les élèves de sixième. À l’origine je voulais faire passer les CM2 à l’oral devant les sixièmes. La prestation me paraissant pour eux beaucoup trop impressionnante, je préfère m’orienter sur une sorte de jeu de questions/réponses sur lequel je reviendrai plus tard.

Je garde cependant la partie consacrée à la présentation des logos et devises réalisés par les CM2 et au vote pour « le plus beau ». Bilan définitif de ces séances à retrouver ultérieurement.

Formations et considérations professionnelles

Enfin, le début de ce mois d’avril a été aussi occupé par un stage de deux jours, puisque je serai l’année prochaine référente ENT, dans le cadre du déploiement au collège de l’espace numérique de travail Mon collège-ent.essonne.fr

Avec la collègue qui est référente avec moi, nous envisageons déjà d’organiser une réunion de présentation et des ateliers à destination des professeurs et du personnel, en mai et / ou en juin.

Pour conclure cet article pas si résumé que ça, je commence, avec la fin d’année qui approche, à réfléchir à mon bilan d’activités, que je souhaiterais présenter au conseil d’administration.

Mais comme je suis naturellement bavarde et que j’ai la fâcheuse manie de bien détailler mes bilans d’activités – celui de l’année dernière faisait 13 pages, celui de cette année risque d’être plus long – je songe déjà à présenter, à côté du « pavé », une version allégée, sous forme d’infographie, ou peut-être de diaporama, en fonction du temps que je pourrais y consacrer.

La suite au prochain numéro !

 

Psychologie sociale du cinéma américain

Une oeuvre, littéraire, cinématographique, picturale, musicale ou philosophique, est toujours le fruit d’un contexte de création. Qu’il le veuille ou non, son auteur sera le plus souvent  influencé par la société qui l’a vu naître, et par le regard qu’il porte sur cette société. Rien ne sert de généraliser bien entendu, et je ne veux pas rentrer dans des propos sociologiques et critiques dans lesquels j’excelle bien moins que d’autres.

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Toujours est-il que généralement, on distinguera aisément le cinéma américain du cinéma européen et du cinéma asiatique, et que même à l’intérieur des continents, le cinéphile averti se réjouira des différences entre cinéma scandinave, français, italien ou espagnol à une même époque.

Il ne s’agit pas seulement d’une question de mentalités, de certaines considérations sur les tempéraments chauds ou froids, explosifs ou contemplatifs, dépressifs ou extravertis. Il s’agit également d’étudier, en ethnologue et en sociologue amateurs, la manière dont une société et une culture sont représentées, mises en lumière par le cinéma.

Always Hollywood

Pour cet article, comme pour le précédent, je reste résolument tournée vers l’ouest, et vers le cinéma américain. Ce n’est pas faute d’avoir tenté de trouver d’autres lectures potentielles, bien que le mois de mars ait été particulièrement riche en nouvelles parutions – à commencer par les innombrables biographies de Grace Kelly, surfant sans doute sur la vague du biopic à venir avec Nicole Kidman.

J’ajoute une petite tricherie à ce choix encore une fois américain, en consacrant cet article, non pas à une nouvelle parution mais à une édition poche « revue et augmentée » d’un ouvrage sorti en 2012. Et tant pis ! Cet ouvrage est certainement le meilleur que j’ai lu sur le cinéma depuis début 2014.

Je ne suis d’ailleurs pas la seule de cet avis, puisqu’il a reçu en 2012 le prix du meilleur livre de cinéma au Festival international du film d’histoire de Pessac, comme l’indique la quatrième de couverture. J’ignorais que ce genre de récompense existait mais voilà de quoi, encore, enrichir ce blog, si chaque année ce Festival récompense des ouvrages de cette qualité !

Sources : http://www.livres-cinema.info/livre/5625/mythes-et-ideologie-du-cinema-americain

Sources : http://www.livres-cinema.info/livre/5625/mythes-et-ideologie-du-cinema-americain

Trêve de suspense, voici les références de la pépite : Mythes et idéologie du cinéma américain, de Laurent Aknin, publié aux éditions Vendémiaire en mars 2014. Savourez-le sans vous ruiner : cette édition poche est à 8 euros.

Parle peu mais parle bien !

Certes, à la lecture de ce titre, j’en perçois déjà qui font la grimace et qui craignent d’ouvrir un pavé jargonnant et prétentieux. Rien de plus faux. Non seulement cette lecture ne vous prendra que quelques jours, mais elle en sera des plus agréables : fluide, sans prise de tête, imagée et riches en exemples et en références.

Bref, érudite sans être barbante, comme peuvent l’être les conversations avec des gens passionnés par leur sujet, même si ce sujet est très éloigné de vos propres préoccupations. L’amateur explorera ce livre sans crainte, comme le littéraire chevronné pourra suivre avec intérêt les propos d’un scientifique si ce dernier y met la même passion et la même simplicité.

Mythes et idéologie du cinéma américain ne se penche d’ailleurs pas sur un sujet si ésotérique que ça : Laurent Aknin a restreint son sujet à la fois sur le plan géographique et sur le plan historique. Ainsi, les films et l’univers cinématographique auxquels il consacre sa réflexion sont ceux sortis entre 1998 et 2014.

