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Blog pour cinéphiles et profs docs

Mois : mars 2013 (Page 1 sur 2)

Petit compte-rendu de formation sur Internet

Comme je l’avais mentionné dans l’article précédent, j’étais en formation la semaine dernière. Ma tendance quasi refoulée à la maniaquerie me pousse de temps en temps à retranscrire au propre ce que j’ai (mal) écrit.

Cette formation était en deux parties : la première a eu lieu début février, juste après InterTice et la conférence musclée de Marie-France Blanquet ; la seconde était le jeudi et le vendredi de la semaine dernière. Thématique générale : Internet, quelles pratiques au CDI ? Je n’avais pas tant choisi cette formation pour me familiariser avec des outils, mais plus pour avoir des idées de pratiques pédagogiques avec les élèves.

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Première partie : Internet pour les documentalistes

Cette journée était consacrée à l’usage professionnel d’Internet et aux outils de veille, que les professeurs documentalistes doivent « pratiquer » au quotidien, par exemple pour s’informer sur les dernières nouveautés en littérature jeunesse ou les dernières actualités en matière d’éducation et de documentation…

Pour cette première journée, je ne vais pas résumer tout ce qui a été dit : il s’agissait surtout d’un échange, le plus souvent informel autour de nos pratiques et des outils qui nous étaient les plus utiles et les plus familiers. Je me contenterai de faire une petite liste des points abordés et des liens suggérés.

1) Liens suggérés : 

  • La rubrique « Veille professionnelle » sur le site des documentalistes de l’académie de Versailles.
  • Le site Raynette, qui permet de retrouver qui se cache derrière le nom de domaine d’un site Internet.
  • Le site Abondance qui suit, entre autres, l’actualité des moteurs de recherche.
  • Les sites des URFIST : celui de Lyon sur la veille et les moteurs de recherche, celui de Bretagne où enseigne Alexandre Serres.

2) La veille : surveillance d’un sujet donné. Points abordés :

  • Le Portillon Doc pour docs qui permet de faire une recherche sur un champ précis du savoir, grâce à l’utilisation des indices Dewey.
  • Les newsletters, listes de diffusions et les alertes (Google Alerts : veille thématique sur des sujets d’actualités).
  • Les agrégateurs de flux RSS (ex : Portail Netvibes).
  • Twitter. Permet le suivi des blogs et actualités de certains collègues, entre autres Fenêtre sur (tutoriels, axé TICE), BlOg-O-nOisettes (comptes-rendus de lectures et critiques de films) et L’odyssée d’LN (séances pédagogiques).

3) La curation : veille et éditorialisation, scénarisation des infos. Outils mentionnés :

Deuxième partie : Former à la maîtrise de l’information en ligne.

Cette deuxième partie de formation m’a fourni un bon stock d’idées à réinvestir avec les élèves, suivant différents axes de travail :

1) Préparer sa recherche.

C’est la première étape de la recherche : il s’agit, à partir d’un sujet donné, de conceptualiser, de trouver les mots clefs, grâce à un brainstorming, des cartes heuristiques, etc. Nous avons réfléchi à plusieurs manières de procéder :

  • relever les mots clefs importants d’une phrase.
  • confronter le Larousse en ligne et Wikipédia, en faire étudier le sommaire, puis les différents paragraphes pour en retrouver les mots clefs.
  • définir des axes de recherche avec un plan ou un questionnement quintilien.
  • construire un document de collecte : en faisant plusieurs copier-coller, retrouver les mots clefs et reformuler. Le copier-coller devient ainsi le point de départ du travail, et non l’arrivée.
  • ne donner aucune consigne : laisser chercher. Appliquer le principe de sérendipité (ou plus négativement la pédagogie par l’échec) pour avoir différentes pistes de recherche et élaborer une carte heuristique.

2) Rechercher et sélectionner l’information

C’est la démarche qui consiste à trouver le bon outil de recherche (base de données, moteur…). Liens suggérés :

  • Mon diapason : étude comparative de différents outils. (attention : inscription obligatoire).
  • URFIST de Rennes : plus de 80 outils spécialisés pour différentes recherches sur le Web.
  • J’en profite pour faire de la pub vers l’article d’une copine sur la sérendipité !

3) Evaluer l’information trouvée. Là encore plusieurs démarches.

