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Blog pour cinéphiles et profs docs

Mois : mai 2012 (Page 3 sur 3)

La courbe variable de l’âge

Pendant ma scolarité, j’ai connu un professeur particulièrement optimiste qui affirmait que c’était un métier formidable permettant de rester jeune. En effet, quel meilleur moyen, selon elle, de conserver sa jeunesse que de la voir toujours en face de soi ?

Malheureusement, s’il est tout à fait possible de se sentir jeune en voyant les élèves, et en quelque sorte, en se nourrissant de leur propre jeunesse, il est beaucoup plus difficile de conserver ce sentiment lorsque ces mêmes élèves vous regardent. Le plus dur pour moi est d’être d’un seul coup devenue une « Madame ». La première fois que quelqu’un vous appelle « Madame », on hésite entre le ouf de soulagement que procure l’entrée dans l’âge adulte et professionnel, et le soupir de tristesse et de nostalgie, ça y est, on est vieux.

La posture de professeur documentaliste souffre d’autant plus de cette variabilité de l’âge. Elle est principalement due à la vision que, on aura beau le nier, l’on a de cette profession. Pour beaucoup, voire pour la majorité, le professeur documentaliste n’est pas vraiment professeur et à peine documentaliste. Avec un peu de chance, auprès des collègues, il est un « demi professeur », et encore. Pour les élèves, c’est à peu près la même chose. Ils connaissent rarement notre nom, encore plus rarement notre statut, et le CDI est tour à tour pour eux un endroit poussiéreux ou un sanctuaire, un espace de détente où il faut parler plus bas qu’ailleurs, un service de reprographie ou le lieu à éviter.

Même lorsque l’on débute dans le métier et que l’on veut parler de ce que l’on fait à quelqu’un qui ignore le monde de l’éducation nationale, ou qui l’a oublié, la meilleure façon de lui donner une idée est de dire que l’on est « la dame du CDI », même si c’est l’expression que l’on redoute le plus.

« Dame du CDI » est une expression d’une autre époque. Pour moi, elle désigne les personnes pas vraiment agréables qui, lunettes sur le nez et humeur en mode « je souris quand je me brûle », passent leur temps à dire « chut » ou à crier, et qu’on a toujours l’impression de déranger.

Le défi est donc de faire passer le message suivant aux élèves : je ne mords pas, je suis ouverte à des pratiques nouvelles, je suis moderne, mais je ne suis ni un distributeur de livres, ni une photocopieuse ou une imprimante ambulante.

L’âge du professeur documentaliste est variable : il dépend de sa capacité à réfléchir sur son métier et ses pratiques, à se remettre en question, ainsi que de son état mental et physique et du volume sonore de la pièce où il travaille.

Il est beaucoup plus facile de paraître jeune et branchée lorsque, pour préparer une séquence sur le manga, des élèves vous surprennent en train de visionner une vidéo du « Joueur du grenier » (avec des écouteurs), même si votre crédibilité peut y perdre quelque peu. Cela devient plus difficile lorsque vous devez faire face à des élèves qui ont décrété qu’ils étaient en vacances avant l’heure… (c’est d’ailleurs difficile de juger de la frontière entre le volume sonore que l’on tolère et de celui que l’on ne tolère plus).

Et l’une des plus grandes craintes, à mon sens, du professeur documentaliste, est de devenir un jour la caricature aigrie, usée, exaspérée et démodée qu’il a toujours tenté de fuir.

 

Salut à tous !

J’ai toujours pensé que commencer quelque chose était la chose la plus difficile au monde, dans quelque domaine que ce soit. En littéraire intoxiquée que je suis, je sais que pour les écrivains, le plus dur est de trouver la première phrase de leur œuvre. Que l’on songe au Aurélien d’Aragon « La première fois qu’Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide », ou aux premiers mots de Marcel Proust dans A la recherche du temps perdu « Longtemps je me suis couché de bonne heure. », chaque incipit – c’est le nom barbare que l’on donne aux premières phrases d’un roman – a fait suer sang et eau à son créateur. Aragon a d’ailleurs publié à ce sujet un texte tout à fait évocateur et malheureusement depuis longtemps épuisé : Je n’ai jamais appris à écrire ou les incipit. C’est dire la difficulté à toujours commencer quelque chose.

Les premières choses nous semblent toujours les plus importantes, les plus décisives : premiers mots, premiers pas, premier amour, première fois…

A plus forte raison, les premiers mots que l’on écrit d’un texte, qu’il soit court, comme cet article, ou qu’il soit aussi long qu’un roman fleuve, mettent en scène. On donne un titre, peut-être pas définitif. « Salut à tous ! », comment savoir s’il y aura des tous ? Et l’on entend donner en quelques mots une définition de qui l’on est.

Je suis donc une littéraire par nature, douée d’une forte tendance à digresser – à m’éloigner au fur à mesure que j’écris du sujet qui m’était fixée – et à faire des phrases à rallonge. J’aime les tirets, qui ajoutent une idée au sein d’une phrase, les guillemets et les parenthèses.

Je suis une cinéphile par vocation et par passion, éclectique et généralement bon public.

Enfin, je suis professeur-documentaliste de profession.

Par ces trois casquettes, et grâce à mon aptitude naturelle à digresser, je parlerai sur ce blog aussi bien des œuvres et de mes expériences littéraires, des films – depuis les films muets au dernier Tim Burton – et de l’univers du CDI, des élèves, des livres et du numérique. Quant à l’ordre dans lequel je compte le faire, évidemment il n’y en a pas…

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