Autre restriction : il s’agit de ce qu’il appelle le cinéma de fantasy. Sous cette appellation, il regroupe « les films de science-fiction, les péplums, les films d’horreur et les films de super-héros » – étiquette contestable et maladroite si l’on s’en tient à la définition stricte de la fantasy, et que l’auteur utilise quelque peu comme un fourre-tout, ce qu’on est en droit de lui reprocher.

Enfin, pour faciliter la lecture de son livre, il propose en fin d’ouvrage un glossaire d’une dizaine de mots (soit une double page), et une chronologie. Cette dernière rappelle, pour chaque année, les principaux événements ayant impliqué les Etats-Unis, et les films traités dans l’ouvrage (production, réalisateur, interprètes principaux, suivis d’un résumé des plus concis).

 Un condensé de l’histoire américaine, à travers le cinéma

Si l’auteur s’intéresse aux films de science-fiction et de super héros, aux péplums et aux films d’horreur, c’est pour ce qu’ils révèlent de la société américaine, de sa psychologie, de ses craintes, de ses doutes, et de la façon dont elle veut être perçue dans le monde.

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Ce qu’il étudie également, c’est la rupture entre un avant et après 11 septembre, ce qui est magistralement amené par son introduction :

En 1933, King Kong se battait contre les avions au sommet de l’Empire State Building de New York. En 1976, dans le remake réalisé par John Guillermin, Kong affrontait les hélicoptères de l’armée sur une des deux tours jumelles du World Trade Center.

On a souvent rappelé, à propos des attentats du 11 septembre 2001, à quels points ceux-ci étaient prévus, mis en scène en quelque sorte, pour les caméras. (…) Mais on peut dire aussi, d’une certaine manière, que les attentats prenaient leur origine, de manière fantasmatique, dans les oeuvres cinématographiques américaines de fiction, et surtout de science-fiction (SF), de fantastique ou d’épouvante, c’est-à-dire dans les plus pures productions d’un imaginaire collectif.

L’introduction s’achèvent sur ces quelques lignes, riches de promesses :

Que faire quand l’imaginaire est devenu réel ? Inventer un nouvel imaginaire, hanté, une fois de plus et à juste titre semble-t-il, par l’idée de la fin du monde. Pur fantasme, production d’une idéologie ou nouvelle mythologie ?

C’est cette analyse de l’invention d’un nouvel imaginaire que Laurent Aknin va proposer au lecteur, partant d’exemples révélateurs d’avant 2001 – Armageddon, Deep impact, Matrix, Gladiator, X-Men, Pearl Harbor – jusqu’à aujourd’hui, soit depuis le traumatisme de l’agression, asséchant pour un temps la source des films catastrophes, jusqu’au renouvellement des genres.

Analyse sociale et philosophique

Si ce cinéma de « fantasy » trouve sa source dans les influences les plus anciennes – ancienne version de King Kong, Metropolis pour le cinéma de science-fiction, La Chute de l’empire romain pour les péplums, épisodes d’origine des Star Wars, Star Trek, Superman et Batman – l’auteur s’intéresse en effet à ses manifestations les plus récentes.

Le propos, jamais pontifiant, toujours éclairant, associe toujours l’image du film, fidèle au souvenir qu’en a le spectateur, et la réflexion sociale, voire philosophique. S’y côtoient des thématiques telles que la grandeur et la chute des civilisations, la peur de l’autre, de l’invasion ou de l’effondrement, et le renfermement d’une société sur elle-même, autour de valeurs morales qui ont parfois (toujours ?) tendance à verser dans le conservatisme.

De cette exploration, j’ai retenu quelques étapes qui m’ont séduite – je laisse volontairement de côté le cinéma d’horreur, que je connais trop mal pour pouvoir l’aborder avec le recul nécessaire.

 Quelques exemples…

  • Le péplum

Après avoir abordé la science-fiction et les films catastrophes, l’auteur s’attarde sur les reconstitutions antiques, dans un chapitre intitulé « Magie et hantise de l’Orient : le post-péplum », chapitre qui plaira aux férus d’histoire et de mythologie. Il revient ainsi sur le fait que le péplum est, à l’aube du vingt-et-unième siècle, un genre délaissé, après le fiasco financier engendré par le Cléopâtre de Mankiewicz.

Sources : Allociné

Sources : Allociné

Gladiator, de Ridley Scott, influencé notamment par La Chute de l’empire romain, apporte un nouveau souffle au genre du péplum. Mais il est également, cinématographiquement, l’un des derniers péplums à représenter Rome en tant qu’empire, avant les attentats du 11 septembre :

Jusqu’au milieu des années 60, le péplum américain se nourrissait de deux sources d’inspiration : la Bible ou Rome (…). Gladiator, péplum d’avant le 11 septembre, est le dernier à se situer à Rome, et pendant l’Empire romain.

Rome, jusqu’alors, représentait en effet métaphoriquement les États-Unis, dans leur position de puissance dominante. Un statut qui pouvait être mis en péril par le manque de moralité ou de religion de ses citoyens (…), ou bien par des dirigeants incapables (…) mais qui renvoyait toujours à la même réalité contemporaine.