  • Vérifier la pertinence de l’information en retrouvant les mots les plus souvent utilisés (grâce au site Wordle qui permet de générer des nuages de tags en indiquant une adresse URL ou en faisant le copier coller d’un texte.
  • Proposer une grille d’évaluation de l’information sur Internet : soit celle-ci que j’avais proposée (à laquelle il faudrait ajouter la fonction de l’auteur, la présence de publicité et la qualité de la langue), soit une grille proposant trois axes : identification (URL, auteur, structure, présentation générale), popularité (page rank) et contenu (mise à jour, auteur, vocabulaire utilisé).

Différents liens ont été proposés pour cet axe : Open site explorer, un site qui donne le nombre de liens pointant vers une adresse URL (attention : gratuitement, l’accès est limité à 3 recherches par jour), et Raynette pour étudier le nom de domaine.

L’accent a aussi été mis sur la distinction entre page web et document PDF, entre page et site, et, concernant Scoop it, entre la personne qui collecte le document et l’auteur de ce dernier (qui fait quoi ? qui cite quoi ? qui est l’auteur de quoi ?)

L’exemple le plus ludique d’évaluation de l’information est la diffusion d’informations fausses sur lesquelles faire travailler les élèves. En gros, il s’agit de les faire travailler sur la rumeur et le canular (Saint Pixel, le petit Singly, la vidange du lac d’Annecy, le dahu, l’étude d’un pays imaginaire, etc.). Quelques liens utiles :

  • la perle du pearltrees de Stéphanie Galloin sur le sujet ;
  • le site Hoaxbuster ;
  • les documents de e-profdocs sur la rumeur ;
  • l’outil Jog the web pour organiser l’information dans une démarche ou un exercice à proposer directement à l’élève (inscription obligatoire).

4) Différents autres points abordés plus succinctement :

  • Restituer l’information : affiches, diaporamas.
  • Adopter une attitude responsable : sensibiliser les élèves à la notion de droit d’auteur et de citation des sources, en réalisant, par exemple, un QCM grâce à Hot potatoes.
  • Faire réaliser des bibliographies, voire même intégrer un générateur de bibliographie dans E-SIDOC, grâce au tutoriel de Fenêtre sur.
  • Travailler sur l’identité numérique. Une collègue nous a proposé un diaporama très complet sur le sujet notamment avec des vidéos de Cyprien et d’un voyant pas banal.

Au milieu de ce laboratoire d’idées, l’une des découvertes les plus affligeantes par sa bêtise abyssale reste cependant le nouveau réseau social à la mode, ask.fm, qui me paraît être le mix parfait des émissions de télé-réalité – ou pseudo télé-réalité – actuelles (Yolo), et des émissions mélos (Le jour où tout à basculé et Au nom de la vérité) qui elles-mêmes associent le talent des comédiens de Plus belle la vie, la qualité d’intrigue des Feux de l’amour et le tire-larmes de Toute une histoire.

Un gros moment de solitude intellectuelle !

Spécial Semaine de la presse : le fait divers au quotidien du CDI

Contrairement à ce que laisse croire mon titre, je n’ai pas travaillé avec les élèves sur le fait divers dans le cadre de la Semaine de la presse.

Pour tous ceux qui n’ont ni souvenir scolaire, ni un CDI comme horizon plus ou moins proche, la Semaine de la presse est une manifestation annuelle durant laquelle les écoles, collèges et lycées reçoivent gratuitement un large échantillon de titres de presse (accompagné d’un dossier thématique, de suggestions de séances, etc.)

Le professeur documentaliste a tendance à guetter cette semaine comme le fauve affamé guette la malheureuse antilope affolée…

Evidemment, comme tout ce qu’on attend et prépare avec impatience – les fêtes de Noël, un anniversaire surprise, les soldes, les vacances – rien ou presque ne se passe comme prévu ! Et tout prend l’allure d’un fait divers (voilà l’explication lourdingue du titre !)… ou d’une succession de faits divers :

La doc était archéologue !

Mardi 18 mars. Il est 12h. Le courrier tarde à arriver au collège, et la doc s’impatiente : elle attend les journaux, magazines et autres réjouissances afin de préparer la semaine de la presse. Elle a déjà reçu une cinquantaine de titres, arrivés pendant les vacances, et il lui manque principalement les quotidiens et hebdomadaires nationaux, et les magazines people et féminins.

Un détail, me direz-vous ? Non, un drame : la doc est méticuleuse. Elle veut préparer son expo. Alors, pour combler son attente, elle décide de faire du désherbage de périodiques (en gros de virer tous les vieux, en suivant à la lettre les instructions de Savoirs CDI, la bible en ligne des dames – et messieurs – du CDI).

Je repasse à la première personne. J’ai décidé de tailler dans le gras : ouaaahhh un TDC de 1972 !

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J’ai aussi trouvé le TDC du mois de ma naissance, ça c’est collector, je garde (en plus, il y a Alix en couverture, ça ne pique pas trop les yeux)…

Un vieil Okapi que j’ai moi-même lu au CDI de mon collège en tant qu’élève ou chez moi (j’étais abonnée) : ah, les merveilleux souvenirs de Chair de poule !

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Un Science et vie junior qui montre X-Files en couverture : ça devrait passionner les nostalgiques de la série – je vous ai fait grâce du Okapi avec Mac Gyver en couverture !

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Bien-sûr, on trouve parfois pire (la preuve, ici) et j’ai eu un collègue en début d’année qui m’a régulièrement envoyé des images de son « musée des horreurs » : ouvrages de géographie sur l’URSS, vieilles éditions de classifications Dewey, livres soit-disant sur des nouveautés technologiques et présentant le minitel…

Tout ça pour affirmer à nouveau le bonheur de faire du vide – bonheur partagé avec élèves et collègues qui se font parfois une joie de nous débarrasser.

Le CDI était (encore) fermé !

Sacrebleu mais c’est un comble. Voilà, aussi, pourquoi j’étais impatiente de préparer mes expos : j’étais en formation jeudi et vendredi. Deux jours à voir des copains copines doc et à échanger sur cette grande question : « Former à l’usage de l’information en ligne ».

En gros, comment utiliser Internet avec les élèves.

Je suis repartie avec plein de découvertes, certaines sérieuses (Jog the web, le canular comme outil pour aider à l’évaluation de l’information, Wordle, etc.), d’autres moins sérieuses (Moi moche et méchant : évidemment, passer les soirées avec des profs docs un peu barrés, et néanmoins ex-tuteurs, ça peut causer certains dommages intellectuels).

Bref, à la grande tristesse de certains élèves habitués, j’ai déserté mon CDI. Revenue lundi, j’ai, dès mon arrivée, fini d’installer les magazines manquants. J’avais distribué en salle des profs et par mail la liste des titres reçus et des exemples de séances, mais je n’ai pas eu beaucoup de retours.

Voilà le document que j’avais proposé :

Semaine de la presse

J’ai du coup également créé un jeu concours pour les élèves, avec des questions sur Internet et sur la presse. Les récompenses des premiers : des jeux (mémoire et culture générale) et très certainement des abonnements à Mon quotidien, avec les sous du foyer. Voici ce jeu concours :

Concours Semaine de la presse

Coupure de courant au collège : une doc pète les plombs !

LE projet prévu cette année dans le cadre de cette semaine, c’était la participation des élèves de l’atelier journal au Concours de Unes du CLEMI Créteil.

Le but : après avoir reçu un fichier de dépêches AFP et un fichier de documents iconographiques à utiliser, il faut fabriquer une Une de journal pour le lendemain et envoyer cette production sous format PDF  avant 16h.

  1. Le 25, je reçois donc les dépêches et les images. J’imprime, je trie, je fais des rubriques et des sous-rubriques.
  2. Le 26 à 10h20, durant la récré, petit sondage auprès des élèves de l’atelier : quelles sont les informations importantes de la journée ? Chaque élève choisit un lot de dépêches à traiter (politique, société, culture). Mon collègue CPE et moi-même gardons le reste (économie, environnement et santé).
  3. À 12h30, les élèves travaillent sur leurs rubriques respectives, choisissent les photos, la place de leur rubrique sur la Une, nous présentent un dessin pour accompagner une info.
  4. À 15h30, la Une est quasi prête : mon collègue CPE la met en page dans son bureau. Un beau logo, c’est chouette, on est tout fiers de nous.
  5. À 15h45, c’est le drame : l’ordinateur s’éteint d’un seul coup. SABOTACHE ! Il se rallume après cinq minutes et rame comme un dingue… pendant qu’on tente de retenir des mots qui dépasseraient notre pensée (mais bon tout de même, p… de b… de n… de d… de b… de m… d’ordinateur !)
  6. Finalement, à 16h15, j’envoie un mail contrit et suppliant, mon cœur au bord du clavier, à qui de droit, en expliquant le retard et en espérant que la jolie Une aura tout de même sa chance !