Voilà la mise en perspective : la Rome lointaine aussi bien historiquement que géographiquement représentée dans le péplum – et c’est pour cela que, selon Laurent Aknin, le genre a sa place dans ce qu’il appelle encore une fois le cinéma de fantasy, au même titre que la science-fiction, car se déroulant dans un autre univers – est tout de même le reflet d’un « empire américain » inscrit dans l’époque durant laquelle le film a été réalisé.

Bien entendu cela vaut aussi pour les films réalisés après Gladiator, qui reflètent l’évolution des mentalités, mais aussi la permanence de certaines craintes et de certaines valeurs de la société américaine, même jusqu’à la bouse incroyable qu’est Pompéi, aussi spectaculaire numériquement que vide sur le plan scénaristique. Pour ceux qui auraient deux heures à perdre, voici l’intrigue résumée en quatre mots : Titanic avec un volcan.

  • Le film de super-héros

Pour les fans, vous allez vous régaler ! L’auteur y consacre un bon tiers du livre, et évidemment, pas de jaloux, on retrouve aussi bien les représentants de Marvel que de DC Comics. Cette exploration s’ouvre naturellement sur les X-Men, dont le premier film sort un an avant les attentats du 11 septembre – là encore, il s’agit d’une évolution de la société, sous le prisme cinématographique, qu’Aknin va restituer.

Sources : Allociné

Sources : Allociné

Mais ce qui m’a laissée sans voix, c’est la relecture historique et sociologique de ce premier épisode :

D’un côté Wolverine et Xavier, de l’autre Magneto et Mystique, la femme mutante caméléon. Ils s’affrontent sur un point fondamental : l’attitude à observer face au reste de l’humanité – le gouvernement américain en l’occurrence. (…) Magneto ne ressent que de la haine et du mépris pour la race humaine ; Xavier rêve quant à lui d’une coexistence pacifique entre les groupes. Comme dans la bande dessinée d’origine,  les deux leaders représentent l’un Malcolm X (…), l’autre Martin Luther King.

Suivent les bouleversements engendrés dans cet univers cinématographique par le 11 septembre, non seulement sur les X-Men, mais également sur d’autres personnages tels que Batman vu par Christopher Nolan, ou le héros de l’uchronie V pour Vendetta. 

Durant cette lecture, on a le sentiment que ces héros, qu’ils aient connu des vies antérieures avant 2001, comme Superman, comme Batman, comme les X-Men ou encore comme Spiderman, ou qu’ils aient vu le jour bien après (cinématographiquement parlant) comme Iron Man, Captain America ou Thor… tous ces héros s’assombrissent progressivement, ou peut-être grandissent ?, à de rares exceptions près, pour gagner en intensité filmique.

Et, là encore, ce n’est que mon impression, ils sont condamnés à l’échec sans cet assombrissement ou cette maturité forcée, suscitée par une société en perte de repères et d’influence face au reste du monde.

  • Renouvellement du film de science-fiction

Grandir, s’assombrir, se renouveler, pour échapper aux cataclysmes et à la disparition, tel est l’enjeu. Telle est aussi l’incroyable richesse d’expériences comme Inception, de Christopher Nolan, présentée dans l’avant-dernier chapitre, « Une nouvelle fabrique de l’imaginaire » – et ce sera mon dernier exemple.

inception

Inception peut être considéré comme une revanche sur un cinéma hollywoodien aseptisé, ne jurant plus que par la 3D comme recette magique, délaissant au passage toute prise de risque, tout effort de scénario (…). À l’opposé, le film fait preuve d’une telle ambition qu’on pourrait presque la juger suicidaire. Christopher Nolan y conjugue pour la première fois son art et sa technique éprouvée des films d’action spectaculaires avec son goût pour les scénarios impossibles, construits selon des règles d’une précision mathématique : un Escher du cinéma.

Indépendamment de l’influence de la société et des événements sur les productions cinématographiques, et des conditions de réalisation des blockbusters américains, l’auteur voit, semble-t-il, en Nolan, l’un des représentants artistiques, portant en lui un véritable univers d’auteur, de la nouvelle science-fiction, propre à insuffler de nouvelles représentations et de nouvelles mythologies au cinéma.

Si les autres réalisations semblent directement issues de leur contexte de création, la nouvelle fabrique de l’imaginaire apparaît comme un véritable kaléidoscope qui inspire et inspirera les événements et les générations tout autant qu’il s’en est inspiré, voire plus, comme, en son temps, aura pu le faire Star Wars.

À découvrir…

L’édition « revue et complétée » de cet ouvrage s’est, vraisemblablement, enrichie d’un dernier chapitre, recensant quelques films de 2013, dont World war Z, et d’une conclusion évoquant la sortie en 2014 de Noé. 

Je me suis quelque peu attardée sur les exemples qui m’ont frappée, mais qui ne sont qu’un échantillon de ce qu’illustre ce petit livre magistral, que j’espère vous avoir donné envie de consulter…

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