Parce qu’elle est belle, non ?

CONCOURS DE UNE SEMAINE DE LA PRESSE 2013

La notion de document appliquée à Chaplin

Chose promise, chose due, une nouvelle fois. Voici la deuxième partie de mon sujet sur Chaplin.

Cela fait quelque temps que la manière de présenter cet article me trotte dans la tête. Comme je cherche souvent à m’amuser en travaillant, et à consolider mes passions par des fondations professionnelles, je présente de temps à autre un sujet de doc avec des exemples et des associations d’idées cinématographiques ou littéraires. De la même manière, j’aime traiter un sujet littéraire ou cinéphile en le reliant à des notions info-documentaires.

Le coin du doc

Avant de me lancer dans le cinéphile, je ferai donc un petit rappel doc. En effet, Chaplin, tout comme Truffaut (et j’aurai l’occasion d’y revenir plus en détail), est l’un des cinéastes auquel s’applique le mieux la notion de document, et même, rétrospectivement, d’homme documenté. L’étude de ces deux cinéastes donne la même impression de palimpseste documentaire.

En sciences de l’information et de la documentation, apparaissent les notions de document primaire, document secondaire et document tertiaire :

  • le document primaire, c’est le document original, « en lien avec l’idée d’oeuvre originale qui renvoie aux concepts d’auteur, de propriété intellectuelle et, par extension, à celui de référence.» (Savoirs CDI)
  • le document secondaire, c’est le traitement documentaire du document primaire, qui permet de le décrire et de le localiser (bibliographies, catalogues, index – j’y ajoute par extension chronologies et filmographies).
  • le document tertiaire est le résultat d’un travail poussé portant sur le document primaire :

« Faire la différence entre un document tertiaire et un document primaire permet  de saisir l’écart entre l’oeuvre originale (le document primaire), signée par un auteur qui en porte la responsabilité, et une forme réduite, vulgarisée qui tente de rendre compte du contenu informationnel de cette oeuvre. La perception de cet écart, qui «déforme» par l’octroi d’une autre «forme», permet d’appréhender la subjectivité du processus d’information et le décalage qui s’instaure entre l’information produite par l’auteur (ou informeur) et l’information perçue par un récepteur (ou informé).» (Savoirs CDI)

Le document primaire appliqué au cinéma

Durant ma formation, comme j’ai eu l’occasion de le mentionner il y a peu, j’ai produit un mémoire professionnel sur « Le non-film : spécificité documentaire des ressources cinématographiques ».

Lorsque l’on s’intéresse aux ressources sur le cinéma, en effet, on distingue le film, objet premier (le but premier du cinéma) et objet final (résultat porté à l’attention du spectateur), et le non-film, objet dérivé du cinéma, qui prend aussi bien en compte les accessoires, le matériel, les décors, les archives, les monographies et les revues.

Le film est donc la matière première, le document primaire, l’oeuvre originale, et le non-film, plus précisément l’ouvrage sur le cinéma, fait figure de document tertiaire. On y retrouve les ouvrages de référence ou usuels (dictionnaires, encyclopédies, fondamentaux critiques et théoriques), les beaux livres, les monographies, les ouvrages des créateurs sur leurs propres oeuvres, et les ouvrages réflexifs qui relient le cinéma à d’autres champs du savoir.

Et Chaplin, dans tout ça ?

Tout ce que j’ai expliqué précédemment nous permet de considérer que les films de Chaplin constituent les ressources primaires d’une documentation sur ce cinéaste. La documentation primaire sur Chaplin, c’est Le Kid, Les Lumières de la ville, Le Cirque, Les Temps modernes, Le Dictateur… tout le reste appartenant au non-film.

La zone de flou entre primaire et tertiaire – et qui n’est en aucun cas ici le document secondaire – c’est l’autobiographie. Je ne vais pas faire un cours de littérature : je considère l’autobiographie d’un point de vue strictement documentaire.

Elle est document primaire, puisqu’elle est l’oeuvre originale qui se penche sur ce qu’il y a d’encore plus premier avant le film, l’homme et sa vie. C’est elle qui lui permet le contrôle de ce qui va être dit, publié, étudié sur lui : c’est le premier pas hors ligne vers l’homme documenté. L’autobiographie permet d’être le premier à parler de soi, avec le choix des armes.

Elle est aussi document tertiaire puisqu’elle ne vit pas, elle revit. Elle ne crée pas, elle raconte, restitue, réfléchit. Face à la vie et aux films qui sont dans l’action, dans le mouvement, dans l’empirique, elle n’est qu’une reconstitution.

Histoire de ma vie, Charlie Chaplin : document primordial.

Mais dans le cas de Chaplin, quelle reconstitution ! S’il y a bel et bien une autobiographie de cinéaste à lire, c’est celle-ci.

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Publiée pour la première fois en 1964, Histoire de ma vie (My autobiography) n’est justement pas seulement l’histoire d’une vie, depuis l’enfance anglaise entre misère et vie de saltimbanque, c’est aussi l’évocation d’un monde disparu, avec son atmosphère, qui évolue du muet au parlant et d’une guerre à l’autre. C’est une galerie de portraits magnifique : on y croise aussi bien les stars de Hollywood, les présidents américains successifs, que Cocteau, Einstein ou encore Gandhi. On y découvre un Chaplin artiste, philosophe, humaniste (mais non politique ou en tout cas, non politisé) et écrivain, et un Chaplin intime auprès de sa famille.

J’ai longtemps parcouru le livre en français, une ancienne édition que j’avais couvert lorsque j’étais ado, et qui tombe tout de même en miettes. Je l’ai aussi en anglais (la seule version que j’ai actuellement sur moi), et je ne citerai que ce très connu portrait d’Hitler, esquissé par Chaplin :

« The face was obscenely comic – a bad imitation of me, with its absurd moustache, unruly, stringy hair and disgusting, thin, little mouth. I could not take Hitler seriously. (…) The salute with the hand thrown back over the shoulder, the palm upwards, made me want to put a tray of dirty dishes on it. ‘This is a nut !’ I thought. But when Einstein and Thomas Mann were forced to leave Germany, this face of Hitler was no longer comic but sinister.»

Rapidement, document secondaire.

Dans ce domaine-là, il s’agit exclusivement, comme je l’ai dit en préambule, des bibliographies, bases de données et index, auxquels on peut ajouter chronologies et filmographies.

Je n’ai pas de références papier précises, je me contenterai de renvoyer au site officiel consacré à Charlie Chaplin.

Diversité de la documentation tertiaire : quelques beaux exemples…

Enfin, pour clore ce long sujet, passons à la documentation tertiaire. Plus haut j’ai indiqué que pour le cinéma, il s’agissait en général du non-film, et en particulier des usuels, des beaux livres et albums, des monographies, et des réflexions que suscite l’étude de l’oeuvre d’un cinéaste ou d’un aspect du cinéma.

Ces réflexions peuvent être aussi bien historiques, esthétiques, littéraires, sociologiques, psychologiques, économiques, techniques, biographiques ET autobiographiques, métatextuelles (les écrits des professionnels, leurs réflexions sur leur art), philosophiques, voire même culinaires. Tous les domaines peuvent s’approprier cet univers qu’est le cinéma – et celui de Chaplin ne fait pas exception.

  1. La référence : il s’agit du recueil de textes d’André Bazin consacrés à Charlie Chaplin, paru en mars 2000 aux éditions des Cahiers du cinéma (collection Petite bibliothèque). Je recommande particulièrement son « Introduction à une symbolique de Charlot » et son « Pastiche et postiche ou le néant pour une moustache », qui fait écho à l’extrait de l’autobiographie que j’ai cité plus haut.
  2. Le beau livre. L’ouvrage que j’ai dans ma bibliothèque est Chaplin, une vie en images, de Jeffrey Vance, publié en 2004 aux éditions de La Martinière et malheureusement indisponible actuellement, sauf auprès de quelques revendeurs… C’est fort dommage, car c’est réellement un très beau livre, avec une iconographie très soignée.
  3. L’étude… culinaire. Un ouvrage récent, cette fois-ci. A table avec Chaplin : 60 recettes vagabondes, de Claire Dixsaut est paru en septembre 2012 aux éditions Agnès Vienot. Lui aussi est très bien illustré, et ludique. On y retrouve la recette des petits pains (La Ruée vers l’or) et les fraises à la crème du Dictateur. À déguster sans modération !

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Post-scriptum :

Pour ceux qui auraient trouvé cet article fastidieux, et qui seraient tout de même arrivés jusque-là, malgré les embûches du jargon documentaire, Cinephiledoc reviendra très vite avec des sujets un peu moins sérieux !

Chaud et froid : Chaplin vu par Eisenstein

Cet article sera en deux parties, comme ceux publiés précédemment sur Hitchcock.

La rencontre artistique

La rencontre entre deux univers artistiques est toujours intéressante : que pensent deux artistes sur leurs manières réciproques de voir les choses, de travailler ? En quoi leur sensibilité les rapprochent – ou les éloignent ?

Cette rencontre peut se faire sous forme d’entretiens – les entretiens Hitchcock / Truffaut sont les plus célèbres, en tout cas pour le septième art – sous forme de correspondances, d’articles, d’essais ou de discours.

Tantôt, la confrontation tourne à l’affrontement, entre anciens et modernes, entre une vision et une autre. Tantôt, il s’agit de rendre hommage, d’analyser, de se considérer comme un disciple, un continuateur, ou de rapprocher deux œuvres et de voir entre elle une sorte de communion spirituelle et esthétique.

Cette rencontre peut même ne jamais avoir lieu. Elle est rêvée, fantasmée, entre l’artiste et celui qu’il admire. Elle est implicite, se manifeste dans l’œuvre et il faut savoir la déchiffrer, saisir l’influence d’autrui dans l’expression personnelle du film, ou de toute autre forme artistique.

Deux univers, deux langages

C’est pour cette raison que j’ai choisi un ouvrage très court, en format poche, paru en février 2013, et sur la première de couverture duquel on pouvait lire : Serguei Eisenstein – à la ligne – Charlie Chaplin. En dessous, une photo de Charlot, et en dessous de la photo, entre crochets : Circé / Poche.

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Deux noms l’un en dessous de l’autre. En quatrième de couverture, juste une citation. Pas de résumé. Est-ce une correspondance ? Une analyse ? Des articles croisés ? Le récit d’une rencontre ? Aucune précision. Voyons toujours…

Après tout, mettre presque côte à côte Les Temps modernes et Le Cuirassé Potemkine, voilà une perspective intéressante !

On ouvre le livre. Ce que l’on découvre, ce sont quatre petits textes d’Eisenstein, dont trois seulement sont consacrés à Chaplin : « Hello Charlie ! », « Charlie the Kid », « Le Dictateur ». Le quatrième texte est une réflexion plus personnelle sur la venue d’Eisenstein au cinéma, entremêlée de références à la littérature et à la peinture, « Histoire d’un gros plan ». Le tout est finalement assez déconcertant.

Une critique douce amère

Ce qui m’a surtout frappée, à la lecture de ces textes, c’est le regard idéologique, et qu’il faut forcément recontextualiser, d’Eisenstein. C’est un cinéaste soviétique, qui invite celui qu’il considère comme un enfant en révolte contre le capitalisme et l’utilitarisme de la société américaine, à rejoindre le rang des compagnons de route du communisme.

Pour témoins, ces quelques lignes extraites du premier texte, « Hello Charlie ! », qui s’adresse directement à Chaplin :

« Le déchainement des agressions fascistes, l’inhumanité du fascisme et sa façon de fouler aux pieds tous les idéaux humains ne pouvaient pas ne pas interpeller et indigner un artiste humaniste de Votre envergure. À en juger par ce que, de loin, nous percevons de Vous, Vous seriez en train de Vous approcher à grands pas de ce qui constitue, pour nous, artistes soviétiques, le but essentiel de notre vie même : le combat acharné pour les idées de justice, d’humanité et de fraternité.

Aucun honnête homme, et a fortiori aucun artiste, surtout de Votre stature, ne saurait, en ces années d’obscurantisme fasciste, se détourner du pur idéal humanitaire qui s’incarne actuellement dans une partie du monde représentant un sixième des terres du globe. »

Le premier texte est directement un appel à la sensibilité sociale de Chaplin, sensibilité envers les travailleurs, mais aussi envers l’humanité, face au conflit mondial qui s’annonce.

Le deuxième texte, « Charlie The Kid », étudie la vision esthétique mise en œuvre par Chaplin dans ses films : selon Eisenstein, il s’agit de la vision d’un enfant, toute à la révolte et à la cruauté, face à un monde adulte consumériste et matérialiste. Là encore, la représentation de la société américaine est esquissée à gros traits. Si le regard de Chaplin s’affirme, c’est bel et bien parce qu’il est mis – ou se met lui même – à l’écart de cette société, comme vagabond, ou comme critique.

Le troisième texte est simplement une étude quasi linéaire du Dictateur.

Rencontre d’un regard

Enfin, dans le dernier texte, Eisenstein évoque sa venue au cinéma. Il l’explique par la capacité à avoir un œil « cinématographique », qui distingue le gros plan – c’est le titre de l’article, « Histoire d’un gros plan » – de son arrière-plan. Selon lui, ce qui fait l’œil cinématographique, c’est cette faculté de savoir saisir dans l’ensemble d’une scène (la chambre d’un enfant) le détail à retenir (une branche de lilas sur un paravent).

Qu’il donne des exemples picturaux – Degas – ou littéraires – Poe, Pouchkine, Dostoïevski – importe peu finalement. Ce qui importe, c’est que cet article est complètement affranchi de toute influence idéologique et traduit le sentiment personnel de l’individu sur sa propre création.

En tout cas, de cette rencontre avec Eisenstein, qu’il parle de Chaplin ou d’autre chose, je suis restée quelque peu troublée : je n’avais pas encore lu sur le cinéma quelque chose à la fois d’aussi impersonnel (les trois premiers textes) et d’aussi entier sur le plan esthétique (quatrième texte), d’aussi élogieux envers Chaplin et d’aussi ancré dans un système de pensée.

C’est certainement la raison qui me pousserait à lire les textes d’Eisenstein sur Walt Disney, publié chez le même éditeur en février 2013, parce que je suis convaincue d’y trouver la même confrontation de deux univers artistiques, sous forme cette fois-ci non d’hommage, mais d’affrontement.

Dans l’univers des comiques muets

Splendeur et décadence du cinéma muet

« Les comiques étaient censément petits, difformes ou gros. C’étaient des lutins et des bouffons, des cancres et des parias, des enfants se faisant passer pour des adultes ou des adultes à la mentalité d’enfants. Pensez aux rondeurs juvéniles d’Arbuckle, à sa timidité pleine d’affectation et à ses lèvres peintes, féminines. (…) Et puis parcourez la liste des accessoires et accoutrements qui ont façonné les carrières des maîtres incontestés : les chaussures avachies et les vêtements dépenaillés du vagabond de Chaplin, le vaillant Milquetoast de Llyod, aux lunettes cerclées d’écailles ; l’ahuri de Keaton, avec son chapeau plat et son visage figé ; le naïf à la peau blafarde de Langdon. »

Movie Theatre 1917

Ceci est un extrait du roman de Paul Auster, Le Livre des illusions, roman que j’ai sans cesse eu à l’esprit durant ma dernière lecture, consacrée au cinéma comique américain. Le Livre des illusions est paru en 2004. Il raconte comment, à la mort de sa femme et de ses enfants dans un accident d’avion, un professeur d’université, David Zimmer, trouve refuge dans l’écriture d’un livre consacré à un cinéaste disparu, Hector Mann.

Paul Auster nous plonge dans l’univers mélancolique et mystérieux du cinéma muet et de ses artistes torturés et éphémères, condamnés à faire rire et à s’adapter au parlant, ou à disparaître. C’est une histoire plus belle et plus vraie que nature, qui rappelle aussi bien Sunset Boulevard (Boulevard du crépuscule) que Singin’ in the rain (Chantons sous la pluie) ou plus récemment, The Artist.

Le titre qui zoome ! Donnez-moi le menu…

À ces hommages fictifs au passé du cinéma, fait écho un ouvrage bien réel. Il s’agit presque d’un fascicule, d’un peu plus d’une centaine de pages, et au titre à rallonge : Tartes à la crème et coups de pied au fesses : Le Cinéma comique américain. Vol. 1 : Les années flamboyantes du court-métrage. Ouf ! Paru en novembre 2012 aux éditions Gremese, c’est l’œuvre de Enrico Giacovelli.

Tartes à la crème

Le but de l’ouvrage : nous offrir un panorama de cent ans de cinéma comique américain, depuis les premiers films Edison jusqu’à Woody Allen. Nous n’avons pour l’instant que le premier volume, mais à la fin, l’auteur nous annonce gracieusement les épisodes qui suivront.

Dans ce premier épisode, la période étudiée est celle qui du court-métrage muet, celle que l’auteur délimite entre la naissance du cinéma et 1920. Après une brève – et très belle – introduction qui consacre la supériorité du rire sur le sérieux et le tragique, il part à la recherche de la première comédie, au cœur des studios Edison. Puis nous découvrons les grandes figures du muet à leurs débuts, éternelles ou oubliées : Mack Sennett, Mabel Normand, Roscoe « Fatty » Arbuckle, Charlie Chaplin, Buster Keaton, Harold Llyod, Larry Semon, Charley Chase.

J’ai vu beaucoup de Chaplin, mais surtout les longs-métrages. Je connais un tout petit peu Buster Keaton. J’ai entendu parler de Mack Sennett et de Harold Llyod. Par contre, les autres noms mentionnés m’étaient totalement inconnus. Et pourtant, ce petit ouvrage est construit comme un voyage, bien illustré et parfois si agréablement raconté qu’on a presque l’impression de voir ces films que l’on n’a jamais vus.

On apprend à connaître ces personnages et la construction de leur univers particulier, avec leurs accessoires, leurs tics, leurs grimaces, leurs défauts, leurs vies et leurs films à toute allure et cette condamnation inévitable au silence et à l’oubli – sauf pour les plus célèbres d’entre eux. On découvre, on sourit, on est ému…

… Laissez-moi sur ma faim !

… Et bien souvent, on reste sur sa faim, parce que l’on voudrait savoir la suite. Pas seulement à la fin du volume, mais parce que, maladroitement, l’auteur veut en garder pour plus tard. Un exemple :

Dans le quatrième chapitre, Giacovelli nous présente Roscoe « Fatty » Arbuckle, un comique américain qui, avec son visage de poupon et ses allures de bonhomme Michelin, a incarné le « gros lard » (je cite) du cinéma muet. Il évoque son absence relative de subtilité, ses tentatives pour émouvoir, puis son déclin :

« Les films sont achevés, difficilement, mais leur destin est à jamais lié au scandale personnel qui heurte l’acteur comique de plein fouet, un certain 11 septembre amer et obscur, comme il y en a eu d’autres au cours de l’histoire américaine. »

On passe sur la référence inutile aux attentats du World Trade Center, qui n’ont aucun rapport choucroutal avec le reste, et consciencieusement, on saute à la note de bas de page, qui nous informe sèchement : « Nous en reparlerons plus en détails dans le deuxième volume. »

La suite du texte fait plusieurs mentions mystérieuses au fameux scandale, poursuit tout de même en évoquant les derniers films, puis la mort du comique et sa postérité… et tant pis pour les lecteurs alléchés par le dit scandale : vous n’en saurez pas plus avant le 2e volume !

Pourtant, l’auteur avait bien réussi à intéresser, voire à passionner, avec ses anecdotes et cette rétrospective de l’âge d’or du muet : pourquoi donc s’embarrasser de ces petites manœuvres destinées à hypnotiser le lecteur « Venez, venez acheter mon 2e volume quand il sortira ! » ? Pourquoi, alors que nous avons le détail alléchant des prochains épisodes à la toute fin, s’encombrer en plus d’un encadré tape-à-l’œil « Coming soon » ?

Cependant, ce petit fascicule se lit bien, et même parfois captive. Vous vous intéressez aux mondes disparus, vous avez une vocation contrariée d’archéologue, ou tout simplement l’univers du muet, et ses films avec, comme le Kid de Chaplin, « Un éclat de rire, et peut-être une larme » vous fascine ? Faites plaisir à l’auteur, ouvrez-le !

Il en faut bien un : le petit détail comique !

Est-ce une erreur de traduction, de l’américain à l’italien, puis de l’italien au français ? Page 27, reproduction d’une affiche de Nickelodeon, un film de Peter Bogdanovich dédié aux débuts du cinéma comique. L’affiche annonce :

Before Rhett kissed Scarlett. Before Laurel met Hardy… etc.

La légende de l’affiche traduit : « Avant que Rhett ait embrassé Rossella, avant que Laurel ait rencontré Hardy… »

Soit le personnage d’Autant en emporte le vent se prénomme Rossella en italien, et nous sommes forcés de compatir à sa douleur, soit la traductrice française n’a JAMAIS vu Autant en emporte le vent. Qui se cotise pour lui offrir le DVD ?

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